jeudi 28 janvier 2010

L'aide humanitaire grassement payée?


Je n'ai pas l'habitude de commenter l'actualité. Comme tout le monde, je lis les grands titres, dont le rôle est d'attirer notre attention. Or hier, il en est un qui a piqué ma curiosité suffisamment pour que je lise l'article au complet. Faut dire que le titre était plutôt accrocheur: «Haïti: les orthopédistes veulent être payés». Mais lisant cela, je me suis dit que ce devait être une ruse du journaliste pour nous amener à lire son article, que je vous invite à lire ici, si vous ne l'avez déjà fait. Ce n'était pas une ruse. Pour ma part, je n'en reviens pas encore. Plus je lisais, plus je rougissais de honte. Quoi! L'aide humanitaire rémunérée à raison de 800 $ par jour? C'est ça la condition? Payez-nous sinon pas d'aide? Quelle honte! Franchement, faut le faire...

Ici, à notre petit hôpital, nous avons reçu des équipes américaines, espagnoles et, dernière en lice, brésiliennes. Ces gens-là viennent avec de l'équipement, du matériel, des médicaments et surtout, surtout, leur compétence et leur générosité. Et je peux vous garantir qu'il ne se font pas payer 800 $ par jour pour leurs services...! Qu'on se comprenne bien: je n'ai rien contre la rémunération de services professionnels, bien au contraire. Mais il me semble que la générosité passe également par le renoncement à cette rémunération, quitte à la canaliser dans une autre direction, si l'argent est là et qu'on ne sait qu'en faire... Mais payer ces médecins qui ont prêté le serment d'Hippocrate de soigner leur prochain? Pensez-en ce que vous voulez, mais pour moi, c'est scandaleux, y'a pas d'autre mot.

Car ce n'est pas tant l'argent qui me choque comme le principe qui le sous-tend. Ici, on voit les équipes débarquer et ce que ces spécialistes veulent, c'est soigner. Aider. Contribuer à soulager les éclopés. Bref, faire preuve d'humanité envers un peuple différent, qui souffre, qui en arrache et qui en a maintenant plein les bras. C'est ça, l'idée de l'aide qu'on appelle humanitaire. On n'embauche pas des spécialistes; on n'achète pas les équipements ni les médicaments: on se fie sur la générosité humanitaire. Sur le bon cœur des mieux nantis. Sur leur compassion. Il s'agit ici de faire un geste qui, pour une fois peut-être, ne rapporte rien. Qui n'est pas lucratif ou mercantile. Humain, tout simplement. Or, mes compatriotes passent ici à côté d'une belle occasion. Maintenant, au contraire, tous ceux qui lisent le français ont pu lire, sinon l'article, à tout le moins son titre pas du tout équivoque dans ses implications. Et le lectorat francophone sur Internet est plus vaste qu'il ne l'a jamais été: Amérique, Europe, Asie, Afrique... sur tous les continents il y a des gens qui parlent français et qui le lisent avec aisance. Et qui disposent d'une connexion Internet. Or, je vous le demande: avez-vous lu un titre semblable ailleurs, vous autres? En anglais, en italien, en espagnol ou en finnois? Mais nous sommes où, là?

Les Haïtiens ont un mot pour ça: chiche. Et voilà pour les gens de mon pays: des gens chiches. Des gens qui sont prêts à aider à la condition qu'ils soient payés pour le faire! Et pendant ce temps, Patrick Lagacé sur son blogue d'hier s'offusque qu'il y ait un concessionnaire Porsche à Port-au-Prince!... J'avoue que je n'ai pas compris son indignation. Chacun sa montée de lait, faut croire...

En tout cas, je peux vous dire que les Brésiliens, c'est beau de les voir aller... gratuitement!

2 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec toi, c'est honteux. Y a pas d'autre mot pour le décrire. "On demande ce montant pour compenser les pertes de revenu." Allo? Faut-il vous expliquer le concept de mission humanitaire? Oui, ça implique des pertes de revenu, c'est le principe du bénévolat! Ouf! Quelle belle réputation ça va leur donner, mais aussi nous donner comme québécois! Je te suggère aussi le lien suivant (SRC) qui te permettra aussi de voir l'entrevue avec le représentant des orthopédistes: http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2010/01/27/010-haiti_specialistes_quebec.shtml
    How low can you go? Daniel

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  2. Finalement, ils ont dit non... je m'en doutais bien (http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2010/02/02/011-haiti-orthopedistes.shtml). Mais le simple fait d'avoir étudié la demande pendant une semaine, ça démontre un manque de leadership. Ça aurait dû être un non catégorique dès le début.

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