Aucun message portant le libellé histoire personnelle. Afficher tous les messages
Aucun message portant le libellé histoire personnelle. Afficher tous les messages
jeudi 13 juin 2013
La flamboyance du flamboyant
D’entrée de jeu, je le confesse : je ne suis pas un maniaque des fleurs. Je suis plutôt du type «arbre», pour autant que cette distinction existe. Parlez-moi d'érables, de bouleaux, de frênes, voire de peupliers faux-tremble, de mélèzes ou de sapins et je suis partant. Mais les fleurs, même du temps du "Flower Power", m'ont toujours laissé un peu froid. Quand Rivard chante «J'avais des fleurs dans les cheveux / Fallait-y être niaiseux», c'était exactement mon opinion à l'époque. Ce qui ne veut pas dire que je n'apprécie pas les fleurs, bien au contraire. Le parfum de certaines fleurs, leurs couleurs, leurs formes, sont autant d’éléments qui les rendent appréciables même si on n’en est pas maniaque. Ainsi et pour tout vous dire, j’adore les pissenlits à cause de leur couleur, les iris et les trilles à cause de leur forme, les pensées à cause de leur parfum. Mais parlant de parfum, connaissez-vous celui, capiteux, de la fleur du frangipanier? Un vrai parfum envoûtant, exotique à souhait… Je vous dis ça parce que nous en avons un dans la cour qui en est à sa première floraison et qui s’en gonfle d’orgueil, on le voit bien… Mais le plus beau, c’est l’un des flamboyants qui, lui aussi, a décidé cette année que le temps était venu de nous offrir ses fleurs. Rouges. Rouge flamboyant, en fait…
Faut que je vous dise que les flamboyants ont une valeur particulière pour nous. En effet, à l’occasion de notre première venue en ce pays de la démesure, je travaillais comme enseignant à l’école Flamboyant! La petite école était en effet bordée de ces arbres majestueux qui n’avaient rien de flamboyant à l’époque puisque leur saison était terminée. C’est à l’été suivant que j’ai pu comprendre et apprécier la raison de leur nom : l’arbre devient rouge et sous une certaine lumière, brille de mille feux — flamboie, pourrait-on dire — et se fait assez remarquer, disons. Assez pour qu’on ait le goût d’en avoir dans sa cour, ce qui est exactement ce que nous avons fait : nous en avons planté quelques-uns, il y a environ quatre ans. Immédiatement, je vous entends me dire que quatre ans, c’est bien peu pour que des chétifs arbustes puissent prétendre à une maturité suffisante pour leur faire porter leurs fleurs. Mais les flamboyants poussent à vue d’œil et… voyez vous-mêmes le résultat!
En plus, l’arbre a tendance à produire des branches horizontales qui, évidemment, procurent l’ombre que tout le monde cherche sous les tropiques, un point apprécié à sa juste valeur. Et justement, parlant de valeur, il faut bien avouer que l’arbre n’en a aucune aux yeux de mes amis haïtiens. D’abord, il ne produit aucun fruit comestible, et déjà, l’intérêt vient de baisser radicalement; puis, sa matière ligneuse est extrêmement pulpeuse et donc impropre à une quelconque utilisation commerciale : on ne peut rien faire avec ce bois; enfin, l’arbre produit des racines puissantes et peu profondes qui s’étendent dans toutes les directions et qui cassent tout pour se frayer un chemin vers l’humidité. Bref, pas le genre d’arbre que l’on veut juste à côté de la maison, si joli fût-il lorsque ses fleurs s’excitent.
La raison pour laquelle je vous parle de ces arbres, c'est qu'ils sont symboliquement liés à notre vie au sud et qu'ils représentent cette beauté sauvage et naturelle qui n'existe que pour elle-même. Que l'arbre soit utilisé dans plusieurs pays tropicaux à des fins ornementales n'enlève rien au fait que ce n'est pas là son intention : il est comme ça et c'est tout. Et parfois, j'avoue que cette beauté gratuite nous réconcilie avec l'état du monde...
dimanche 14 avril 2013
Petit dimanche
Aimez-vous les dimanches? J’espère que oui. Je sais que pour certains, certaines, c’est un jour fade, sans éclat, sans intérêt, mais pour moi, c’est un bon jour et pas tant à cause du repos dominical auquel on l’associe comme parce que c’est dimanche, tout simplement.
Les dimanches se suivent et, pour tout vous dire, se ressemblent, à quelques variations près. Ainsi et selon ce qui est maintenant notre tradition, nous nous levons plus tard le dimanche : quelquefois passé 7h30, ce qui est vraiment tard pour nous...! Puis, le petit déjeuner est, exceptionnellement en ce jour, tout sauf petit : œufs, bacon, pommes de terre rissolées, tomates et toasts au beurre, tous les ingrédients sont réunis pour faire grimper le taux de cholestérol à des sommets himalayens, mais bon, c'est dimanche…
Pour digérer, quoi de mieux que le Sudoku de La Presse du jour? Le dimanche, c’en est un classé «très difficile», mais entre nous, cette classification ne veut pas dire grand-chose puisqu’il s’en trouve parfois des «moyens» qui sont plus casse-tête que les «très difficiles»… Tout de même, il faut prendre le temps de résoudre ce problème et l'activité gastrique s’en accommode tout à fait bien. Pour suivre, un peu de lecture. Que j’aime facile et sans prétention, je l'avoue sans gêne. Présentement, je lis — relis plutôt — "Total Control", de David Baldacci, auteur américain assez populaire. "Part Crichton, part Ludlum", dit la critique. Rien pour se péter les bretelles, rien pour se comparer à Grisham ou à Connelly, mais suffisamment intéressant pour qu’on en poursuive la lecture; personnellement, je n’en demande pas plus. Dehors, s’entend un office religieux. Pas les adventistes : il s’agit d’un autre groupe — catholiques peut-être ou n’importe quoi d'autre; leurs chants sont différents et de meilleure qualité sonore. Dur dur de chanter plus faux que les adventistes... Faut dire aussi que ces bons chrétiens ne nous dérangent pas trop car ils sont plus loin et donc, le volume de leurs litanies n'en devient que plus acceptable...
Dans quelques minutes, nous partons pour la plage. C’est une activité simple, routinière même puisqu’elle revient à presque toutes les semaines, mais dans un pays tropical, la plage est toujours agréable, je pense que vous serez d'accord sur le point. Tout comme l'est le maintenant traditionnel "rum sour", que je prendrai aujourd’hui à la santé de mon ami Antonio qui se les gèle présentement dans la sloche montréalaise…
Après la virée à la plage, ce sera le retour à la maison, lecture, un peu de vagabondage sur le Net, la bière de fin de journée et, en soirée, la télé et ses films...
Qui osera nous plaindre?
mercredi 17 octobre 2012
J'ai fait un rêve
![]() |
(c) Patrick J. Lynch |
Rassurez-vous, rien à voir avec celui de Martin Luther King. Mais comme je me suis éveillé avec le fou rire, et comme cette tribune me permet de raconter ce qui me plaît, je vous le partage.
Comme la plupart des rêves, j’en ignore le commencement. Nous voici donc dans le vif du sujet, sans introduction et sans prélude, où je dis à ma douce compagne que je me sens la tête drôle, à la fois vide et pesante. Dans un deuxième tableau, un médecin et une infirmière (ou médecin elle aussi peut-être, l’histoire ne le dit pas) examinent des radiographies et nous apprennent, à ma compagne et à moi-même, que ma cervelle est «tombée» dans ma cavité nasale, laissant mon crâne vide, rien que ça! Je veux me moucher, mais on m’en empêche radicalement : le risque est trop grand que j'évacue ainsi une partie de ma cervelle! Les professionnels sont perplexes et confondus : le cas est exceptionnel et visiblement, ils ne savent pas quoi faire. On me pose des questions de routine auxquelles je réponds logiquement, preuve s’il en est besoin que mon cerveau, bien que déplacé, fonctionne toujours adéquatement. Double perplexité de la part du ou des médecins… Moi, tout ce que je désire, c’est me moucher, car la pression à l’intérieur de ma cavité nasale me chatouille irrésistiblement. Ce qu’on me refuse absolument. Et soudain, ma compagne, avec ce gros bon sens qui la caractérise, propose aux médecins : «Pourquoi ne pas le mettre tête en bas, tout simplement, et laisser la gravité remettre sa cervelle en place?»
Je me suis éveillé là-dessus, étouffé de rire et toussant comme un malade.
Car malade, c’est ce que je suis. Un rhume, rien d’autre, mais mauvais celui-là comme ça se peut pas. Genre qui garde congestionné solidement. Genre qui ne veut pas sortir. Genre qui vous fait rêver d’un grand débouchage des conduits… Mais comme toujours, il faut en prendre son parti car il faut que ça passe à son rythme. Qui n’est jamais assez rapide pour moi, bien entendu… Si bien que me voici, une fois de plus, à tempêter contre tout et pour rien. Mais on dirait que ça soulage... En tout cas, personne, parmi mes habitués, n’en fait de cas, ce qui laisse penser que mon style est connu, bien connu et pas du tout craint…
Avec tout ça, notre grosse fête arrive à grands pas, grippe ou pas, car c’est après-demain que l’événement aura lieu, qu’il pleuve ou qu’il grêle (ce qui serait vraiment étonnant dans ce pays). Et après, on fera le décompte…
Bon, assez déblatéré, faut que j’aille me moucher… sans crainte de moucher ma chère cervelle, car pour tout vous dire, je ne suis pas pressé d’avoir du «vent dans mon crâne»…
samedi 24 mars 2012
Quand la machine se dérègle
Vous le savez maintenant : cette tribune me convient et je m’y sens à l’aise de vous raconter ce qui retient mon attention. Aujourd’hui, c’est l’état de santé de ma chère compagne, lequel n’est pas vraiment bon. Eh oui, ces choses-là arrivent. Or, tout le monde sait que la santé reste notre bien le plus précieux, pour autant que l’on puisse parler ici d’un bien… Mais que je vous raconte.
Tout a commencé dimanche dernier où, au réveil, elle m’apprend un peu en riant qu’elle est subitement sourde d’une oreille «c’est bien, me dit-elle à la blague, comme ça je n’aurai plus qu’à boucher une seule oreille pour ne pas t’entendre.» Quelle comique, n'est-ce pas... Le cas ne semble présenter rien d’alarmant donc et l’on se dit que la chose rentrera dans l’ordre au cours de la journée. Mais le lendemain lundi, rien n’a changé : elle est toujours aussi sourde. On consulte notre ORL — l’un de nos deux ORL, en fait — qui lui fait passer un audiogramme (lequel confirme l’absence de perception auditive de l’oreille gauche) et qui lui prescrit un glucocorticoïde (prednisone, si vous voulez tout savoir). L’effet est presque immédiat et l’ouïe lui revient progressivement. Mais voilà qu’apparaissent tout à coup des effets secondaires indésirables qui imposent que l’on stoppe immédiatement le traitement. Résultat, retour de la surdité, retour à la case départ, comme on dit. Le médecin rajuste le tir et maintenant, il ne reste plus qu’à attendre.
Mais qu’est-ce donc que cette surdité unilatérale soudaine? Une brève recherche sur le Web apporte toutes les réponses voulues que, bon prince, je partage aujourd’hui avec vous sans frais supplémentaires.
Tout d'abord et ce qui ne laisse pas de surprendre, c'est que tout comme son nom l'indique, l'affection est subite et totalement surprenante, dans le sens : une vraie surprise. Puis, on apprend que ses causes sont aussi multiples que variées — on parle de plus de 100 causes possibles —, mais il semble que la cause infectieuse (virale) soit la plus fréquente (60% des cas, selon ce que j'ai lu), alors faute de mieux et jusqu'à preuve du contraire, va pour l'origine virale. D'où incidemment le traitement au prednisone prescrit par le médecin. Le pronostic n'est pas si dramatique qu'on pourrait le croire : dans un forte proportion des cas, l'ouïe redevient normale après quelques jours ou quelques semaines, alors il est permis d'espérer que tout va rentrer dans l'ordre d'ici peu. Voilà. Vous savez tout. Ou presque. Pour en savoir plus, vous pouvez jeter un coup d’œil sur ce site (en anglais) ou simplement taper "Sudden hearing loss" sur votre moteur de recherche préféré (ixquick pour moi) et vous aurez l'embarras du choix, dont certains articles très fouillés et très techniques, preuve que le sujet captive certains et certaines spécialistes.
Mais le problème ne s'arrête pas à une simple surdité de l'oreille gauche, laquelle serait tolérable sans l'autre mal qui l'accompagne voire en découle : les étourdissements et les bourdonnements. Je ne vous apprends sans doute rien en vous disant que les oreilles — je ne parle pas des pavillons ici —, sont aussi le moteur de l'équilibre, et il semble qu'une oreille qui se ferme aux sons stoppe aussi son mécanisme d'ajustement de l'équilibre et ça se met alors à tourner comme un derviche et non, ce n'est pas la terre. Si bien que la station debout est pénible, voire risquée et comme la plupart des activités s'accomplissent dans cette station, aussi bien dire qu'on est limité. Enfin, le moindre bruit — et Dieu sait s'il y en a ici — produit un bourdonnement cacophonique des plus irritables, je le crois sans preuve. Donc, si vous avez compris quelque chose à mes jérémiades, vous en conclurez que ce n'est pas vraiment une période agréable pour ma pauvre compagne...
Mais bon. Que faire? N'ap swiv, comme on dit ici. Les médicaments sont sa bouée et on ne peut qu'espérer qu'ils seront suffisants pour la maintenir à la surface jusqu'à ce que le vent de la guérison se mette à souffler et la ramène au havre de la santé...
mardi 24 janvier 2012
Les grands départs
Les grands départs, je l’ai déjà dit, sont toujours source de stress. Pour ceux qui les exécutent, bien sûr, mais aussi pour ceux qui restent derrière de même que pour ceux qui attendent en avant. Dans ce cas-ci, nous ne sommes pas les acteurs, mais bien ceux qui restent et qui soupirent de voir cette belle visite lever le camp temporaire qu’ils avaient gentiment établi en nos quartiers haïtiens. Et oui, ça rend triste.
Qu’est-ce que de la belle visite? D’abord, des gens pas compliqués. Des gens qui n’exigent rien et qui sont ouverts aux suggestions. Des gens à la conversation variée et capables de partager leur expérience. Des gens qui aiment et qui savent se faire aimer. Ceux-là nous ont comblés sous tous rapports. Sans jamais se plaindre, ils ont accepté notre rythme de vie, accepté le climat, l’environnement, les gens partout, la cacophonie de la ville et même, ma façon de conduire, bien qu’elle ait été cause de quelques soupirs… Mais je passe. L’essentiel est que ces bonnes gens nous ont permis de vivre deux semaines de presque vacances du seul fait de leur présence. Et nous en sommes bien reconnaissants. Même sous le chaud soleil haïtien, la chaleur humaine a toujours sa place.
Nous voulions leur donner un modeste survol de cette partie du pays que nous habitons et je pense que nous y avons réussi. Certes, il aurait aussi fallu présenter les autres régions, mais compte tenu des distances et de l’état des routes pour couvrir cette distance, nous avons dû nous en abstenir. Une prochaine fois peut-être? Pourquoi pas… Car bien que je prêche souvent pour ma paroisse (le sud du pays), il faut reconnaître que le nord est tout aussi joli et offre même au voyageur une page d’histoire impressionnante sous la forme de la Citadelle, ce château-fort que le roi Christophe - un peu fêlé -, dans un élan d'enthousiasme mégalomaniaque, a fait construire à grands frais… de vies humaines! En tout cas, l’endroit vaut le détour, je vous le garantis. Mais bon, c'est un peu loin... Quant aux plages du nord, elles n’ont pas grand-chose à envier à celles du sud, que je continue de préférer cependant, question justement de préférence personnelle.
Nos visiteurs ont également pu rencontrer certains de ceux, de celles que nous côtoyons ici. Qui sont toutes de fort bonnes personnes, faut-il que je le précise… Somme toute, ils sont venus, ils ont vu, ils ont mieux connu et ils s’en sont allés le cœur content et la mémoire pleine, du moins si on en les croit. Mais quoi qu'il en soit, ce fut bon pour notre moral, je vous le confirme.
Aujourd’hui, c’est le retour à la normale, non sans nostalgie, mais il faut ce qu’il faut n’est-ce pas… Le travail sait attendre, mais sa patience a tout de même des limites, tout le monde sait cela. Alors nous y sommes aujourd’hui avec sinon une énergie accrue, à tout le moins un empressement à faire ce qui était resté en souffrance — mais sans souffrir pour autant — à cause de la visite…! Si bien que les tâches s’exécutent tambour battant, à fond la caisse et la broue dans le toupet!
Tout ça pour vous dire que cette petite parenthèse nous a ragaillardis, enchantés et distraits tout à la fois. Ce n’est tout de même pas rien. En fait, c’est tout à fait appréciable, n'en doutez aucunement!
Et le plus drôle, c’est que ce n’est pas fini, car on en attend encore!...
vendredi 23 septembre 2011
Fin septembre...
Fin septembre... Les feuilles commencent à changer de couleur, comme si elles étaient déjà fatiguées de leur saine verdeur. Certaines, sans doute déprimées par le temps maussade, ont choisi de se laisser choir au sol, sachant très bien que c’est là que leurs semblables finiront, tôt ou tard. Alors quelle différence qu’on décroche un peu plus tôt ou un peu plus tard? Certains oiseaux, prévoyants, sont déjà partis vers le sud; ils savent que le voyage sera long et parsemé d’embûches. Rien à voir avec le nôtre qui, en quatre heures seulement, nous fera passer de ce temps frais tout à fait de saison à cette chaleur tropicale que nous connaissons si bien. Quatre heures seulement… Juste pour aller aux Îles, ces fameuses îles capables de vous virer le cœur à l’envers, il faut compter cinq heures de bateau! Tout est relatif, n’est-ce pas? Mais bon. L’essentiel est qu’on y arrive…
Le temps, parlons-en. S’il est parfois ensoleillé, il est surtout gris avec un ciel bas, «si bas qu’un canal s’est perdu» dirait Brel, et d’une fraîcheur qui laisse penser que le pire reste à venir. Pourtant, je l’avoue, j’aime cette saison. Surtout dans notre milieu forestier, cela va sans dire. J’aime l’odeur de pourriture en forêt et ces champignons tellement gros qu’on risque de «s’enfarger» dedans… Les petits habitants de la forêt, qui sentent ce qui s’en vient et en profitent pour faire leurs dernières provisions préhivernales… Les oiseaux, ceux qui restent, qui sont bien contents que la compétition s’en soit allée et qui se gavent de ces graines de tournesol qu’on leur sert gracieusement… Et les ciels d’automne, tantôt lourds, tantôt habités de petits cumulus qui somnolent paresseusement, mais toujours limpides à cause du temps frais. Une belle saison de transition, l’automne. Une saison de conclusion. Une saison terminale. La nature a accompli son cycle, a donné ce qu’elle avait à donner et se prépare tout doucement à piquer son somme annuel dans le confort douillet de son manteau blanc. Voilà l’automne sous le 48e parallèle. Rien de tout cela sous nos latitudes tropicales…
L’automne, c’est aussi, par définition presque, la saison triste, puisqu’il marque la fin de l’été, des beaux jours, de la baignade et pour plusieurs, des vacances estivales. Triste, le retour en classe; triste, le retour au travail; triste l’inévitable progression vers le froid.
Et cette tristesse est aussi nôtre pour certaines des raisons mentionnées ci-dessus (fin des vacances, retour au travail…) et pour d’autres, plus personnelles. Mais il faut ce qu’il faut, n’est-ce pas? Il faut plier bagages, vidanger la tuyauterie et fermer l’eau, ranger les meubles de parterre, les vélos et le canot. Bref, il faut fermer boutique… jusqu’à la prochaine fois...
Et le réchauffement climatique, là-dedans? Eh bien, s’il passe inaperçu sous les tropiques, j’aurais tendance à dire qu’il est perceptible sous cette latitude plus nordique. Il me semble qu’il ne fait pas si froid que jadis et juste pour vous dire, je connais une certaine personne — que la discrétion m’empêche ici de nommer — qui s’est baignée dans le golfe du Saint-Laurent ce 18 septembre dernier!... Je sais, je sais, ça ne veut rien dire. Mais j’ai comme l’impression au contraire que c’est là un indice de plus que la température est plus douce présentement qu’elle avait coutume de l’être «dans mon jeune temps»…
Mais tant que les feuilles continueront de changer de couleur, l’automne restera l’automne et bain tardif ou pas, l’hiver s’en vient, n’en doutez pas, gens du nord…
dimanche 18 septembre 2011
Le vent du large
J’ai déjà dit que les départs étaient source de stress. Cependant, je n’ai jamais mentionné dans le cadre de cet assemblage de textes qu’ils pouvaient être tristes et douloureux. Et pourtant, c'est ce qui s'est passé avec celui qui nous a fait quitter les Îles de la Madeleine. Pour des raisons que je vous ai exprimées dans mon dernier texte et qui ont trait à la magie de ces îles, bien sûr, mais aussi et surtout pour des motifs personnels que vous connaissez également.
Le but de ce voyage aux Îles, je vous le redis au cas où vous l’auriez oublié, c’était d’abord de renouer avec ma vieille amie et, en second lieu, d’arpenter ces îles dont on dit tant de belles choses. Toutes méritées, soit dit en passant : les îles sont pittoresques, la mer y est omniprésente et les maisons plantées ici et là, au gré de la fantaisie des habitants semble-t-il, accrochent autant de notes colorées dans cet univers paisible. Les habitants, je le redis, ont été à la mesure de leur réputation : hospitaliers, simples et accueillants. La chose s’est trouvée confirmée au Café de la Grave où la propriétaire, la jeune et jolie Sonia, est venue nous saluer et jaser avec nous comme si nous étions déjà de vieux habitués…
Mais le clou de ce bref séjour fut sans contredit les retrouvailles avec ma très chère amie. Vous croyez que quarante ans, c’est long? Eh bien vous vous trompez! Évanouis, les quarante ans d’absence! On se retrouve comme si on s’était quittés la semaine d’avant et le passé se dissipe comme la brume matinale lorsque le soleil monte à l’horizon. Tout se passe au présent (hormis quelques photos qui nous rappellent incontestablement, qu’on le veuille ou non, que le temps a passé) et la famille qui nous accueille nous fait passer des moments inoubliables. Des retrouvailles merveilleuses donc, qui ont donné le ton à cette visite et qui nous ont permis, d’une façon un peu privilégiée, d’apprécier d’autant mieux ce que les Îles ont à offrir. Bref, nous avons été conquis!
J’aurais tort de vouloir tout vous dire : les quelques jours passés sur ces îles perdues au beau milieu de nulle part ont été tout sauf ordinaires et j’aurais trop à faire de vouloir vous en relater les détails. Imaginez-les plutôt. Imaginez la mer, quelquefois d’un calme pictural, quelquefois survoltée; imaginez le décor, tantôt presque désertique, tantôt couvert de conifères; imaginez ces gens, toujours souriants, toujours prêts à commenter la température, le jardin du voisin ou la qualité des fruits de mer… Imaginez et vous saurez tout. De toute façon, aussi bien vous le dire, les Îles se prêtent merveilleusement aux arabesques imaginaires…
Mais le temps passe et arrive le moment de quitter ces lieux magiques, ces gens merveilleux et ma si bonne amie. Ai-je besoin de vous dire qu’on s’en sent triste? On dit que les bonnes choses ont une fin et cette petite, mais ô combien dense partie de nos vacances en pays nordique n’échappe pas à cette pénible règle. Force nous fut donc de rembarquer, nous contentant de voir une dernière fois, depuis le haut pont du navire, les côtes des îles s’estomper dans le vent du large…
Mais franchement les amis, que c’était beau, que c'était bon...
jeudi 15 septembre 2011
D'une île à une autre
Toutes les îles du monde, peu importe leur latitude, leur superficie ou leur relief, partagent une caractéristique géographique commune : elles sont toutes entourées d’eau. Il s’agit d’ailleurs de la définition traditionnelle d’une île, comme nous l’apprenions à la petite école : une terre entourée d’eau. Mais pour le reste, les îles peuvent être aussi distinctes qu’on puisse l’imaginer.
Vous le savez tous et toutes, maintenant : nous vivons sur une île, une grande île que se partagent deux pays. Une île tropicale. Pour nous, donc, rien de plus différent que de visiter une autre île, qui n’a rien de tropical et dont les dimensions restent très modestes et qui, pourtant, étonne par sa grande beauté et la cordialité de ses habitants. Cette île, ou plutôt ces îles, puisqu’il s’agit à proprement parler d’un archipel, sont situées en plein dans le golfe du Saint-Laurent, en haute mer donc, et assez loin du continent (cinq heures de ferry, tout de même...). Pour ceux ou celles qui n’auraient pas encore deviné, je parle, bien sûr des Îles de la Madeleine.
Quel bon vent nous a amenés ici? Le vent des retrouvailles, d’abord, et celui de la curiosité ensuite. Retrouvailles avec cette chère vieille amie dont les pénates, les mânes même ont pris racine en ces lieux mythiques. Quoi de plus naturel que de la visiter dans le milieu auquel elle appartient? A-t-on besoin d’autre justification? Les retrouvailles seules valaient largement le voyage. Mais l’île s’est fait charmante, presque autant que ma douce amie, et nous a conquis par sa géographie particulière et surtout, surtout par la chaleur de ses habitants. Ici, tout le monde parle à tout le monde et les touristes, encore nombreux malgré la saison presque terminée, se fondent à la masse et ne sont jamais laissés pour compte. Et pour cause : leur apport financier n’est certes pas à négliger et ils sont les moteurs de cette industrie dont j’ai parlé la dernière fois : l’industrie touristique. Mais il n'y a pas que l'apport financier : ici, on aime les gens et on l'exprime ouvertement, chaleureusement. Si bien que les touristes aiment «les Îles», comme tout le monde les désigne sans possible confusion avec d’autres îles… Les touristes aiment les Îles, y affluent surtout en haute saison (la saison estivale, vous l’avez compris) et souvent, s’y échouent, comme un bateau sur un haut-fond. Plusieurs sont venus, ont vu et, contrairement à César, ont été vaincu par le charme indéfinissable de ce milieu maritime. Alors ils s’y sont installés à demeure, certains pour contempler inlassablement les couchers de soleil, d’autres pour y gagner leur pitance, mais tous avec ce même sentiment d’avoir trouvé un éden qui, s’il n’est pas celui d’Adam et Ève, présente l’avantage de ne pas cacher de pommiers équivoques… En fait, les seuls pommiers des Îles sont justement situés sur la propriété du compagnon de mon amie, et de ces pommes, il tire deux cidres pas piqués des vers, ce qui est vraiment moins compliqué que la connaissance du bien et du mal, nous serons d'accord...
Toujours est-il que, séduits par les Îles, heureux d’avoir retrouvé ma vieille amie, nous ne pouvons que remercier le ciel qui, comme pour se faire apprécier davantage, a même poussé la clémence jusqu’à nous offrir du temps radieux et doux, doux, doux, tout à fait au diapason de notre humeur...
Sans doute les îles, quelles qu’elles soient, ont-elles toutes une âme à laquelle nous sommes plus ou moins sensibles et réceptifs, mais pour nous, celle d’Haïti et celle des Îles de la Madeleine nous parlent au cœur et nous font nous sentir bien. Juste bien. C’est quand même énorme, vous ne trouvez pas vous autres?
lundi 4 juillet 2011
Réminiscences
Ce qui suit est plus personnel. Mais comme c'est un truc qui me fait grandement plaisir, eh bien je veux partager ce plaisir avec vous.
Vous savez comme le temps passe. J'en parle souvent. On arrête pas le temps, et sa mesure, souvent arbitraire, n'est qu'un constat de son immuable mouvement rectiligne -- à moins que quelque théorie quantique le rende circulaire, ce qui serait bien car on pourrait ainsi remonter le temps. Mais nous n'en sommes pas là. La réalité que nous connaissons est celle du temps qui passe sans relâche et qui ne revient jamais. Si bien que les jours passent, forment des mois et des années dont, en bout de ligne, nous portons le poids. Plus ou moins lourd. Car le premier effet du temps, vous le savez comme moi, c'est l'usure. Le temps use tout, animé aussi bien qu'inanimé, et pour les humains que nous sommes, cette usure s'appelle la vieillesse et, bon, je ne pense pas que j'aie besoin de vous dire ce que ça implique ni ce qui s'ensuit. De toute façon, j'ai déjà déblatéré sur le sujet à l'occasion de mon dernier anniversaire, alors je passe.
Je passe, mais ce que je veux vous dire aujourd'hui s'y accroche, alors vous allez devoir m'endurer.
Tout simplement, j'ai retrouvé, grâce une fois de plus à Facebook, une vieille amie qui m'était très chère jadis et que j'avais perdue de vue depuis près de 40 ans. Je vous ai déjà mentionné combien j'avais apprécié de pouvoir retrouver, malgré l'effet évanescent du temps, des gens qui m'ont été proches à une époque ou à une autre et j'ai maintenant renoué avec ces personnes, même si la base est on ne peut plus superficielle. Qu'importe car elle n'en est pas moins vraie. Mais cette dernière amie remporte la palme. Pendant quelques années, c'était ma meilleure amie. Et attention, langues fourchues : c'était mon AMIE, pas mon flirt ou ma poupée! La retrouver, c'est retrouver la mémoire de ces moments passés ensemble, à parler, à rire, à se promener, à écouter de la musique, à faire des choses ordinaires avec peu d'argent (à l'époque, les étudiants vivaient chichement...), à partager projets et idées, bref, à apprécier notre compagnie mutuelle. Puis, un jour, nos voies se sont séparées, l'une bifurquant à gauche, l'autre à droite et malgré les promesses de garder le contact, celui-ci se perd, le temps fait son œuvre et brouille les cartes. Arrive le moment où les traces de l'autre sont simplement perdues, ensevelies sous des amas de poussière temporelle qui les rend invisibles. Avant, seuls de bons détectives pouvaient retrouver ces traces. Mais aujourd'hui, les moteurs de recherche du Web et les applications comme Facebook changent la donne du tout au tout. Aujourd'hui, il suffit de «googler» n'importe quel nom pour retrouver à tout le moins quelques pistes de ceux ou celles qu'on a laissés derrière. Évidemment, ce sont des traces fragiles. Dans mon cas, par exemple, une recherche Google sur «Richard Duchesne» donne des faux résultats pour les 20 premières pages et sans doute plus! Cela dit, Facebook quant à lui, ouvre des portes inespérées. Incidemment et pour faire une petite parenthèse, je ne sais pas si vous avez vu le film Social Network, mais si ce n'est pas le cas, faites-le car il en vaut la peine. Comme quoi le succès n'est pas toujours affaire de hasard. Fin de la parenthèse. Donc, plusieurs fois j'ai recherché cette chère amie sur Facebook : en vain. Sur Google, j'ai bien obtenu quelques résultats, mais rien pour me confirmer sans l'ombre d'un doute qu'il n'y avait pas d'erreur sur la personne. Surtout que l'activité à laquelle Google l'associait ne correspondait pas du tout à ce que je connaissais d'elle, alors j'ai laissé border... jusqu'à ce qu'une nouvelle recherche Facebook se révèle positive. Tadam!
Retrouver cette vieille amie est pour moi un arc-en-ciel de souvenirs. Le temps nous a séparés, nos vies se sont déroulées selon les enchaînements aléatoires que nous avons rencontrés et nous avons poursuivi nos routes. Aujourd'hui, le passé est derrière. Mais le présent est présent. Et j'y ai retrouvé cette charmante personne. C'est terriblement beau. Vous ne trouvez pas, vous autres?
Comme quoi vieillir a du bon, si c'est pour apprécier de se souvenir.
mardi 30 juin 2009
Charmante visite

Nous recevons parfois la visite de membres de la famille (trop rare, il faut bien le dire) ou d’amis plus ou moins proches et cette visite nous remplit de joie. La durée du séjour varie beaucoup, mais l’essentiel reste que nous puissions accueillir, de temps à autre, nos parents et amis, juste pour le plaisir de partager quelque bons moments ensemble. Laure fait cependant figure d'exception.
Mais qui est Laure?
Laure vient du passé. Un passé qui, contrairement à ce que j’avais pu croire, n’a pas disparu dans les brumes du temps, mais est resté en état d’hibernation jusqu’à ce que—merci Facebook—la connexion soit réactivée. Qui l’eût cru?
Il faut en effet remonter à la période de Deschapelles pour voir apparaître Laure dans notre vie : une jolie petite fille de 9 ans, au cœur triste et à l’intelligence vive. Caractère difficile, il va sans dire, mais pas moins attachant pour autant. Et le temps a passé et on a fini par s'apprivoiser mutuellement. Puis vinrent les tristes circonstances de notre départ en catastrophe et avec ce départ, la séparation d’avec tous ceux, toutes celles qui nous étaient chers, incluant Laure qui avait 13 ans à l'époque.
Sept ans passèrent…
Puis, ayant eu l’idée farfelue de regarder s’il se trouvait sur Facebook quelques vieilles connaissances oubliées, j’ai retrouvé Laure. Lui ai écrit. Elle a répondu. L’ai invitée à venir nous voir. Elle a accepté. Si bien que, en ce jour de notre retour, j’ai revu Laure pour la première fois depuis 7 ans et ma foi, en suis resté bouche bée : la jolie petite fille s’était transformée en jeune fille menue et, je l’avoue bien franchement, fort jolie, c'est le moins qu'on puisse dire et je vous prie de me croire sur parole! Charmante, dites-vous? Encore là, c’est peu dire, mais si charmante signifie capable de charmer, de faire tomber sous un charme, c’est-à-dire d’ensorceler, alors là, oui, nous sommes d’accord, Laure est vraiment charmante!
Laure a surpris tout le monde ici, d’abord par son côté frêle mais qui n’a peur de rien, puis par sa capacité de parler le créole couramment, enfin par son profil discret, éthéré, mystérieux… Évidemment, certains mâles que je ne nommerai pas se sont mis à saliver, mais cette biche n’est pas facile d’approche et ils auront dû se contenter de regarder passer le train…
Mais pour nous, ce fut surtout une belle visite, charmante (l’ai-je dit?), vivifiante, fraîche et fleurie, qui nous a permis de constater que, en dépit du temps passé, les liens sont toujours là et le pont permettant d’enjamber le torrent de la vie pour mieux goûter le parfum de la jeunesse reste tout à fait praticable, même s’il donne un peu le vertige…
Merci Laure! Pour plus que tu penses!
lundi 29 juin 2009
Rebondissement de la balle...

Juin s’achève déjà. Un mois important, puisqu’il marquait, entre autres choses, la cinquantaine de ma douce moitié. Pour la circonstance, nous avions choisi d’aller passer une courte semaine au Québec, mais le destin a bien failli y opposer son veto…
Je ne vous ai jamais parlé de la balle. Pas la balle de ping-pong ou de tennis, mais la balle comme dans «arme à feu». Sept ans plus tôt, lors d’une nuit mémorable en Haïti, on nous avait tiré dessus («on» étant toujours indéfini). Trois coups de feu, trois balles. Sciemment, volontairement, intentionnellement. Presque à bout portant, genre 60-70 cm. Mais la chance, l’ange gardien ou l’intervention divine (au choix), nous avait épargnés. Presque. Car ma douce et tendre moitié avait quand même reçu l’un des trois projectiles dans le dos, lequel s’était logé dans l’os du bassin où il s’était stabilisé. Et comme il semblait vraiment stable, les recommandations médicales s’accordaient pour dire qu’il valait mieux ne rien faire que de passer au bistouri. Ce que nous fîmes. Les années passèrent et jamais la balle ne se manifesta d’une manière incommodante. Jamais, jusqu’à l’anniversaire de cet incident, soit le 16 mai dernier. Jour pour jour, pratiquement, sept ans plus tard, ma compagne s’est mise à avoir mal à "sa" balle. Et pas rien qu’un peu. Très vite, nous avons conclu que balle comprimait le nerf sciatique et qu’il n’y avait pas vraiment de solution temporaire, comme l’a d’ailleurs confirmé le médecin cubain qu’elle a consulté. Il faut donc retirer la balle. Mais nous sommes censés quitter le pays dans quelques jours, ne l’oublions pas...
Tout de même, l’intensité de la douleur ne nous donne pas le choix : le vendredi, Chantal s’envole pour la capitale où elle revoit le même médecin qui l’avait opérée l’année dernière (voir Se faire soigner en Haïti). En moins de deux, toute l’équipe médicale est en place et la balle est finalement retirée, non sans mal cependant. Mais pas pour la patiente. La balle extraite, le mal s’estompe. Le lendemain, elle est de retour au bercail (pas la balle!) et trois jours plus tard, nous nous envolons vers les cieux nordiques. Seuls quelques tiraillements viendront tempérer l’ardeur quinquagénaire de ma douce amie… (photos de la balle en dedans et au dehors, pour les sceptiques...)
La fête familiale fut une réussite totale, en grosse partie grâce à la clémence du temps. Habitués à la régularité de notre climat tropical, nous en oublions parfois les caprices de la météo nordique qui vous font passer d’une extrême à l’autre parfois en moins de 24 heures…
Quelques jours plus tard, une fois évanouies les vapeurs de la fête, nous reprenons l’avion pour retrouver nos pénates habituels, non sans nous adjoindre la charmante compagnie d’une petite chérie dont je vous parle ultérieurement, car elle mérite qu’on s’y attarde quelque peu…
samedi 21 juin 2008
Se faire soigner en Haïti
Je pose la question en tant que blanc, étranger, sorti tout droit d’un pays industrialisé, développé, dont la qualité du système de santé n’est plus à démontrer. Nous gérons un hôpital, soit; la qualité des soins que nous prodiguons est indéniable, soit; mais se compare-t-elle à celle que l’on peut avoir au Canada en général, au Québec en particulier?
Ce n’est pourtant pas pour tester la chose que ma digne compagne a pris la décision d’aller se faire charcuter à Port-au-Prince. Le système de santé de notre pays d’origine est excellent, point de doute sur la chose, mais il a aussi ses failles, dont les interminables délais avant d’obtenir le service requis. Surtout si le service en question n’est pas considéré urgent… Or, comme nous ne passons au Québec que de brefs instants que l’on veut de vacances, il faut bien admettre que l’entreprise visant à subir une chirurgie non urgente devient pour le moins hypothétique. Dès lors, la question se pose : peut-on obtenir une qualité de soins adéquate dans ce pays difficile qu’est Haïti, où les moyens sont limités?
L’opération chirurgicale, puisqu’il s’agit bien de cela, est routinière, même si elle est n’est pas mineure : hystérectomie totale. Le fibrome qui rend l’opération plus que souhaitable, mesure plus de 15 cm de diamètre à la sonographie et mérite donc qu’on s’y attarde. Sans doute moins impressionnant que la photo ci-dessus, mais quand même… (En passant, la photo représente vraiment un fibrome retiré du ventre d'une jeune haïtienne enceinte alors que nous étions à Fond des Blancs...)
Sur les conseils de notre médecin anesthésiste, l’opération se déroulera à l’hôpital Canapé-Vert, bien connu et bien réputé. Chambre privée climatisée et immaculée, soins attentifs, personnel compétent et dévoué, rien ne manque à l’appel. Serait-on ailleurs qu’en Haïti? Non. Car pour peu que les moyens le permettent, Haïti peut offrir la qualité, comme n’importe où ailleurs, je pense.
L’opération se passera bien. Plus longue que prévu, car le fibrome est plus massif et plus teigneux qu’on le croyait, mais la patience et l’habileté du chirurgien en viendront finalement à bout. Reste maintenant à vivre l’après. La convalescence... Or, comme cette opération conduit à une forme de ménopause rapide et radicale, «l’après» risque de nous donner quelques sueurs, tantôt chaudes, tantôt froides, comme toute ménopause qui se respecte. Mais cela, je pense que l’on apprendra à vivre avec. Surtout que les sueurs froides, dans ce pays, seront certainement les bienvenues…
L’essentiel est que le problème (en était-ce seulement un?) soit réglé. Certes la souffrance physique et financière qui l’accompagne ne rend certainement pas le remède attrayant, mais vu l’ampleur du mal, il faut un remède de cheval…
Somme toute, une expérience concluante. Haïti s’est révélée à la hauteur. La convalescence va se faire au rythme de toute convalescence et la vie au sud va reprendre son cours habituel… Fin du chapitre. Mais le livre de la vie au sud en comporte encore plusieurs non écrits, alors restez à l’écoute ou plutôt, en contact cyberspatial!
jeudi 13 mars 2008
Comment en sommes-nous venus là?
Après le pourquoi — lequel est resté bien vague, je le concède volontiers — voici le comment. Car reconnaissons-le, il a bien fallu que des choses s’enclenchent pour que nous aboutissions en Haïti. Nous étions peinards, bien au chaud dans notre petite «cabane au Canada», les choses marchaient plutôt bien pour nous et tout à coup, vlan! Haïti nous voilà!
Il aura suffi d’une petite annonce dans Le Soleil, d’un coup de téléphone à Sarasota en Floride et d’une simple conversation pour que le processus se mette en place. Et en quatrième vitesse! Même notre chienne sentait toute l’effervescence des préparatifs; elle qui appréciait tant la chaleur du poêle à bois! Elle ne savait pas ce qui l’attendait, la pauvre… Ni nous non plus d’ailleurs, il faut bien le dire…
En fait, il aura fallu bien plus que les éléments ci-dessus énumérés. La petite annonce? D’accord, mais par quel hasard l’avons-nous lue? (on ne lit jamais les petites annonces!) Le coup de téléphone? Aisé, mais pas suffisant pour que les suites s’enclenchent… La conversation? Déterminante, certes, mais sur une base des plus floues. Non vraiment, pour que les choses s’emboîtent et qu’on aboutisse en Haïti, il aura fallu des convergences de forces, l’effet d’un puissant hasard, un alignement stellaire peu ordinaire ou simplement, comme les Haïtiens s’entendent pour le dire, la volonté divine. Car pour eux, pas de doute : Bondye konnen. À quoi bon s’en faire quand on a le «Grand Architecte» qui suit la construction de près? En tout cas, volonté divine ou hasard, cela a marché, puisque malgré les déceptions du début et le stress de notre nouvelle vie, nous avons y pris goût. Et c’est ainsi qu’un contrat initial de 9 mois s’est allongé d’un an, pour ensuite se transformer en engagement de 5 ans, interrompu pour raisons majeures. J’y reviendrai un de ces quatre…
Alors voilà un peu comment nous en sommes arrivés là. Et de fil en aiguille, d’employeur en employeur, nous avons échoué dans cette charmante ville du sud : Les Cayes, où nous sommes présentement jusqu’à ce que la roue nous entraîne quelque part ailleurs — mais pas trop loin quand même… Car le sud est vraiment pittoresque et ses gens, insouciants. Rares sont les gens ici qui marchent vite, même physiquement parlant! En conséquence, le travail se fait, des choses s’accomplissent, mais pas vite, ce qui nous impose à nous, de prendre un rythme un peu plus lent… La patience ici va bien au-delà de la vertu : c’est un mode de vie intégral et pas si facile à adopter qu’on pourrait le penser à prime abord, surtout pour certains, certaines…
Mais à la longue, «peu z’à peu» comme on dit ici (et ne me demandez surtout pas pourquoi la liaison en z), on développe une tolérance envers ce qui ne marche pas vite, une acceptation que les choses n’ont peut-être pas forcément à fonctionner à plein régime comme elles le font dans nos pays industrialisés. Et si c’était ça qui nous avait finalement séduits? En tout cas, nous avons été eus, comme dirait l’autre… Pour le meilleur et pour le pire, comme dans tout bon mariage!
mercredi 12 mars 2008
Pourquoi Haïti?
D’emblée, je suis tenté de vous dire : «Pourquoi pas Haïti?» Après tout, Haïti, c’est encore l’Amérique du Nord — ou presque — donc facilement et rapidement accessible, à tout le moins depuis Montréal, puisqu’un vol direct nous y mène en tout juste 4 heures. Vous me direz que ce n’est certainement pas une raison valable et vous aurez sans doute raison. Mais disons que c’est tout de même un facteur positif. Car je vous le demande : qui a, de nos jours, le goût de se taper un 12-13 heures d’avion en ligne, sans compter les correspondances, les transits et tout le tralala? Et je ne vous parle pas des mesures de sécurité! Alors pour moi, un petit voyage de quatre heures qui me transporte directement du froid (ou de la grisaille, c’est selon) à la béatitude tropicale, ça me va.
Mais avec ça, je ne vous dis pas la vraie raison de notre adoption de ce pays. Y’en a-t-il seulement une? Venus un peu par hasard en 1998 (quand je vous dis que ça fait dix ans déjà…), nous avons collé, comme de la visite un peu épaisse... Mais c’est que, à la différence de bien des hôtes quelquefois pas trop délicats, Haïti nous a ouverts ses bras chauds et nous a fait sentir qu’on ne dérangeait pas du tout, bien au contraire. Alors on a collé. Et les semaines ont passé, sont devenues des mois qui se sont changés en années, jusqu’à la cassure, nette et presque tragique, en tout cas pour nous.
Quelle cassure? Oh là! pas trop vite!… On va déraper. Pour ceux et celles que ça intéresse et qui ne savent pas encore, je vous raconterai une autre fois. Pour l’heure, j’en suis à tenter de vous expliquer pourquoi nous avons abouti dans ce pays, alors ne digressons pas.
Donc, le pays fascine, le pays saisit, le pays envoûte. Et pas à cause du vaudou, qu’on se le dise! Le vaudou existe bel et bien et sa couleur locale est assez chamarrée, mais comme en bout de ligne, on n’y comprend pas grand-chose, eh bien on ne peut pas dire que les forces occultes exercent une influence sur nous. Non, ce qui envoûte en Haïti, c’est Haïti! En d’autres termes, c’est l’ensemble des parties. Mais le fait est que nous avons trouvé dans ce pays des façons d’être, d’exister qui nous conviennent. Car le cœur d’Haïti, ce n’est pas sa géographie ou son climat tropical, mais c’est son peuple. Et c’est à travers le peuple que nous avons apprivoisé le pays.
Ce ne fut pas toujours facile. Ce ne l’est toujours pas. Mais qui a dit que ce devait l’être? Le fait est que nous nous sentons suffisamment confortables dans le pays pour en être efficaces. Certes, l’efficacité n’est pas tout, mais alliée au plaisir bien réel de vivre sous les tropiques, elle suffit à justifier notre présence. Mais entre nous, a-t-on vraiment besoin de se justifier?
Pourquoi Haïti? Pourquoi pas, si ce que l’on veut c’est vivre ailleurs, se frotter à une autre réalité, côtoyer des gens différents qui parlent une langue pas toujours facile à suivre, se tailler une place au soleil — pardon! je veux dire à l’ombre!...
S'abonner à :
Messages (Atom)