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dimanche 7 avril 2013

Et la vie poursuit son cours


Me revoici un peu mieux disposé. Je vous remercie de votre support et de votre compréhension. La mort est un sujet grave et triste qu’il n’est jamais plaisant d’évoquer. Mais, comme dirait Galilée : «Et pourtant, elle tourne...» («E pur si muove!»). Qu’on soit en déni absolu n’enlève rien au fait : la mort existe, elle rôde et nous attend toujours…

Ce qui ne doit pas nous empêcher de vivre, bien au contraire. Et je puis vous assurer que, sous ce chapitre, le foisonnement de vie aux alentours ne laisse aucun doute sur la force de cette énergie et franchement, je trouve ça rassurant même si, dans un pays comme Haïti, ce foisonnement est un peu excessif et continue de créer des problèmes pour lesquels le pays n’a pas de solution immédiate — aussi bien dire qu’il n’a pas de solution du tout. Car les Haïtiens veulent des solutions miracles, immédiates et absolues, sans quoi c’est le gouvernement qui est à blâmer et il faut s’en défaire au plus vite. C’est là, en partie, la pérennité du drame haïtien : l’impatience des citoyens envers leurs élus.

Ainsi en est-il du système routier de la capitale. J’en ai parlé récemment, mais en lisant cet article, je m’aperçois que je ne suis pas le seul à décrier la situation actuelle comme invivable. Le fait qu’il y ait des plans pour que des voies rapides soient mises en place dans la capitale est rassurant, mais les difficultés pour en arriver là seront titanesques, n’en doutez pas. Car Port-au-Prince ne se laisse pas conquérir aisément, fût-ce par des constructeurs bien intentionnés.

Mais pour l’heure, regardez-moi cette photo (ci-dessus) et dites-moi que ce n’est pas génial… De belles autoroutes, avec échangeurs standards, rien pour réinventer la roue, mais certainement de quoi réduire les problèmes de circulation automobile, vous ne pensez pas? «Bien évidemment», me direz-vous. Et vous aurez raison, à tout le moins sur le papier… Car pour moi, la photo n’est pas la réalité, beaucoup s’en faut et encore une fois, il y a une distance astronomique entre la coupe et les lèvres capables d’apprécier ce que la coupe promet… Pour moi, quand je vois la photo, j’imagine les camions en panne en pleine bretelle de sortie, les marchandes installées tout au long de la route, les motos qui se faufilent à vive allure entre les rangées de voitures, bref, j’imagine le chaos. En d’autres termes, les problèmes de Port-au-Prince ne tiennent pas qu’à l’inadéquation des infrastructures routières, mais aussi, beaucoup, au problème humain et pas seulement en vertu du nombre de gens qui peuplent la capitale mais bien à cause de leur anarchisme naturel. Obéir aux consignes en ce pays reste optionnel dans le meilleur des cas, ne l'oublions pas…

Et puis à quoi serviront les meilleures autoroutes du monde si, à peine sortis de la capitale, l’on continue de se heurter à un barrage routier impromptu et infranchissable, où des gens, mauvais, protestent, à tort ou à raison, emmerdant ce faisant le pauvre automobiliste qui ne veut que circuler sur ce qui tient lieu de route nationale?
«La route nationale numéro 2, à hauteur de Chalon, a été bloquée pour une énième fois tôt vendredi par des individus qui réclament le départ du commissaire du gouvernement [...]. Selon ce dernier, les principaux protestataires, qui sont désormais recherchés par la justice, constituent un réseau mafieux composé de notaires, d'avocats, entre autres, qui s'adonnent à l'expropriation des paysans de leurs terres.» (Le Nouvelliste)
« Y'a des fois, je mettrais le feu dans tout ça, comme je l’ai fait à Sodome; ou je ferais le coup de la marée comme je l'ai fait à Noé… » (J. P. Ferland, God is an American)

mardi 18 décembre 2012

Une affaire de toilette

Non, je ne parlerai pas de la tuerie américaine. Ni de sa version chinoise — au couteau, pensez-y bien — car tout le monde en frissonne encore et bon, ces choses-là arrivent, comme on le dit souvent pour meubler le silence gênant. Car à la vérité, que dire?... Alors je passe.

Je choisis plutôt de vous parler d’un petit projet que nous avons présentement en chantier à notre petit hôpital. À un petit hôpital, les petits projets conviennent, vous ne trouvez pas? C’est un projet qui me trotte en tête depuis bientôt six ans et que j’ai sans cesse remis à une date ultérieure, non pas parce que c’était un mauvais projet, mais plutôt parce que je n’étais pas convaincu de la solution envisagée. Le projet? Remplacer nos latrines actuelles par des toilettes. Comme vous le voyez, rien pour en faire tout un plat, mais assez pour en faire quelques hors-d’œuvre.

Faut vous dire d’abord que nos latrines m’ont toujours fait honte. Sales, mal conçues et mal entretenues, sources d'odeurs vertigineuses, elles ne peuvent accommoder que ceux ou celles qui sont vraiment à l’extrême limite de leur retenue. Exiger que les gens y aillent plutôt que de faire leur pipi à l’air libre tient presque de la torture mentale, surtout lorsqu’il s’agit de personnes âgées. Problème donc, que j’ai souvent voulu résoudre mais dont la solution m’échappait. Fallait-il simplement les refaire? L’idée avait un certain mérite, car sa réalisation promettait d’être rapide et peu coûteuse. Mais qu’est-ce qui empêcherait ces nouvelles latrines de devenir semblables à celles qu’elles remplaceraient? Rien. Je rejetai donc l’idée en faveur de toilettes à la turque, communément appelées «toilettes à pédales», ces modèles si populaires en Europe il n’y a guère et qui le sont toujours d’ailleurs dans certains petits endroits. Et en Turquie, bien sûr... Quand on sait où poser les pieds et qu’on prend le temps de sortir du bassin avant de tirer la chasse d’eau, ces toilettes sont merveilleuses d’efficacité et, de surcroît, très hygiéniques puisque aucune partie du corps ne touche les surfaces. Évidemment, il faut pouvoir s’accroupir, ce qui peut causer problème dans nos pays nordiques, mais jamais ici en Haïti. Si bien que j’estimais — et j'estime toujours — l’idée bonne, mais faute de moyens techniques, je l’ai mise de côté pour finalement aboutir à ce que vous connaissez tous et toutes, la toilette standard. Qui, pour plusieurs raisons, est loin d'être idéale, mais on verra bien...

Nous n'en sommes qu'à la première partie du projet, laquelle consiste à aménager une fosse septique apte à recevoir ce qu’on lui destine. Évidemment, les avis diffèrent quant à la taille de la fosse et les détails de sa construction. C’est finalement Internet qui aura eu gain de cause grâce à un petit schéma tout ce qu’il a de simple qui permet de visualiser comment cela doit fonctionner. Là encore, ce n’est qu’après quelques mois d’usage qu’on pourra voir si ça marche convenablement. Pour les puristes, je dirai simplement que l’endroit où nous avons creusé cette fosse n’aurait jamais passé le test de percolation si nécessaire en nos pays…Mais bon. On verra, je le redis.

C’est un projet que je comptais bien terminer avant la fin de l’année, mais comme c’est parti, je pense qu’il empiètera hardiment sur 2013… Mais l’essentiel est que ce soit fait, n’est-ce pas?

À suivre...

mercredi 26 septembre 2012

Problèmes de la rentrée


Certains ont vu dans mon dernier texte une pointe d’amertume qui n’est pas coutumière en ces lieux d’écriture. Je ne le nie pas. Le retour, cette fois, n’a pas été facile, pour des tas de raisons dont celles que j’ai mentionnées à cette occasion (les plus importantes). Depuis, le travail quotidien a repris toute la place qu’il occupe naturellement et on ne s’en plaint nullement. Sauf que…

Sauf qu’il faut maintenant préparer la Fête. Notez bien la majuscule, car il ne s’agit pas de n’importe quelle fête, mais bien celle de notre vénérable institution qui, cette année, souffle ses 30 bougies. Ce qui n’est quand même pas rien, nous serons d'accord. Alors on fera une petite célébration pour souligner la chose et c’est précisément la préparation de cette célébration qui demande une tête bien rangée… Or, vous connaissez la mienne ou, à tout le moins, vous en subodorez les méandres labyrinthiques. En termes clairs, ça me stresse! Mais comme on dit par ici, n’ap degaje… Et ne vous en faites pas, je vous reviendrai là-dessus lorsque les temps en seront mûrs, ce qui ne saurait tarder…

Pour l’instant, nous nous activons à régler les petits problèmes qui, comme vous le savez maintenant depuis un bon moment, surgissent et se multiplient ici comme tout ce qui pousse sous les tropiques : vite. Et comme si ce n’était pas assez, il faut encore composer avec le drame de l’augmentation du coût de la vie, lequel a connu une réelle explosion vers le haut depuis notre absence. La nourriture, les denrées de première importance, le carburant, l'électricité, les matériaux, tout a monté, au point que plusieurs de nos employés qui arrivaient tant bien que mal à boucler le mois n’y arrivent plus. Surtout qu’en cette fin de mois, il faut maintenant payer l’école (qui débute ce prochain lundi), ce qui, pour plusieurs, représente une dépense simplement insurmontable. Hier encore, l’une de nos auxiliaires me disait que les frais d’écolage pour sa plus grande fille se montent à près de $500 US et cette somme n’inclut ni les livres, ni les fournitures scolaires, ni l’uniforme et les chaussures réglementaires. Or, nos auxiliaires touchent $250 le mois… Je vous laisse faire le calcul… et n’oubliez pas qu’il ne s’agit pas que d’un seul enfant, mais souvent trois ou quatre — dans le cas de la dame citée ici, on parle de cinq enfants d’âge scolaire! Quand je pose la question : «Mais comment allez-vous faire?» Certains me répondent, le plus sérieusement du monde, qu’ils vont se priver de manger pendant quelques jours et puis voilà… Et le pire les amis, le pire, c’est que c’est sans doute vrai.

Dès lors, on ne se surprendra pas d’apprendre que le peuple jette le blâme de cette flambée des prix sur le gouvernement, le président en tête… La lune de miel de Martelly est clairement terminée et les mêmes qui ne juraient que par lui sont maintenant prêts à tirer sur lui à boulets rouges. Car à quoi sert un gouvernement sinon à jouer les boucs émissaires? Alors un peu partout au pays, des manifestations éclatent pour protester contre la cherté de la vie, comme si le gouvernement pouvait, d’un coup de baguette magique, retirer du pied populaire la douloureuse épine qui le fait claudiquer et rendre ainsi tout le monde content. Ce serait trop beau, n’est-ce pas… Eh bien certains y croient toujours, à ce miracle…

Mais tout cela fait partie de ce quotidien haïtien où rien n’est jamais facile, rien n’est jamais acquis d’avance, mais un quotidien où l’on continue tout de même de sourire et de vivre dans une bonne humeur incompréhensible, en tout cas pour moi.

mardi 10 juillet 2012

Un autre problème


Le problème dont je vous entretiens aujourd’hui est nettement plus sérieux que celui consistant à identifier la bête qui fait «tac tac tac tac tac tac» (toujours une énigme, soit dit en passant). Car il s’agit d’un problème qui croît, qui s’amplifie et qui peut rapidement devenir hors de contrôle. Il s’agit de la pollution — problème universel s'il en est un — et plus spécifiquement et en référence à l’article du Nouvelliste de jeudi dernier, la prolifération des contenants de polystyrène (mieux connu sous le nom de styrofoam), lesquels sont utilisés à toutes les sauces, mais surtout comme contenants à repas. Cette pratique est relativement nouvelle et, pour plusieurs Haïtiens, moderne et progressive. C'est que le produit s’achète pour pas cher et plaît, en grosse partie parce que c’est un produit pratique, propre et, je le crois, à la mode du jour. Mais les plus avertis savent combien il est difficile de s'en débarrasser après usage et combien, de ce fait, il devient une source majeure de pollution sous plusieurs formes : visuelle, spatiale, environnementale, sans oublier le haut degré de toxicité du produit lorsqu’on le brûle et l’odeur pestilentielle qu’il dégage. Et je parle d'expérience. De toute façon, je ne vous apprends rien là que vous ne savez déjà.

Les usages du polystyrène sont multiples et variés — qu’on pense notamment aux propriétés isolantes du produit, très populaire entre autres dans les sous-sols des maisons modernes nordiques — mais son imputrescibilité, fort appréciable dans un contexte où l’on cherche la durabilité, devient un réel problème dans une utilisation ponctuelle et temporaire, comme c’est le cas pour les contenants à nourriture. Certains, parmi les plus gros utilisateurs de ces contenants, les ont bannis radicalement, justement pour des raisons environnementales et les ont remplacés par des simples contenants de carton, moins isolants certes, mais beaucoup plus aisément biodégradables. C’est le cas de McDonald, à qui on prête bien des défauts, mais qui a certainement vu le problème et s’y est attaqué avant de se le faire dire.

Haïti est fragile. Comme toutes les îles tropicales, sans doute, mais encore plus quand on pense à la densité de sa population. Car on a beau dire, mais l’humain, de sa seule présence, pollue. Emplit l’espace de ses déchets, des sous-produits de sa consommation. Et cela va des déchets organiques jusqu’aux industriels, dont la simple masse devient souvent le problème. C’est précisément ce qui se passe avec les contenants de polystyrène : leur nombre est tel que la masse en est énorme et de ce seul fait, difficile à gérer. Or, vous savez comme moi que ce produit, ou plus justement, ce sous-produit du pétrole est pratiquement indestructible,  sauf par le feu — et alors, ce qui se retrouve dans la haute atmosphère n’est pas joli joli — ou, si on l’enterre, s’avère d’une longévité atroce. Sur une île aux écosystèmes fragiles, c’est une catastrophe. Or, si plusieurs Haïtiens et Haïtiennes sont tout à fait capables de mesurer les impacts écologiques de cette pratique, la grande majorité des utilisateurs n’en ont rien à branler, de sorte qu’il ne sera pas facile de sensibiliser les gens à restreindre l’usage de ces contenants. Seule solution, les interdire, simplement, et leur préférer un contenant de carton.

Tout ça pour vous dire que la préoccupation ministérielle est là et que le premier ministre a, de fait, promis de s’attaquer au problème, voire de le résoudre. Une promesse qui me paraît difficile à tenir dans les circonstances, puisque, je le redis, ces contenants sont très populaires à l’heure actuelle et il me semble improbable qu’ils seront délaissés simplement parce qu’ils sont déclarés non écologiques… Mais de l’autre côté, il faut bien commencer quelque part et si le gouvernement voit le problème, il me semble que c’est déjà un pas dans la bonne direction. Le reste n’est qu’affaire de temps…

Sauf que pendant ce temps, le problème s’enfle…

samedi 30 juin 2012

L'approche problème


Je vous ai souvent dit que le gros de notre travail consistait à gérer les problèmes. Soit de façon purement réactive (le problème se présente, on y fait face et on lui cherche une éventuelle solution), soit de façon proactive — on anticipe le problème et on envisage quelques solutions possibles. Mais celui qui nous est tombé dessus lundi dernier n’était pas vraiment prévisible et il a donc fallu s’y ajuster tant bien que mal.

Rassurez-vous, il ne s’agit nullement d’un problème crucial : tout simplement, l’un de nos compteurs électriques a surchargé, le feu a pris dans la ligne et nous avons subi une brève mais hautement dommageable surcharge. Tout de même, nous avons été chanceux dans notre malchance. Quelques appareils électriques (notre micro-ondes, un refroidisseur d’eau, une télévision…) en sont morts, mais rien de majeur et quelques heures plus tard, tout était revenu à la normale, ou presque.

Presque, parce que le routeur de notre système Internet n’a pas apprécié la surcharge et, bien que semblant toujours fonctionnel, visuellement (les 'tites lumières clignotaient toujours normalement), refusait systématiquement de nous connecter à la Toile. C’était ça, mon problème. Mais avant que je mette le doigt dessus, j’ai passé quelque temps à me remuer les méninges… Cependant, comme, en bon gestionnaire proactif, j’avais un routeur de rechange, une fois le problème circonscrit, le résoudre fut affaire de pas grand-chose : quelques paramètres à redéfinir et le tour fut joué. Sauf que…

Sauf que l’autre bidule que nous utilisons beaucoup ici, c’est un point d’accès sans fil (Wireless Access Point pour les bilingues) dont l’adresse IP se confond avec celle du nouveau routeur, entraînant de ce fait un conflit d’adresse dont le routeur est sorti vainqueur. Bref et si vous me suivez toujours, régler un problème en a engendré un autre, pas dramatique ici non plus, mais pas moins agaçant pour autant. Mais n’écoutant que mon courage et mon opiniâtreté, je me jetai dans les eaux troubles de la configuration réseautique et, en quelques heures, trouvai la solution. Et si vous croyez que le problème n’est pas digne de mention, c’est que vous ne vous y êtes pas frottés, car l’exercice demande patience et, je le redis, obstination. Mais il se résout et pour moi comme pour tous nos usagers de l’Internet ici, seul cette conclusion compte.

Il n’empêche que cet exemple vous illustre bien ce que je vous ai déjà mentionné, à savoir que «Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois». Je ne connais pas grand-chose en informatique, encore moins en systèmes et en réseaux, mais faute d’avoir sous la main un spécialiste, j’en mets le couvre-chef, quelquefois avec succès, souvent pour rien, mais sans jamais craindre de me buter sur le mur de ma propre incompétence. Car il faut toujours s’essayer avant de s’avouer vaincu, c'est ce que ma mère me répétait tout le temps...

Il reste que le problème électrique à la source de mes petits problèmes informatiques n’est toujours pas résolu, lui, et même si on se promet bien de lui apporter une solution plus fiable et plus permanente, ce n’est pas encore fait. Pour plusieurs raisons, dont l’impossibilité de trouver la pièce d’équipement — un coupe-circuit, si vous voulez tout savoir — dont nous avons besoin pour nous assurer un minimum de protection contre la surcharge. Mais nous sommes sur la bonne voie… En fait, je pense que nous sommes forcément sur la bonne voie pour la simple raison que je n’en connais pas d’autre…


samedi 21 avril 2012

Le Jour de la Terre


Le Jour de la Terre. Ça n’existait pas «dans mon temps». La terre existait pourtant, n’en doutez pas, vous les drôles qui voulez me faire remonter au déluge ou avant. Ce que je veux dire, c’est que célébrer l’existence de la terre, on ne faisait pas ça. Et pourquoi l’aurait-on fait? Pourquoi célébrer la terre plus que la grandeur de notre univers, par exemple? C’est qu’à l’époque, la terre était une évidence, un exemple de pérennité. Après tout, n'avait-elle pas au moins 4 milliards d'années? Et n'était-elle pas encore là pour un autre 4 milliards d'années à quelques millions près? Alors pourquoi s'en faire? Aujourd’hui, le discours a changé. Aujourd’hui, on sait la fragilité de notre grand vaisseau sidéral et on veut qu’il dure, pas seulement pour nous dont la durée de vie est forcément limitée, mais aussi pour les générations futures, celles qui existeront possiblement dans cent mille ans et plus. Possiblement. Ce futur existera-t-il? Pourra-t-il seulement exister? Maintenant, on le sait, rien n’est moins sûr, d’où justement la nécessité de s’arrêter un peu sur la valeur du navire : tiendra-t-il le coup? Car le futur, c'est d'abord et inévitablement celui de la planète.

On parlait jadis de cinq grandes formes de pollution qui sévissaient sur la terre, spécifiquement dans nos pays industrialisés : pollution de l’air, de l’eau, de l’espace, de la nourriture et pollution par le bruit. De nos jours, on se contente de parler de la pollution de l'air, de l'eau et du sol comme étant celles les plus susceptibles d'altérer les conditions de vie planétaires. Or, toutes ces formes de pollution se sont développées sensiblement au cours des dernières années, et ce, malgré tous les efforts accomplis pour contrer la tendance. Car nous nous en allons vers une planète de plus en plus polluée, il faut bien le dire, et ce ne sont pas les bêtes ou les plantes qui en sont les responsables. (En passant, je trouve intéressant de noter que pollution est un mot d'origine religieuse...)

Ainsi le réchauffement. Tout le monde en parle et personne, ou à peu près personne, n'ose maintenant en contester la réalité : les activités humaines sont en grande partie responsables de ce réchauffement qui, quoiqu'on en dise, menace l'équilibre de notre écosystème. L'humain, encore...

Il semble que la main humaine tienne la planète en étau.

On dit que la conscience planétaire s’aiguise et que le sens d’une responsabilité partagée par toutes les nations se développe. Je n’en crois rien. Je pense au contraire que l’appât du gain continue d’être à la source des choix de société. Tout le monde veut plus, tout le monde veut la richesse et l’image qui l’accompagne. Pour la planète, on verra après.

Et pendant ce temps, la terre se peuple chaque jour un peu plus. Nous sommes présentement plus de 7 milliards. On nous dit que l’expansion démographique devrait stopper autour des 9 milliards. Permettez-moi d'être sceptique... Trop de facteurs entrent en ligne de compte et je pense qu'il faudra attendre 2050 pour voir. (Je parle aux jeunes, bien entendu...) Et pendant ce temps, les optimistes aiment croire que les ressources vont s’accroître, que les riches vont partager leur richesse avec les pauvres et que tout le monde va faire sa part pour une planète plus saine. Et le Père Noël, monté sur ses grands rennes, va venir faire une distribution spéciale de iPad le 25 juillet prochain… Tant qu’à y être…

Des fois, je me demande si nous n’en sommes pas à cette fameuse réplique mise dans la bouche de l’agent Smith dans le film Matrix (le premier, le meilleur) : 
"I'd like to share a revelation I've had during my time here. It came to me when I tried to classify your species. I realized that you're not actually mammals. Every mammal on this planet instinctively develops a natural equilibrium with their surrounding environment, but you humans do not. You move to an area, and you multiply, and you multiply, until every natural resource is consumed. The only way you can survive is to spread to another area. There is another organism on this planet that follows the same pattern. Do you know what it is? A virus. Human beings are a disease, a cancer of this planet. You are a plague, and we … are the cure."
Et si c’était ça le véritable drame?...

mercredi 1 février 2012

Pisse partout


Parti janvier! Pfft! Évanoui dans le passé récent, mais passé tout de même. On savait que ce serait comme ça — la visite nous fait cet effet-là, d’accélérer la perception du temps qui passe — mais tout de même, le mois a vraiment passé vite. Et aujourd’hui, premier jour de février, nous savons que ce mois passera aussi à la vitesse grand V : visite de mon frère, carnaval et visite des patrons, tout ça à la queue-leu-leu, alors c’est vous dire…

Les plus perspicaces auront remarqué combien le passage du temps me fascine et retient mon attention. Je ne m’en sens nullement coupable. J’aime le temps qui passe. J’aime le temps qui se passe bien, genre en bonne compagnie à partager une bonne bouteille ou une conversation intelligente ou les deux à la fois (bien que, disant cela, j’aie noté qu’à la troisième bonne bouteille, parfois même avant, la conversation devient nettement moins intelligente…). Alors oui, je vous en fais mention. Si vous n’appréciez pas, vous pouvez toujours aller voir ailleurs, là où je ne suis pas. Du moins pas encore…

Mais trêve de balivernes. Le sujet du jour est sérieux : l’urine. Non, ce n’est pas une blague. En fait, je puis même vous dire qu’il faut y voir une preuve de plus que le pays progresse dans la bonne direction. C’est d’abord l’article paru sur Haiti Press Network qui a piqué ma curiosité. Or, l’article dépeint une réalité qui s’étend à tout le pays et qui ne lui donne pas tellement bonne presse, disons... Car s’il peut être relativement acceptable d’uriner derrière un arbre à la campagne, le faire contre le pneu d’une voiture garée en pleine ville me semble un peu excessif et, reconnaissons-le, déplacé. Et notez bien que cela vaut autant pour les hommes que pour les femmes, dont la discrétion reste admirable mais qui ne s'en privent pas moins de soulager leur vessie à peu près n’importe où. Certes, on me dira en paraphrasant Corneille que «la vessie a ses raisons que la raison ne comprend pas», mais tout de même, mis à part quelques cas extrêmes, il me semble que l’on peut toujours se retenir jusqu’à ce que l’on trouve une toilette. Mais voilà où le bât blesse : les toilettes publiques sont extrêmement rares, voire inexistantes et si on a la chance d’en trouver, sont trop souvent dans un état de salubrité à couper le souffle et l’envie la plus pressante. Alors que reste-t-il, sinon la rue? Bien sûr, la pratique n’est pas très agréable, ni à la vue ni surtout à l’odorat, mais après tout il s’agit d’un appel naturel auquel il est parfois difficile de résister, convenons-en. La solution, on s’en doute, revient donc à l’État d’installer, dans les villes peuplées, des toilettes publiques en divers endroits et de faire en sorte que ces toilettes soient décemment entretenues. Je pense, pour ma part, que des toilettes publiques payantes pourraient constituer une solution viable. On parle ici d’un petit prix, bien entendu, collecté par une madame ou un monsieur pipi et qui pourrait minimalement payer les services de cette inestimable personne ainsi que les produits de nettoyage. Évidemment, nous n'en sommes pas encore là. Mais le simple fait qu’on mentionne la chose et qu’on s’en offusque dans l'article mentionné ci-dessus me paraît un indéniable signe que la conscience collective s’aiguise. On est dans la bonne direction.

Certes, vous me direz que c’est peu et vous aurez raison. Ce n’est pas demain la veille que le pays disposera de toilettes publiques en quantité suffisante pour répondre aux besoins des citadins. Mais je le répète : le fait qu’on en parle, qu’on s’y arrête, qu’on cherche des solutions me paraît digne de mention, alors je vous le mentionne.

Reste que lorsque l’envie nous prend et que la pression augmente, l’oreille se ferme souvent aux plus raisonnables raisonnements…

mardi 19 octobre 2010

Au voleur!


Non, ce n'est pas la campagne électorale qui mérite mon attention aujourd'hui, mais plutôt un petit événement, banal en soi, mais qui m'a personnellement piqué au vif : on a volé mon vélo!

En fait, pas MON vélo, mais plutôt celui de notre cher docteur Pasteur, qui me l'avait gentiment prêté il y a de ça plus de trois ans... Trois ans que je le laisse dehors, sans crainte ni soucis et pourtant, il aura fallu une seule occasion pour qu'il disparaisse sans laisser de traces. Bien sûr, vous me direz que ce n'est qu'une bicyclette qu'on peut remplacer aisément et que, par conséquent, le mal n'est pas bien grave. Oui, mais vous oubliez le principe : ce n'est pas le vol qui fait mal, mais bien le fait que le vol se soit passé à la maison. Dans notre bulle privée, pour ainsi dire. Et ça, en trois ans, c'est une première. Souvent, par négligence ou distraction, nous avons oublié des choses dehors; jamais rien n'a disparu. Le vélo était l'un de ces objets qui, une fois à la maison, en font virtuellement partie. Et pourtant, pourtant, quelqu'un a osé s'approcher et s'emparer de la bécane sans vergogne, en sachant très bien que c'était mal. Choqué, dites-vous? Le mot n'est pas fort. Évidemment, personne n'a vu ni entendu quoi que ce soit... Que faire? Rien, bien entendu. Passer l'éponge et faire mieux la prochaine fois. C'est ce que tout le monde me conseille. J'ai pourtant fait un petit geste : j'ai offert une récompense pour (1) le retour du vélo et (2) pour l'identification du ou des voleurs. On verra ce qu'on verra. C'est très probablement un coup d'épée dans l'eau, mais quand on est frustré, même un coup d'épée dans l'eau soulage. En fait, je me sens déjà mieux...

Ceci m'amène à parler de méfaits en général. Faut que je vous dise que, en dépit de cet incident frustrant, les mauvais coups sont plutôt rares dans le coin. Certes, les bananes disparaissent avant qu'on ait le temps de les cueillir et jadis, on s'est fait voler une poubelle (fût en métal de 45 gallons, donc très utile pour faire des réchauds à charbon de bois), mais pour le reste, "knock on wood", comme disent les Américains, tout va bien. On prend les précautions qu'il faut, mais on n'est pas pour autant obsédés par la sécurité des lieux. Mais je pense que, d'une façon générale, les gens ici sont honnêtes. Je dirais, sans l'ombre d'une preuve pour appuyer mes dires, que Les Cayes est une ville tranquille et fondamentalement honnête. Il s'agit d'une impression, bien sûr, mais une impression qui s'est avérée depuis que nous habitons ici. En fait, considérant l'importance de la ville, on peut s'étonner du faible taux de criminalité dans la zone; s'étonner et s'en réjouir...

Tout ça pour vous dire que même en dépit de l'affront moral et de la perte matérielle, on accepte. Et puis, confessons nos torts : si le vélo avait été rangé à l'intérieur, ou même simplement cadenassé, le délit n'aurait jamais eu lieu et je ne serais pas en train de me plaindre. La confiance, c'est bien beau, mais quand elle devient de la naïveté, on ne peut que s'en mordre les pouces. Quand on tente le diable, il ne faut pas s'étonner qu'il succombe à la tentation...

Un mal donc, mais pas un mal fatal; plutôt une leçon dont nous pouvons et allons tirer profit.

jeudi 22 juillet 2010

Faire feu de tout bois


Je me distance un peu, je le reconnais, mais bon, que voulez-vous? Il y a d'autres chats qui méritent d'être fouettés ici et faut bien qu'on s'en occupe, pas vrai? Cependant, je ne vous laisse pas tomber pour autant, surtout que l'actualité nous remet Haïti en plein portrait pour n'importe quel motif.

Ainsi aujourd'hui, c'est cet article paru hier et signé Caroline Touzin qui m'a fait sourire. Bon vous allez me dire que le sujet n'a pas de quoi faire sourire, mais c'est qu'on annonce des choses que tout le monde sait. Et ne me dites pas que vous ne saviez pas. Je l'ai répété à satiété, et bien d'autres sources ont affirmé la même chose, en anglais comme en français : Haïti est un arrêt pipi presque incontournable dans le voyage qui mène la cocaïne sud-américaine (colombienne entre autres, ça aussi tout le monde le sait) vers le lucratif marché nord-américain. Regardez une carte et vous allez comprendre : au sud d'Haïti, il n'y a rien, que la mer jusqu'au prochain rivage qui se trouve à être le Venezuela et la Colombie, justement. Alors même avec une imagination prosaïque et limitée, il est facile de voir pourquoi le transit par Haïti est intéressant... Et par la République Dominicaine aussi, c'est bien évident, mais en Haïti tout est tellement plus facile. Et comme les Haïtiens ne sont pas consommateurs, eh bien tu parles s'ils s'en tapent que la drogue transite par leur pays...

Une chose que l'article dit, c'est que depuis le tremblement de terre, c'est pire. Je pense que c'est une affirmation gratuite et à mon sens, fausse. Car s'il est une chose que le séisme n'a pas changé, c'est bien ce trafic extrêmement lucratif et bien rodé; déjà, en 2003, on en parlait comme d'une mécanique bien huilée donnant d'excellentes performances. On parlait de Cap Haïtien comme de la capitale des gros bonnets du trafic. Puis, en 2004, alors que nous étions à Fond des Blancs, on parlait des arrivages fréquents à Côte-de-Fer et dans les environs. Nous avons même eu à traiter des blessures par balles, une fois entre autres où les gens étaient venus à notre petit hôpital en pleine nuit et avaient causé tout un émoi parce qu'ils étaient, semble-t-il, armés jusqu'aux dents. Rivalités locales imposent... Trafic courant donc, bien connu des usagers incluant la police, mais trop bien rodé pour qu'on puisse l'éliminer. Et puis, est-ce qu'on le veut?

Car au risque de me faire lancer quelques tomates avariées, je vous demanderai : pourquoi faudrait-il éliminer ce trafic? Pourquoi ne pas laisser cette source de revenus couler librement dans le pays? Oui, bon, je sais, c'est illégal. Mais le problème de la drogue n'est pas un problème haïtien, je le redis, et comme les clients américains ou canadiens continuent de s'approvisionner, il faut bien la drogue continue d'entrer au pays de différentes manières, non? Alors si ce n'est pas depuis Haïti, ce sera via un autre endroit et d'autres s'enrichiront de ce commerce marginal mais ô combien payant. Alors pourquoi pas Haïti? D'ailleurs, je me souviens avoir lu jadis que la force économique de la Colombie passait nécessairement par le trafic de la cocaïne. Ce qui est tout à fait logique. Même s'il s'agit d'argent noir qu'il faudra blanchir, c'est tout de même de l'argent, et en quantité non négligeable. Or, comme l'a si bien dit l'empereur Vespasien quand il a décidé de percevoir une taxe sur la collecte d'urine : «L'argent n'a pas d'odeur». Et si vous voulez mon avis, la coke ne sent sûrement pas plus mauvais que l'urine... Sans blague, soyons francs : le trafic de la drogue n'est pas vraiment un malheur pour ce pays, puisque ce n'est pas ici qu'on la consomme. Or, ceux qui sont impliqués dans cette activité -- et ici je parle des haut-gradés -- sont des gens intelligents (forcément), entrepreneurs et organisateurs et souvent, socialement engagés (politique entre autres). Si donc l'argent coule à flots, on peut s'attendre à ce qu'une partie retombe directement dans la communauté sous forme de dépenses publiques bien visibles (statut oblige) ou, indirectement, dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Bref, un businessman est un businessman et peu importe si son business est inavouable, s'il est un bon businessman, il fera des profits, qui seront par la suite réinjectés dans la communauté d'une façon ou de l'autre. C'est du moins comme ça que je comprends l'économie. Tout ça pour dire que si quelques trafiquants locaux s'en mettent plein les poches parce que l'Amérique du Nord consomme de la cocaïne, eh bien je ne m'en offusquerai pas du tout.

Et vous?

vendredi 7 mai 2010

Les grands départs



Vous allez me dire que les départs sont toujours une source de stress et vous aurez raison. Mais il est des fois qui sont pires que d'autres. Comme ce jour du 5 mai 2010, date choisie pour un départ vers notre pays d'origine après près d'un an sans mettre le nez dehors. Comme le vol est prévu pour 16h30, on se dit qu'on a le temps «en masse» et qu'il ne sert à rien de se précipiter à l'aéroport, alors qu’il y a tant encore de petits détails à régler avant de quitter notre cher petit hôpital. Tout de même et connaissant les aléas de tout voyage haïtien, nous voulons nous donner une marge de manœuvre adéquate et donc, fixons le départ de la maison à 9h, ce qui après les 4 heures de route qu'il faut compter normalement pour se rendre à l'aéroport, nous procure cette marge de manœuvre. Départ pile à l'heure. Tout va bien. Un peu de pluie en route, mais rien pour nous ralentir et donc, nous sommes largement dans les temps. Quand soudain, Onès notre chauffeur attitré, me signale, le plus calmement du monde, qu'il n'a plus de freins. Vous allez me dire que ce ne sont pas les freins qui font avancer la voiture et qu'on aurait tort de s'en plaindre, mais bon, les freins restent quand même un accessoire utile, convenons-en. Heureusement, chanceux dans notre malchance, nous sommes juste à côté de notre mécanicien habituel, lequel habite à Aquin, pour situer ceux et celles qui connaissent le patelin. Boss Blanc comme tout le monde l'appelle, a tôt fait de diagnostiquer le problème qui vient, semble-t-il, du maître-cylindre. En termes concrets, ça veut dire une panne du genre irréparable dans l'immédiat et imbricolable, si vous me passez le terme (et s'il vous offusque, vous savez le pli que ça me fait...). Que faire? Onès suggère que Roger, notre second chauffeur, vienne nous rejoindre avec l'autre voiture et que nous fassions l'échange, de façon à poursuivre notre route à Port-au-Prince. L'idée ne me sied guère : un rapide calcul laisse un doute substantiel s'installer dans mon esprit cartésien. «Ne peut-on trouver quelqu'un qui acceptera de nous louer sa voiture?» demandé-je à Boss Blanc. Il s'enquiert et trouve. Une petite demi-heure d'attente sous la pluie et le gars arrive.«Il te reste à t'entendre avec lui sur un prix...» me dit Boss Blanc en riant. «Je n'ai pas de problème avec ça» lui réponds-je. Onès, qui se souvient de l'épisode des chaises, s'en donne à cœur joie. Je parle avec le chauffeur.. «Ba-m 2 goud», me dit-il. Comment? Deux gourdes, deux cents dollars américains, quoi! Je prends mon air bien peiné et lui déclare que c'est malheureusement impossible mais qu'il nous faut absolument poursuivre notre voyage dans les plus brefs délais si l'on ne veut pas manquer notre avion, lequel ne nous attendra pas, nous ne le savons que trop bien.

Bien entendu, nous finirons par nous entendre... Sauf que, alors que nous avions assumé que ce serait notre chauffeur qui conduirait, c'est le monsieur lui-même qui prendra la relève. Et quelle relève! Sous un soleil cuisant (pas de climatiseur dans la voiture), puis sous un déluge tel que la visibilité en est devenue inexistante, nous avons fait la route en quatrième vitesse -- en cinquième en fait -- sans mot dire et en retenant notre souffle. Et la traversée de Port-au-Prince, je vous dis pas... vous dites que je conduis vite? Fallait voir le gars aller! Vous croyez que je klaxonne à tort et à cris? Lui, c'était à fond le klaxon! Vous me trouvez osé quand je me faufile entre deux voitures? Lui passe allégrement entre deux camions qui menacent de réduire sa voiture et son contenu en pâte compressée, et avec le sourire en plus! Mais quel chauffeur, mes amis!

Tout ça pour vous dire que nous arriverons à temps, mais juste. En fait, eussions-nous attendu l'autre chauffeur, nous eussions raté l'avion assurément.

Vol sans histoire, comme il faut qu'un vol se passe. Car un vol avec histoire se termine souvent mal pour les acteurs, alors aussi bien qu'il se passe sans histoire, vous ne croyez pas vous autres? Puis c'est le monde moderne, sa mauvaise température, ses gens pressés et stressés et sa surabondance de produits de consommation. Mais c'est aussi le monde dans lequel des gens qu'on aime vivent et palpitent, des gens qu'on aime bien voir et revoir et qui nous le rendent bien.

Et maintenant que nous voici temporairement installés dans nos quartiers nordiques, nous allons en profiter pour respirer un air bien frais et, souhaitons-le, revigorant. Car nous avons bien besoin d'un plein de vigueur...

jeudi 27 mars 2008

Dolce Vita




J’ai sous-entendu précédemment que la vie était belle et aisée. C’est vrai. Je n’exagère en rien. Cependant, il ne faudrait pas confondre une belle vie avec une vie de farniente absolue où la seule activité revient à tuer le temps, d’une manière ou de l’autre, comme si l’on allait arriver à quelque chose de cette façon. Ici, on ne tue pas le temps, on le prend. Nuance. Le temps est occupé au point où on se demande parfois où les journées vont. Et les nuits sont plus que nécessaires pour recharger les batteries que les journées bien remplies ont drainées. Alors, pour la dolce vita, on repassera…

Le travail d’abord : il n’est pas égal, le travail. Parfois, on se demande ce qu’on va faire, souvent on se demande comment on va faire… Car les tâches varient au fil des jours avec toujours, en constante, l’idée de régler les problèmes qui germent à chaque pas. Ainsi, on pourrait dire que notre principale tâche consiste précisément à résoudre des problèmes. En anglais, on devient des « problem solvers », des gens capables d’affronter les problèmes et de leur trouver une solution. Certaines écoles de management ne parlent pas de problèmes, mais plutôt de défis, juste pour en faire sortir tout le côté stimulant plutôt que leur nature insoluble. Pourtant, la sagesse commande de bien faire la différence entre les problèmes qui peuvent se régler et ceux qui n’ont pas de solution. À cette distinction pleine de gros bon sens, j’ajoute la subdivision des problèmes qui peuvent se résoudre, mais à un prix tellement fort que le jeu n’en vaut pas vraiment la chandelle. L’exemple le plus simple reste sans doute celui de la voiture brisée : on peut toujours réparer, mais à un certain moment, le coût de la réparation et l’énergie déployée rendent le projet non rentable et alors, mieux vaut en faire son deuil. Le truc, c’est de prendre la bonne décision au bon moment. Car une fois engagé dans le processus, il est beaucoup plus difficile de faire marche arrière. Et pourtant, là encore, il est possible que ce soit plus sage d’arrêter les frais. Cut your losses, diraient les Américains.

Je vous dis tout ça précisément parce que, ces jours-ci, nous sommes aux prises avec un cas épineux concernant l’une de nos génératrices. Après avoir mis quelque $3000 US pour la remettre en fonction, voilà qu’elle vient de retomber en panne. Certains me disent de la mettre au rancart et d’en acheter une autre; d’autres maintiennent qu’il est plus simple et plus rentable de continuer de réparer, puisqu’à 10 ans, une génératrice n’est pas si âgée que cela… Où est la sage décision? Où est celle qui, à moyen terme, se révélera mauvaise? Je vous laisse y réfléchir. Quant à moi, mon idée commence à se stabiliser…

Bien sûr, on me dira que penser n’est certainement pas un travail astreignant, et on aura raison… jusqu’à un certain point. Car penser reste un verbe d’action qui implique donc une activité, cérébrale certes, mais bien réelle, qui engendre une fatigue elle aussi bien réelle. Ainsi, il est présentement 17h, je suis fatigué, c’est l’heure de la bière et elle sera la bienvenue.

Peut-être qu’il y a un peu de dolce vita là-dedans, finalement…