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dimanche 2 mars 2014

La flemme et le Mardi Gras


Des fois, j’ai simplement pas envie. Des fois, j’ai cette espèce d’apathie paralysante qui m’enlève le goût de faire quoi que ce soit sauf lire ou regarder la télé. Panne littéraire? Non, pas du tout. Vous le savez maintenant : pour moi tous les sujets sont bons, même ceux qui, a priori, ne semblent pas vraiment aptes à rebondir. Angoisse de la page blanche, alors? Ici encore, c’est non. Je me souviens d’ailleurs de l’époque où la page blanche était une vraie feuille de papier sur lequel courait mon stylo ou, un peu plus tard, une feuille que je glissais dans la «machine à écrire», avant d’en marteler les touches comme si la victoire en dépendait… J’ai appris en autodidacte à taper selon une méthode (lasalle, si je me souviens bien) et ma foi, pour taper, je tapais! Car malgré les semonces de mes enseignants, ma paresse chronique s’accordait mal avec l’idée d’un brouillon, lequel signifiait seulement un double travail pour moi. Alors je glissais une feuille de papier vierge dans la vieille Underwood (photo ci-dessous) récupérée à l’imprimerie où travaillait mon père, et là, devant la page blanche, je laissais les phrases se mettre bout à bout, s’enchaîner sans contrainte et former le corps du squelette de ma pensée frivole. Bien sûr, il me fallait tout de même réfléchir un peu à ce que je voulais dire, mais une fois l’idée germée, le terreau de la feuille blanche suffisait à lui donner corps et vigueur et la page se remplissait sans que j’aie besoin de forcer. Si bien que pour l’angoisse, on repassera.

Mais la flemme, les amis, la flemme…

Tout de même, puisque j’ai pris déjà une demi-page pour vous dire que j’avais la flemme et puisque j’aime bien maintenir ce rendez-vous dominical avec vous, je vais tout de même vous donner un bref aperçu de la situation actuelle, en ce début du mois de mars 2014. Au nord du nord, là où la majorité de mes lecteurs assidus habitent et où nous lorgnons de temps à autre, c’est visiblement toujours l’hiver à n’en plus pouvoir, ce qui ne présente rien d’enviable pour des gens vivant sous le soleil, je sais que vous serez d’accord là-dessus. En plus, pour nous, c’est le congé du Mardi Gras — une fête que tout le monde connaît, mais qui, au nord, ne s’accompagne pas d’un congé férié et chômé alors que c’est le cas ici. En fait, nous bénéficions présentement d’un long week-end de cinq jours, ce qui est tout de même appréciable, avouons-le.

Et puis, ce qui n’enlève rien à la chose, cette année, le carnaval (puisque qui dit Mardi Gras dit carnaval), dans sa version nationale et officielle, se tient à Gonaïves, ville du nord assez loin de nous, si bien qu’ici aux Cayes, les célébrations restent bien modestes à tous égards, donc, avec moins de musique (ou ce qui en tient lieu) tonitruante et capable de réveiller les morts, alors pour les vivants cherchant le sommeil, je vous laisse imaginer… En résumé, la fête est là, mais elle nous laisse souffler.

Le congé ne s’en prend que mieux. Et c’est sans doute pour cette raison qu’en ce dimanche ensoleillé, nous avons choisi de sauter notre traditionnel petit tour à la plage, quitte à le remettre à demain, à mardi ou à mercredi si le cœur nous en dit. Car aujourd’hui, vous l’ai-je dit, j’ai la flemme…

Si bien que, si ce produit de ma fainéantise dominicale vous semble pauvre et fade, je vous dirai que j’ai déjà abordé le thème du Mardi Gras de même que celui du Mercredi des Cendres au cours des années passées, alors faut pas vous gêner…

Car moi, je crois bien que je vais retourner à la télé, tiens…

lundi 18 novembre 2013

Congé!


Deux mois ont passé depuis notre retour. Deux mois seulement. Et pourtant, après cette période relativement courte, nous avons l’impression de n'avoir jamais quitté le pays et les souvenirs du Québec et de ce que nous y faisions se sont estompés dans la chaleur tropicale. Qui diminue, soit dit en passant. Car oui, il fait moins chaud maintenant, surtout la nuit, et l’on ne s’en porte que mieux, vous vous en doutez bien. Rien à dire de ce côté, donc. Rien à dire non plus côté boulot, lequel s’exécute sans se faire demander, au rythme des jours et de l’afflux de problèmes. Bref et pour tout vous dire, tout va, et pas trop mal à part ça.

N’ayant rien à me plaindre, l’on pourrait croire que je n’aurai rien à dire. Mais les habitués de ces chroniques savent que rien n’est plus loin de la vérité… Car j’ai toujours quelque chose à dire, même si parfois, je m’écarte des préoccupations tropicales typiques du sud et des frustrations qui en découlent : politique, économie, santé sont autant de sujets qui m’ont fait tantôt râler, tantôt rire, tantôt pleurer et je ne me suis pas privé de le partager avec vous. Mais présentement, je l’avoue, la vie au sud est tout ce qu’il y a d’ordinaire. Peut-être pas pour longtemps si les choses continuent sur leur pente descendante, mais pour l’instant, c’est acceptable. Mais l’insatisfaction, et je parle ici de l’insatisfaction politique, monte. S’amplifie. Prend forme. S’organise. Ainsi les manifestations d’aujourd’hui, bien que modestes, laissent penser que les choses n’en resteront pas là et que la pression sur le président haïtien risque de devenir intenable. Ce qui n’est pas nouveau, remarquez, mais pas agréable pour autant. Car les manifestations ici dégénèrent aisément et peuvent devenir assez inconfortables, surtout quand on en ignore les véritables motifs.

Encore une fois, je le redis : je n’entends rien à la politique et lorsqu’on me dit que le président fait ceci ou cela de travers, je ne conteste ni approuve, me contentant de baisser pudiquement la tête pour masquer le regard bovin qui trahirait mon ignorance de ces choses. Cela dit, une chose est sûre : ce n’est pas demain que l’on trouvera un saint président. Ou un président saint si vous préférez. Qu’il soit sain d’esprit est déjà beaucoup d'ailleurs (clin d’œil ici au maire de Toronto)… Le président (ou le premier ministre, c’est selon) n’est pas parfait? Ce n’est pas grave, en autant qu’il fasse son travail. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, n’est-ce pas? D’un travail qui doit se faire et le mieux possible, compte tenu des moyens du bord. Or, Haïti peine encore et toujours à se relever du tremblement de terre de 2010 et franchement, compte tenu de l’ampleur de la catastrophe, quatre ans, c’est peu et ce serait peu pour n’importe quel pays. Le président Martelly a hérité d’une tâche qui n’a jamais pesé sur ses prédécesseurs, le dernier séisme datant de plus de 200 ans. Une tâche titanesque. Je pense qu’il s’en est fort bien acquitté jusqu’à présent et, sans être un saint, a tiré les marrons du feu alors qu’ils étaient encore brûlants. Pour un chanteur populaire, je trouve que c’est tout de même pas mal du tout. Mais il semble que ce ne soit pas là l’opinion de tout le monde… On verra bien comment les choses évolueront...

Heureusement, cela ne nous empêche nullement de profiter de ce jour de congé (commémoration de la bataille de Vertières) qui prolonge le week-end et nous octroie une autre journée de farniente dont on ne saurait se plaindre.

Car le prochain, c’est le 25 décembre…

vendredi 29 mars 2013

Vendredi Saint


Vendredi saint… Pour plusieurs, le jour est encore synonyme de tristesse profonde associée à la mort du Christ sur la croix. Je les respecte. Mais pour nous, je le dis au risque de passer pour un mauvais chrétien, c’est d’abord et avant tout un congé, et un congé, ça se prend toujours, je pense que nous serons d’accord là-dessus.

Reste qu’il fut un temps (note orthographique : pour ceux ou celles qui se demandent s’il ne faut pas mettre un accent circonflexe sur le u de fut, c’est non, car il s’agit ici d’un passé simple et non d’un subjonctif imparfait, comme dans j’aurais aimé qu’il fût plus riche. Voilà, vous savez tout maintenant), un temps donc où le Vendredi saint, jour du traditionnel congé pascal (de Jeudi saint au lundi de Pâques inclusivement), était fortement teinté de religiosité puisqu’il fallait assister à la terrible cérémonie du Vendredi saint qui nous faisait revivre la passion de Jésus et sa triste et célèbre fin sur la croix. C’est d’un dramatique, mes amis… En fait, toute la passion du Christ est extrêmement dramatique, avec la flagellation, la couronne d’épine, sa rencontre avec Ponce Pilate, toutes choses que vous connaissez forcément si vous êtes un tant soit peu chrétien. Car on nous l’a tellement répétée que l’histoire a fini par s’incruster, pas vrai! Mais c’est une belle histoire dont le héros meurt, mais dans un tel élan de magnanimité qu’on s’en sent grandi. Or, n’est-ce pas à cela que servent les héros? Et puis un héros mort dont on sait qu’il va ressusciter, n’est pas une fin digne des plus grandes productions hollywoodiennes?

Que les puristes se rassurent ici : je ne fais nullement dans le sarcasme, bien au contraire. Moi, je l’aimais bien l’office du Vendredi saint. Surtout que toutes les filles de la paroisse y allaient et bon, ça nous donnait un peu l’occasion à nous, les garçons timides, de les zyeuter de loin voire parfois, d’échanger un petit sourire en coin. En coin, dis-je bien! Rien de séducteur là-dedans, rien pour s’y méprendre! Mais c’était tout de même un demi-sourire qui illuminait la passion (je parle de l'office religieux, bien sûr) et qui en rendait l’écoute moins plate. Car pour être plate, cette lecture, mono-tonale et monotone l’était assurément et c’est sans doute pour cette raison qu’on nous faisait rester debout : pour ne pas qu’on s’endorme d’ennui! (Ce qui se produisait tout de même parfois, remarquez…)

Aujourd’hui, au Québec du moins, la tradition est moins vive. Toujours vivante, oui, mais moins vive. Moins astreignante du coup. Ici en Haïti, en revanche, elle est toujours aussi intensément vécue, avec de longs et mortuaires offices qui se font la compétition pour aller chercher le plus vaste auditoire possible. Je ne sais pour les autres, mais je puis vous garantir que nos voisins, les adventistes, ne sont pas en reste sur ce point : depuis quelques heures, ils nous passent des enregistrements de la musique qu’ils chantent pendant leur office. Tu parles!... Néanmoins, à leur défense, je dois dire que ces enregistrements sont, musicalement parlant, tout à fait harmonieux, avec de fort belles voix et une bonne instrumentation. Quel dommage que la réalité live soit tout autre!... Mais bon. Le Christ est mort et c’était un personnage important alors la commémoration de cette mort semble tout à fait dans l’ordre des choses historiques, et pourquoi ne le serait-elle pas?

Mais il me semble que pour les circonstances, un peu de silence ne nuirait pas…

lundi 24 décembre 2012

Un autre Noël


Et alors? Êtes-vous comme moi chatouillé par l’odeur affriolante du cipâte qui cuit langoureusement? Je vous le souhaite, car s’il est un symbole du temps des Fêtes d’antan qui reste toujours vivant, c’est bien ce mets traditionnel, bien de chez nous et j’entends par là de ce Québec qui m’a vu naître. Incidemment, c’est le témoignage d’une anglophone,  Carole Blier-Schlueter, qui résume le mieux cette réalité : «This wonderful dish is a very old recipe originating from Quebec. It is a huge meat pie which is served for the Christmas Holiday. A delight!!!» Reconnaissance sincère s’il en est une et à laquelle je me rallie sans restrictions : c’est un vrai délice. Le cipâte (ou cipaille comme maman s’évertuait à l’appeler, histoire de bien «perler») est un plat qui se mange tout aussi bien à n’importe quelle époque de l’année, remarquez, mais que, pour ma part, j’associe toujours au temps des Fêtes, plus spécifiquement à Noël, puisque à la maison paternelle — maternelle devrais-je plutôt dire —, c’était après la messe de minuit qu’on s’en empiffrait. Et je vous garantis qu’après une marche, même courte, sous le froid de la nuit, jamais adéquatement habillé (puisqu’on sortait de la messe n’est-ce pas), qu’on rentre à la maison et qu’on y est accueilli par cette odeur, l’appétit s’excite et je vous jure, mes frères, oubliez les 70 jeunes vierges, le paradis, c’est ça!

Cela dit, il faut bien admettre que les tropiques ne « sentent » pas Noël comme nos pays nordiques. Et non, ce n’est pas à cause de la modestie des décorations de saison, ni à cause des différentes odeurs culinaires comme à cause du climat. Noël n’est vraiment pas une fête tropicale. Je l'affirme. Je vous ai dit déjà que, même dans une conception païenne, Noël était grandement célébrée dans les pays nordiques parce que, oui oui, vous y êtes, c’est la fête du retour de la lumière! Sous les tropiques cependant, la différence est trop minime pour qu'on la souligne. Quant à ce cher petit Jésus censément né ce jour-là, là encore, on le présente dans une crèche entourée de neige (!), tableau qui écarte radicalement les tropiques... Mais qu'importe, puisque la fête reste une belle occasion de manger le cipâte!

Incidemment, ne me demandez surtout pas le rapport entre ce plat copieux et la naissance de Jésus, je n’en sais strictement rien. Mais bon. Quelle différence cela fait-il en bout de ligne? Les traditions sont faites pour être maintenues envers et contre toute logique car leur fonction en est une de renforcement de la culture et de l’identité sociale. C’est une des raisons pour lesquelles, même sous les tropiques, nous nous efforçons de perpétuer cette tradition, l’autre étant bien sûr le plaisir des sens. Néanmoins, je vous concède que ce plat riche en hydrates de carbone et en protéines s’accorde mieux avec une température extérieure sous le point de congélation qu’avec les 28°C que nous avons ici en cette saison… Mais ça fait rien, c’est bon quand même!

Quant aux cadeaux qui font aussi partie des traditions, je maintiens que leur statut est beaucoup exagéré. Noël est maintenant une fête commerciale au même titre que la St-Valentin ou l'Halloween et les marchands comptent évidemment sur les consommateurs compulsifs pour élever sensiblement leur chiffre d’affaires. Rien de bien romantique ni de bien culturel là-dedans, mais tradition tout de même. Car oui, il y en a qui aiment ça... Mais pas nous. De toute façon, nous avons tout ce qu’on peut désirer et même davantage, alors…

Un autre Noël donc, notre sixième en cet endroit du monde où nous avons élu domicile. Comme d’habitude, rien de spécial au programme, mais quelques jours de congé restent toujours fort appréciés, quoi qu’on en dise. À toutes et à tous, ma compagne et moi-même souhaitons un Noël de paix et d’harmonie capable de vous donner chaud au cœur.

JOYEUX NOËL!!!

P.S. La photo représente le cipâte dans sa phase préliminaire; je vous en donnerai une autre lorsqu’il sera prêt…

samedi 3 novembre 2012

Le jour des Morts


J’avais composé un texte. Que j’ai choisi de ne pas vous présenter. Ne m’en voulez, de grâce. Appelez cela de l’autocensure. Il en faut de temps à autre. Vous savez ce que dit le proverbe : «Toute vérité n’est pas bonne à dire» Kant ne serait sans doute pas d’accord, mais il est des vérités qu’il vaut mieux taire, surtout lorsqu’on s’adresse à un public varié dont on ne peut connaître les réactions, les jugements et les conclusions. Je vous dirai seulement qu’il s’agit d’un fait divers haïtien, mais dont la teneur est susceptible de choquer vos âmes nordiques, alors je passe. Par respect, autant pour ce peuple que je côtoie journellement que pour vous et votre bon sens commun. Voilà l’art de s'excuser en plusieurs mots mais vous savez que j’y excelle.

Changement de sujet donc, et allégement du ton.

Hier, Fête des Morts. Vous allez me dire que ça n’a rien de bien léger et pourtant, ici, on ne dramatise pas avec la mort. On la vit, simplement — je ne parle pas du défunt, bien entendu, lequel serait mal placé pour la vivre —, on chagrine, on se ruine en dépenses cérémoniales extravagantes et puis on passe à autre chose. La fête des Morts, dans cette perspective, ne se veut qu’un rappel respectueux de ceux et celles qui ne sont plus. Je vous l’ai dit précédemment, les Haïtiens ne fêtent pas l’Halloween, cette fête un peu macabre que n’aurait certainement pas désavoué Saint-Saëns qui a écrit cette délicieuse Danse Macabre où les squelettes s’entrechoquent joyeusement sur fond de xylophone. On dit que sa mère, invitée à la première, s’est évanouie en voyant la scène… Autre temps autre mœurs… Mais je digresse. L’Halloween donc a peu à voir — en fait, rien à voir avec la fête des Morts en ce pays, laquelle, je le redis, n’est qu’un hommage respectueux aux défunts. Une fête célébrée dans toute l’Amérique latine d'ailleurs, tout spécialement au Mexique où la fête prend des allures d’événement majeur. En Haïti, mon ami Antonio disait justement hier que l’on ne voit plus les Gede, ces joyeux lurons, dignes fils du Baron Samedi, le Loa de la mort dont les manifestations s’accompagnaient traditionnellement des tambours qui résonnaient sans relâche dans les cimetières. Je vous invite à visionner ce petit vidéo qui date déjà de quelques années et qui ne nous en apprend guère, mais qui illustre tout de même mon propos. Je vous suggère également cet article, tiré de Haiti Press Network. Cela dit, il faut bien reconnaître que les traditions vaudous sont en perte de vitesse dans le pays, sauf bien sûr quand on en fait des exhibitions touristiques, ce qui est bien malheureux, ne dites pas le contraire. Autres temps, autres mœurs, vous dis-je…

Quoi qu’il en soit, c’est congé, tout comme l’était le premier du mois, Toussaint oblige. Un long week-end de quatre jours que tout le monde apprécie y compris nous, ne serait-ce que pour nous permettre de continuer notre lente remontée vers un état de santé plus normal...

Et avec tout ça, octobre appartient déjà au passé et novembre nous ouvre ses bras temporels...

Un petit changement d'heure, avec ça?

jeudi 26 juillet 2012

Un autre carnaval


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L’auriez-vous deviné? Un autre carnaval secoue le pays. Je dis «secoue» car c’est un peu comme un tremblement de terre, cette affaire-là… Ça dérange les activités ordinaires, ça perturbe la circulation encore davantage, ça mobilise des tas de gens, ça encourage les abus de toutes sortes, bref, c’est le bordel… même si légèrement organisé. Et pourquoi ce «Carnaval des Fleurs», comme on l’appelle, fort joliment d’ailleurs? Parce que le président l’a promis, oui, devant le tollé de protestations qui s’est levé à Port-au-Prince quand il a été confirmé en février dernier que le carnaval annuel traditionnel, celui du Mardi Gras, aurait bel et bien lieu aux Cayes. La population de la capitale se sent frustrée de son «petit» carnaval du Mardi Gras? Qu’à cela ne tienne, on leur en donnera un gros, à l’été. En substance, c’est que ce que le président a dit. Dans les faits, il tient maintenant parole. Voilà au moins un fait qu’on ne pourra lui reprocher.

Car, bien évidemment, la question se pose : comment peut-on financer une telle activité — trois jours de bamboche, rien de moins — alors que les finances de l’État ne sont guère reluisantes et que plusieurs services de l’État souffrent encore d'arriérées de salaires majeurs? Comment? Rien de plus simple : on puise dans les coffres et on dégage un petit 65 millions de gourdes (soit 1,5 millions US environ), comme ça. Je ne sais pas pour vous, mais moi, ça me fait tiquer. Et puis entre vous et moi, dites-moi donc quel pays organise deux carnavals à quelques mois d’intervalle, paralysant le pays en obligeant toutes les institutions à fermer boutique pour la période? On affirme que l’activité vise à encourager le tourisme. Je veux bien, mais quelle preuve a-t-on que l'effet désiré se produira? Et d'ailleurs, est-ce vraiment la bonne période? La fin de juillet est chaude, humide, propice aux cyclones, en fait, pas vraiment idéale pour les touristes — les nordiques en tout cas, ce qui explique d’ailleurs pourquoi les voyagistes vendent cette période à rabais. Mais qui sait? Peut-être que la fête contribuera à une relance économique sans précédent dont les touristes auront été les catalyseurs. Peut-être aussi que la fin du monde va se produire le 21 décembre 2012… En un mot, la relance touristique via le carnaval des fleurs, je n'y crois pas. Non. La vraie raison, tout le monde le sait, c'est vraiment pour le président de faire plaisir aux gens de Port-au-Prince, voire de les distraire, sans doute pour qu'ils oublient tout ce qui va mal dans le pays...En tout cas, ça se prépare au Champ-de-Mars...

Certains, non sans ironie, avancent que le président Martelly étant, par définition pourrait-on dire, un homme de spectacle, tout carnaval est bon pour lui. «Il fait ce qu’il sait faire», m’a dit un homme sage et cynique (l’un n’empêchant pas l’autre)… Il n’empêche que de l’avis de plusieurs, notamment dans la presse écrite, Martelly joue ici un jeu dangereux qui pourrait fort bien se retourner contre lui. Surtout si les millions nécessaires à la fête ont été prélevés à même des fonds restreints… Mais bon. Quel homme politique, a fortiori un président, ne fait que des bons coups? Lequel ne subira pas la critique populaire, fondée ou non? Même les meilleurs y passent.

Reste que ce carnaval ne fait pas l’unanimité. D’abord il ne repose sur aucune tradition; ensuite, il coûte cher; certains trouvent que ça ne fait pas très sérieux; d’autres craignent des dérapages sociaux; on dit aussi que la fête risque de porter ombrage au retentissant succès du carnaval du Mardi Gras des Cayes. Bref, ce n’est pas l’éclosion de joie universelle qu’on a vue en février dernier. Qu’en sortira-t-il? Bondye konnen, comme on dit…

Espérons juste que les festivités n’entraveront pas notre voyage vers la capitale, prévu pour à peu près la même époque, validant ainsi ce que je vous ai mentionné dans un texte où je me plaignais de la poisse qui nous poursuit, semble-t-il, quand arrive le moment du départ. Comme si le sort était contre nous… J'espère vraiment que ce n'est pas le cas...

vendredi 24 février 2012

Séjour à l'Île à Vache


C'est une île splendide. Peu développée, peu peuplée et tropicale à souhait. D'aucuns parleraient de paradis, d'autres, plus pragmatiques, y verraient une opportunité en or d'y développer un tourisme porteur d'or, justement. Est-ce là le sort qui attend l’île? Souhaitons que non. Car pour l’instant, c’est un endroit où il fait bon s’arrêter, histoire de reprendre son souffle. En tout confort, il va sans dire! Il ne s’agit pas ici de souffrir, mais bien de profiter de la vie, de se laisser prendre en charge par un système bien rodé, où tout est mis en place pour que le visiteur se sente bien et puisse couler quelques jours insouciants loin, entre autres, de la frénésie carnavalesque des Cayes…

Couler des jours insouciants alors que Les Cayes était en liesse peut sembler paradoxal à prime abord. Et pourtant, comme dans tous les paradoxes, même si c'est illogique, ce n'en est pas moins réaliste. Ni raisonnable. Certes, le carnaval présente un spectacle haut en couleurs capable d'épater les plus blasés – et je ne parle pas de nous, vous le savez bien. Mais le derrière de la scène est beaucoup moins reluisant, avec ses embouteillages indescriptibles, ses accidents aussi stupides qu'inévitables et ses problèmes logistiques stressants et souvent sans solution. Pour nous qui sommes aux premières loges de cette arrière-scène, nous avions choisi de prendre un petit recul face à l'événement que, de toute manière, les médias, télévision en tête, ont abondamment couvert et qui, selon le bilan provisoire présentement accessible, s’est fort bien déroulé, même sans nous...

J'en reviens donc à l'Île à Vache.

Elle n'est pas très loin des Cayes : à peine une demi-heure en bateau, une charmante balade quand la mer est calme, son état habituel. Et pourtant, en y débarquant, on se sent déjà dans un autre pays. Est-ce la mer, d'une clarté indéniablement tropicale? Est-ce le décor bucolique? Sont-ce les gens, insouciants et tranquilles, qui nous accueillent en souriant? Qu'importe, car la magie opère. On débarque à Port Morgan et l'on se met à marcher le nez en l'air, sans but précis, juste pour le plaisir d'être ici et pas ailleurs. Et commence ce qui sera une succession de moments fluides, régis par la seule annonce des repas qui, buffets obligent, doivent être pris à l'heure. Légère contrainte, s'il en est une, et que nous aurions tort de critiquer, les balises étant nécessaires à toute vie de farniente, et c'est un vieux paresseux qui vous le dit. Les repas, parlons-en. Buffets, soit, mais bien présentés et bien cuisinés (dans l'ordre inverse, en fait). Manger à n'en plus pouvoir, faire un somme pour aider la digestion, suivi d'une trempette dans la piscine ou la mer, selon notre inclination du moment et la journée tire déjà à sa fin. Bref, rien pour se plaindre.

Et pourtant, on ne peut que penser que ce petit coin de paradis reste menacé dans son existence même par la cupidité humaine et la mégalomanie propre aux entrepreneurs de tout acabit. Certains pensent et voient gros. Je vous ai parlé du tourisme en Haïti comme d'une industrie prometteuse, capable de contribuer solidement à faire tourner la machine économique. Mais pas sans discernement. Pas sans compréhension des enjeux environnementaux et humains. Pas sans respect de ce qui est déjà et qui n'a pas besoin d'être «amélioré» pour séduire les visiteurs. En fait, c'est précisément là que se joue l'avenir de l'Île à Vache : entre la quête pour un profit sonnant et le désir de maintenir l'île dans son état original, il doit y avoir un moyen terme, une façon de balancer les enjeux pour que tout le monde – et son père – y trouve son compte.

Quoi qu'il en soit, malgré son avenir incertain, l'Île à Vache reste présentement un endroit où il fait bon venir pour souffler un peu, oublier tous ces petits problèmes qui sont notre lot habituel et, pourquoi pas, échapper au tohu-bohu du carnaval, même s'il a connu un succès au-delà des plans les plus optimistes!


mercredi 22 février 2012

Puisque c'est mon tour...


Le croirez-vous si je vous dis que j'avais complètement oublié pourquoi ce jour est si important? Hier, conscient que je vous avais mis en veilleuse – le «back-burner» comme disent nos amis américains (et même ceux qui ne le sont pas) et subjugué par le charme bucolique de l'île, je vous ai préparé un petit texte que je comptais bien achever ce matin, après le café, mais à peine éveillé et oyant les souhaits de ma tendre compagne, je dus me rendre à l'évidence : c'était effectivement le jour de mon anniversaire, un jour que je ne peux décemment passer sous silence en ces lieux d'écriture! Donc, pour mes impressions insulaires, faudra patienter un peu. Oh! Pas long, je vous le dis, puisque le texte est virtuellement prêt. Mais le jour commande, n'est-ce pas...

Le jour commande parce qu'il est unique. On naît un jour. Bien sûr, ce jour s'inscrit dans un mois qui fait partie d'une année, mais c'est le jour qui compte. L'heure est encore plus précise – 18h30 pour ma part – mais trop courte pour qu'on puisse la saisir et s'en délecter. Si bien que le jour est tout à fait approprié pour souligner un anniversaire, celui d'une naissance dont les traces se perdent maintenant dans la nuit des temps. En fait et historiquement, c'est le feu de Rimouski qui, l'année précédant ma naissance, a marqué l'Histoire : pas ma naissance, laquelle est sans doute passée assez inaperçue, sauf pour mes parents et leurs proches qui, comme toujours, ont dû s'exclamer devant une inexistante beauté chérubine. Car vraiment, dites-moi sérieusement : un nouveau-né, vous trouvez ça beau, vous autres?  C'est tout plissé, cramoisi et ça fait que dormir ou chialer... Je n'étais sans doute guère mieux... Mais comme j'étais le premier de ceux qui allaient devenir mes frères, j'assume que j'ai eu droit à tous les honneurs de l'acte accompli. Car si «mourir, cela n'est rien» (dixit Brel), naître est tout un accomplissement! Que j'ai réalisé avec brio, m’époumonant pour que le reste du monde sache. En plus et comme je viens de le dire, j'étais le premier, celui qui hérite de la tâche difficile de se frayer un chemin, d'ouvrir la voie pour les éventuels suivants. Sans oser paraphraser Sol, l'un de nos plus grands jongleurs de la langue, je pourrais dire que je suis né nu, phare de mes frères à venir...

Mais une fois né, il ne reste plus qu'à vivre, ce à quoi je me suis adonné avec un plaisir constant et, j'oserais dire, croissant au fil des ans. Aujourd'hui, sonnant les cloches soixante fois pour marquer les années, je suis tenté de les faire sonner ensemble, en une joyeuse cacophonie à l'image de ce que fut ma vie à ce jour. Quant aux chandelles sur le gâteau, oubliez ça. D'abord, du gâteau, je n'en mange plus depuis belle lurette, ayant perdu mon goût pour les sucreries en même temps que s'est développé celui du vin; ensuite, ces bougies qui symbolisent les années passées et qu'on éteint d'un seul souffle, je trouve ça assez morbide, moi! Car quoi : il faut éteindre les années passées? Pour ma part et en bon Québécois de souche, je vous le dis tout net : je me souviens. Et de pas mal de choses que je n'ai pas du tout l'intention de voir s'effacer de ma poche à souvenirs...! Bref, vous avez tout compris : pas de gâteau d'anniversaire pour moi, pas de 60 bougies à souffler en postillonnant partout (y compris et surtout sur le fameux gâteau), mais de bons moments en bonne compagnie dans un décor typiquement associé au paradis, voilà tout. Et si ce n'est pas là le plus beau cadeau qui se puisse offrir et recevoir, je vous demande ce que c'est...

La soixantaine, donc. Certains m'ont averti que c'est cette décennie-là qui fait mal. La trentaine, c'est l'accès au système; la quarantaine, c'est la maturité; la cinquantaine, le tournant; la soixantaine, le début de la vieillesse... Eh bien au risque d'en surprendre, je dirai que j'aime vieillir. C'est un processus qui nous transforme en nous rendant plus ronds, plus polis – je ne parle pas de politesse, là! – moins piquants, moins rudes. Comme la montagne qui vieillit, je perds mes aspérités et me couvre de mousse, voire de forêts. J'étais Rocheuses, je deviens Appalaches. Et je puis vous le dire, à vous tous les jeunots qui me lisez parfois : c'est très confortable.

Tout ça pour vous dire que la journée s'annonce bien. Un congé d'abord (Mercredi des Cendres puisqu'il faut tout vous dire), la fin du carnaval et le retour à la vie (à peu près) normale; quelques heures heureuses de plus dans ce magnifique décor qu'est celui de l'Île à Vache (j'y reviens, j'y reviens, ne soyez pas impatients), un temps radieux tempéré par la brise maritime et la compagnie de ma très chère. Qui oserait demander plus?

Alors oui, aujourd'hui je vieillis. Hier aussi, mais ce n'était pas la même chose hein? Et demain? Ben demain, c'est VRAIMENT loin, alors on verra dans le temps comme dans le temps...!

dimanche 29 janvier 2012

Le carnaval s'en vient


Je vous avais dit que je vous reviendrais sur le thème des orphelinats. Mais ce ne sera pas aujourd'hui. Comme vous, c'est dimanche, pas le temps de revenir sur un sujet aussi raide et exigeant, tant pour moi qui l'écris que pour vous qui le lisez. En fait et pour tout vous dire, rien qu'à voir le nombre de visiteurs d'une page, on peut aisément déduire de l'intérêt général et de l'aridité du sujet. Donc pas d'orphelinat aujourd'hui.

Aujourd'hui, eh bien c'est dimanche, nous commençons tout juste à nous remettre du départ de notre chère visite de janvier et déjà, il faut se préparer psychologiquement et logistiquement à l'arrivée de la prochaine. Mais c'est une préparation légère puisque cette affaire est personnelle et modeste. On ne peut pas en dire autant de la préparation du carnaval national qui aura lieu cette année les 19-20-21 février prochain. Déjà, je puis vous le dire, ce sera tout un événement. Une grosse affaire. C'est que, pour la première fois dans l'histoire des célébrations de cette fête qu'est le Mardi Gras – la plus importante en Haïti, et ce n'est pas moi qui le dis – l'événement se tiendra ici, aux Cayes, au lieu de Port-au-Prince. Par édit présidentiel, rien que ça. Jusque là, rien à redire, puisqu'il s'agit d'un événement festif qui se déroule dans la joie. Sauf que, après avoir parlé avec des officiels et des responsables de la Croix Rouge cette semaine, on s'aperçoit vite que toute célébration susceptible d'attirer 200,000 personnes supplémentaires (!) en ville risque fort d'engendrer quelques petits problèmes... Circulation, approvisionnements, logistique, évacuation des blessés en cas d'accidents ou d'échauffourées, gestion des foules, bref vous voyez ce que je veux dire... Rien de bien méchant là-dedans – c'est la fête, après tout – mais même une manifestation de joie publique comme celle du carnaval peut mal tourner quand les gens se font piétiner... Donc, on ne sait pas trop comment les choses vont s'articuler, mais on sait que ce sera difficile et le mot est faible sans doute. Or, l'événement, je le répète, est grandiose par nature, et trois jours et trois nuits non-stop, ben ça fait un gros party, disons... En tout cas et comme toujours, on verra.

Il n'empêche qu'il est difficile de ne pas être impressionné par cette volonté populaire de célébrer, surtout lorsque la fête est entérinée par le président lui-même. Comme si la célébration allait vraiment donner le coup d'envoi qu'on attend, celui qui lancera la machine économique à faire de l'argent. «Ayiti dekole, Okay devan» (Haïti décolle, Les Cayes en tête), c'est le thème du carnaval qu'on veut énergique et porteur d'espoir. Mais ici, en ville, personne n'est dupe. Le carnaval emplira certaines poches, oui, mais pas celles qu'on souhaiterait. Seuls ceux ou celles qui auront su se placer les pieds récolteront la manne festive... Mais ce n'est pas là la raison d'être de l'événement, n'est-ce pas? Alors pourquoi s'en plaindrait-on? L'ambition du gouvernement, c'est de faire du carnaval d'Haïti un événement international, comme celui de Rio ou de Québec, qui justement, bat son plein au moment où j'écris ces lignes... Autres latitudes, certes, mais même euphorie carnavalesque, mêmes excès d'alcool et même défoulement collectif. Non, je ne suis pas cynique, mais vous avez compris que je ne suis pas friand de ces manifestations populaires, fussent-elles une simple expression de joie collective. Nous nous contenterons donc d'observer de loin ce qui se passe, tout en souhaitant que les choses restent dans les limites du raisonnable. Et ici, ces limites sont souvent élastiques, alors...

Mais l'effervescence des préparatifs est belle à voir : on met la ville propre, on déplace les étals des marchands, on remplit les trous, on élague les arbres le long des routes qu'empruntera le cortège des chars, bref, on se prépare, et tout ça dans la joie et l'excitation qui accompagnent les fêtes à venir. Et pour nous mettre en appétit, chaque dimanche soir, on nous parade quelques camions à la sono totalement débridée qui annoncent à coup sûr la tempête sonore à venir. Mais c'est mieux qu'un ouragan, hein? En tout cas, c'est ce qu'on se dit... Et puis, il faut bien que je le mentionne, le carnaval nous donne deux jours de congé en prime et qui s'en plaindrait, je vous le demande?

mardi 3 janvier 2012

Bonne Année tout le monde!


Trois janvier déjà! On dit que le 3 fait le mois, sera-ce sous le signe de la vitesse que passera ce mois? Il y a fort à parier que oui. Commencer l'année en grande vitesse me paraît un peu casse-cou cependant, et j'espère que nous pourrons reprendre un rythme moins soutenu au fil du temps. Mais pour que le champagne mousse bien, pour qu'il produise ses petites bulles en bonne quantité, il faut la pression à l'intérieur de la bouteille. C'est la pression qui, relâchée, donne toute l'effervescence de cet élixir festif : sans pression, pas de bulles... Alors un petit stress comme ça, à la veille ou presque de l'arrivée tant attendue de notre belle visite, c'est comme une condition nécessaire à la présence de bulles lorsque l'événement se concrétisera. Et ça s'en vient vite... Je vous en reparlerai, n'en doutez pas.

Pour l'instant, l'année débute et ma foi, mis à part nos chers adventistes qui ont mis le volume un peu fort dans la première nuit de l'année, tout s'est passé sous le signe de la PAIX et de l'harmonie. On sait bien que les gens ordinaires ont eu pas mal de misère à joindre les deux bouts – ils en ont tout le temps – mais l'ambiance était à la fête, les gens étaient contents et tous ont célébré comme il convenait la fête de l'Indépendance du pays (le 1er) et celle des Ancêtres (le 2), la première traditionnellement associée à la soupe joumou. Non, je ne vous en donne pas la recette, mais grosso modo, il s'agit d'une purée de courge à laquelle on ajoute de la viande et des légumes et dont la composition varie passablement d'une famille à l'autre. C'est excellent. Et une tradition séculaire, puisqu'on en fait remonter la tradition à l'indépendance haïtienne.

Pour nous, pas de soupe joumou, mais de la dinde, laquelle est aussi une tradition du temps des Fêtes en ce pays qui nous a vu naître. Mais de vous à moi, une dinde, même modeste, c'est de la viande, ça mes amis! De sorte que le menu pour les trois prochaines semaines est maintenant tout tracé d'avance!...

Pas grand nouveau en ce début d'année donc, mais quelques situations préoccupantes, moins sur la scène nationale que sur celle internationale. Personnellement et bien que je n'y comprenne pas grand-chose, je n'aime pas tellement ce combat de coqs entre l'Iran et les USA, car comme tous les combats de coqs, le vainqueur en sort souvent aussi amoché que le vaincu... Ce n'est pas une situation à prendre à la légère et je ne suis pas le seul à le croire : la question du jour de Cyberpresse nous interroge : «Croyez-vous que l'Iran entrera en guerre avec l'Occident cette année?» La majorité des réponses affirmatives en disent long sur la perception des gens comme vous et moi... On veut bien être optimiste, mais pas sans réalisme. L'avenir nous donnera tort ou raison, mais je le redis : présentement, c'est préoccupant.

Heureusement, dans le pays, ça ne va pas trop mal (pa pi mal en créole). Rien n'est vraiment plus facile ni mieux organisé, mais il est permis de croire, d'espérer que l'année qui débute sera bonne et axée davantage sur le progrès que sur les petites guerres de clocher. Là encore, l'avenir nous le dira. En tout cas pour le présent, on ne peut pas se plaindre car tout va assez bien. En plus et au cas où vous l'auriez oublié, nous sommes encore en congé aujourd'hui et c'est donc un jour très agréable par définition. Non, nous ne ferons rien de spécial pour souligner le congé mais un congé reste un congé, nous sommes d'accord sur le point. Une journée relaxe donc, même si nous en profitons pour accomplir quelques petites tâches qui méritent d'être faites et même si ce n'est que demain que le travail reprend son cours normal.

Et le cours normal, ça veut dire aussi le train-train habituel et la question qui le sous-tend : est-ce qu'on remet ça encore pour une sixième année? La question n'est pas nouvelle – nous nous la posons chaque année depuis cinq ans – mais sa réponse n'est jamais définie car on ne sait jamais au juste pourquoi nous restons. Il y a bien ceci et cela, mais est-ce suffisant?

Et puis de l'autre côté, on se dit : Pourquoi pas?

vendredi 30 décembre 2011

Fin d'année



Décembre tire à sa fin, et avec lui, l'année 2011. Pfft! Évanouie 2011! Partie en fumée! Pourquoi a-t-on l'impression que, au fil du temps, les années passent de plus en plus vite? Le tempo ne s'accélère pas pourtant et nous sommes de plus en plus familiers avec les structures de travail qui sont les nôtres, alors non, ce n'est pas le rythme trop rapide... Alors quoi? Je serais tenté de dire : l'âge. En effet et comme je l'ai déjà lu quelque part, la perception du temps est, semble-t-il, liée au vécu. En d'autres termes, pour un enfant de 10 ans, un an représente 10% de son vécu; il s'agit donc d'une période passablement importante. En revanche, pour quelqu'un qui arrive à 60 ans, ce n'est que 1/60e, soit même pas 2% du vécu, si bien qu'on a alors l'impression que c'est peu de chose... Je trouve que cette explication sonne juste et j'y vois la raison pour laquelle «on ne voit pas le temps passer», comme le chante Ferrat... En tout cas, 2011, c'est pratiquement fini et déjà, c'est l'heure des bilans.

Pour nous, ce bilan est assez simple à faire : malgré un début d'année agité – je veux dire : politiquement agité –, nous avons eu une bonne année, tant sur le plan professionnel que sur celui social. Quelques petits accomplissements nous ont permis de nous sentir utiles à notre tâche, et mes retrouvailles avec ma vieille amie sont certainement à marquer d'une pierre blanche. Pour le reste, eh bien nous n'avons pas été malades (le rhume ne compte pas, évidemment), nous n'avons pas subi de dommages matériels ou humains, nous n'avons pas souffert, nous avons consolidé nos acquits, bref, une bonne année. Comme les années se suivent (en plus de s'accumuler, je veux dire) et ne se ressemblent pas toujours, je pense qu'il faut savoir reconnaître et apprécier celles qui sont meilleures que les autres...

Si bien que nous voici maintenant à l'orée d'une autre année, celle dont plusieurs croient dur comme fer qu'elle marquera la fin du monde... Propos eschatologiques, s'il en est... Vu comme ça, en théorie, ça ne tient pas la route, mais que connaissons-nous des forces cosmiques qui sous-tendent l'équilibre de notre planète? Pas grand-chose. Alors sans faire fi de ce que nous dit la science, je pense qu'il faut tout de même rester conscient de notre fragilité...

Pour ma part, je trouve plus intéressant le fait que le thème de la fin du monde excite et soulève les passions que l'événement lui-même. Car en cas de catastrophe totale (style Knowing encore plus que 2012), personne n'aura vraiment l'occasion d'ergoter sur la chose... Tandis que le fait que des gens s'intéressent au concept, veulent y croire même, en dit long sur leur degré de contentement, vous ne trouvez pas vous autres? Ou bien c'est qu'au cœur de tout homme sommeille un nihiliste... En tout cas, nous aurons l'occasion de voir ce qu'il en sortira, même si ce n'est qu'en fin d'année (21 décembre) que l'on prédit le clou du spectacle...

Cette prévision alarmiste et apocalyptique mise à part, personne ne sait au juste de quoi sera fait 2012, mis à part le fait qu'elle sera bissextile. Mais on peut assumer sans grands risques que l'histoire continuera de s'écrire sur la voie qu'elle a empruntée dans le passé, particulièrement en 2011. Or, si vous avez un tant soit peu suivi l'actualité internationale, vous savez comme moi que l'un des faits marquants de 2011, c'est indubitablement l'éclatement du monde arabe. Des fois, on dit que ça va mal en Haïti, mais regardez un peu les pays arabes et dites-moi lequel est enviable... Bien sûr, les racistes diront que ce ne sont que des Arabes après tout, et que s'ils peuvent tous s’entre-tuer, on ne s'en portera pas plus mal. Je ne sais pas pour vous, mais moi, ça m'effraie passablement, des idées comme ça... Car ces gens sont aussi nos frères et nos sœurs. Ces gens aspirent aussi à un monde meilleur et à défaut de les soutenir dans leur lutte, je pense qu'il faut tout de même penser à eux, penser à leur inconfort et souhaiter que la paix s'installe à nouveau dans leur pays et qu'ils puissent y vivre dans la quiétude et la sérénité.

En tout cas, 2011 n'est qu'un jalon de plus sur la route du temps, un de plus, c'est vrai. Mais je pense qu'il faut se réjouir que l'année se soit relativement bien passée. Un peu de gratitude ne nuit jamais...

vendredi 23 décembre 2011

23 décembre



Plusieurs parmi vous connaissent cette chanson de Beau Dommage, évocatrice de Noëls passés, révolus, d'une autre époque : «23 décembre, joyeux noël monsieur côté! salue ti-cul on se r'verra le 7 janvier!» Le 23 décembre était en effet la date butoir de la fin de l'école et du début des vacances de Noël, comme on les appelait alors, lesquelles duraient effectivement jusqu'à l'Épiphanie, le 6 janvier. Donc, oui, l'école recommençait le 7 janvier ou après – jamais avant. C'était donc un beau congé, un congé qui en valait la peine et qui nous donnait même hâte de reprendre les cours lorsque arrivait le 7 janvier.

Aujourd'hui, 23 décembre, pour nous, c'est également congé, mais pour des raisons différentes : il fallait bien souligner les Fêtes d'une façon ou de l'autre et puisque tout le monde s'attend à quelques jours de congé, pourquoi pas maintenant? En fait, nous nous sommes entendus pour deux longs week-ends, l'un de quatre jours (23-24-25-26 décembre), l'autre de cinq (30-31 décembre,1-2-3 janvier). Nous reprenons donc nos opérations «normales» le mercredi 4 janvier 2012, dont plusieurs disent déjà que c'est l'année de la fin du monde...

Cependant et comme je le disais dans mon texte précédent, l'ambiance du temps des Fêtes n'est décidément pas la même sous les tropiques. En tout cas, ici en Haïti. Cela dit, il faut quand même admettre que cette année, l'effort pour souligner les Fêtes est clairement visible, conséquence évidente de l'injection de fonds supplémentaires – les 40 millions de gourdes dont je vous parlais précédemment. Je vous disais, entre autres, que les décorations ici sont habituellement modestes sinon inexistantes. Eh bien cheminant de par la ville ce matin, on pouvait en voir ici et là, et l'effet est, ma foi, assez réussi. Quant à la propreté urbaine, on voit toujours des gens balayer à droite et à gauche et l'activité commence à porter ses fruits. Comme quoi un peu d'argent change parfois le monde plus qu'on le croit...

Et on se prépare...

Les échafaudages qui porteront le prochain spectacle sont en place, les énormes baffles en disant long sur ce qui s'annonce. Car la fête, quelle qu'elle soit, ne se passe pas sans musique, tout le monde sait cela. Or ici, la musique, c'est strictement et culturellement dehors, peu importe le voisinage, peu importe l'heure, peu importe les goûts musicaux des gens que le spectacle n'intéresse pas : la musique prend le plancher et célèbre l'occasion. Il faut en prendre son parti...

Mais pour le moment, toute cette effervescence reste contenue dans cette avant-veille de Noël. L'heure est proche, mais ce n'est pas encore l'heure. C'est demain, la nuit de Noël...

L'heure est plutôt aux vœux de belles Fêtes, remplies de joie et de sérénité. C'est ce qu'on vous souhaite. Oubliez les cadeaux : la paix seule vaut son pesant d'or. La paix et l'amour. L'amour, bien sûr, s'il en reste quelque part dans le monde... 


vendredi 18 novembre 2011

Un autre congé


Aujourd'hui, c'est congé! Un autre, yééé! Mais celui-ci n'est pas bidon : l’événement historique qui le sous-tend le mérite amplement. Car il s’agit de la commémoration de la bataille qui a changé l’histoire d’Haïti en lui faisant accéder, quelques mois plus tard, à l’indépendance. C’était au début du 19e siècle. D’ailleurs, je vous réfère à Wikipédia sur le sujet, car bien que court, l’article situe bien l’événement et campe les protagonistes avec justesse, surtout Campois-la-Mort, dont la prestation héroïque a sans doute contribué à la reddition française. D’ailleurs, je vous cite Wiki, en anglais, cette fois, mais bon, je pense que vous allez vous y retrouver : "The Battle of Vertières marked the first time in the history of mankind that a slave army led a successful revolution for their freedom."

Mais ce n’est pas d’Histoire dont je veux vous parler aujourd’hui, pas de celle passée, mais bien de l’Histoire à venir, celle qui n’est pas encore écrite et qui, peut-être, fera beaucoup parler dans cent ans. Ou peut-être pas. On n’en sait rien, vu qu’elle n’est pas écrite… Mais il n’empêche que c'est en ce jour historique que le président Martelly a choisi de doter à nouveau le pays d’une armée. L’article de cyberpresse d'hier nous apprend, entre autres choses, que ce faisant, Martelly rompt avec une période de 17 ans sans armée, ce qui n’est quand même pas rien. Pourquoi une armée? Certainement pas pour faire la guerre, on s’en doute et Martelly lui-même s’en défend bien. Il s’agit d’une armée pacifique dont la fonction première restera de suppléer les forces onusiennes qui sont devenues une véritable épine au pied national et dont il faut se défaire «au plus sacrant», comme on dit par chez nous. Mais on ne peut pas faire ça brusquement, ce serait contraire aux règles diplomatiques les plus élémentaires, alors on se trouve une raison et comme ça, les susceptibilités sont indemnes. Si le président Martelly réussit à implanter une armée — ou en tout cas ce qui en tiendra lieu —, il pourra dès lors remercier publiquement les forces de l’ONU, la trop fameuse MINUSTAH, sans que personne n’y trouve à redire, car la nouvelle armée haïtienne s’occupera justement à faire le travail de l’autre. Quoi de plus naturel à ce qu’un pays utilise ses propres ressources humaines plutôt que celles du voisin?

Jusque là, ça va. Mais là où ça se gâte, c’est dans l’application pratique. Car le pays est bien fragile, tout le monde le sait, et les forces de l’ordre sont complètement dépassées par l’ampleur du travail à faire. La MINUSTAH ne fait pas de miracles de ce côté, mais elle contribue justement au maintien minimal de l’ordre, évitant les grands dérapages qui pourraient ébranler le pays plus que le dernier séisme. La nouvelle armée pourra-t-elle remplir ce rôle? Pas vraiment, et pas par manque de courage comme par manque de moyens matériels. Et d’entraînement des recrues, bien entendu. Or ces choses coûtent cher. Très cher. Non, je n’ai pas de chiffres à vous donner, mais tout le monde sait qu'une armée équipée représente un investissement colossal. Forcément. Alors on peut se poser la question : mais où prendra-t-on l’argent pour supporter cette armée? Comment peut-on penser que l’État haïtien pourra simplement payer ses militaires alors que les enseignants voire les médecins passent souvent des mois sans toucher leur salaire? Or, que fait une armée sans solde? Elle se fâche, prend ses armes et les met à la tempe de son patron. En tout cas, c'est un peu le portrait de l’histoire de l’armée en Haïti et la raison pour laquelle Aristide avait choisi de la démanteler en 1995 : il avait eu sa leçon... Alors je ne sais pas pour vous, mais pour moi, je vois dans l'instauration de cette nouvelle armée, un certain risque, risque que la MINUSTAH, malgré toutes ses faiblesses, n’a jamais pu représenter...

Mais tout comme le "Delendae est Carthago" de Caton, le moto du pays c'est «La MINUSTAH dehors», ce que tout le monde appuie sans réserve, semble-t-il...

mardi 1 novembre 2011

La Toussaint



Aujourd'hui, c'est la Toussaint. Si vous me lisez un tant soit peu et si vous êtes un tant soit peu attentif à ce que vous lisez, vous le saviez parce que je vous l'avais annoncé le jour de l'Action de Grâce : Toussaint = congé. Ce serait déjà suffisant pour se réjouir (car quoi que les mauvaises langues en pensent, nous vivons dans une structure de travail et un congé s'apprécie toujours, même en Haïti), mais il y a plus. Car la Toussaint, les amis, c'est une fête bien spéciale qui mérite notre attention. En effet, je viens tout juste de découvrir (merci Wikipédia) que  
«Elle est dédiée à tous les saints. "Cette célébration groupe non seulement tous les saints canonisés, c’est-à-dire ceux dont l’Église assure, en engageant son autorité, qu’ils sont dans la Gloire de Dieu, mais aussi tous ceux qui, en fait et les plus nombreux, sont dans la béatitude divine". Il s’agit donc de toutes les personnes, canonisées ou non, qui ont été sanctifiées par l’exercice de la charité, l’accueil de la miséricorde et le don de la grâce divine.»
 «Exercice de la charité, accueil de la miséricorde»... vous ne trouvez pas que ça me ressemble vous autres? Bon, je sais, il manque le don de la grâce divine et la reconnaissance papale, mais bon, on naît pas tous saints, n'est-ce pas? Il faut s'y astreindre, se forcer et y mettre le temps. Peut-être un jour, quand je serai vieux... Non mais franchement, en connaissez-vous, vous autres, des jeunes saints? On connaît plus aisément les jeunes seins, semble-t-il... Bon je blague, je le reconnais...

Mais le plus drôle, c'est que, vu sous l'angle présenté ci-dessus, l'on peut aisément reconnaître les saints, les saintes, tout comme on reconnaît aisément les artistes : à leur œuvre. Remarquez que tous les artistes ne sont pas saints, tout ceints qu'ils soient de leur art (oui, je sais, elle était facile, mais irrésistible...). Mais les deux sont mus par cette même poussée qui force à sortir de soi, l'un pour créer, l'autre pour soulager. L'effet est similaire : la catharsis déconstipe, porte ses fruits, humanise. En un mot comme en mille, ça fait du bien.

Remarquez que vue comme ça, la sainteté devient moins rattachée à une religion, et davantage axée sur l'humain. J'ai déjà dit quelque part dans ce recueil de textes, que je n'étais pas trop impressionné par ce qu'on appelle parfois, non sans cynisme, «l'odeur de sainteté». Il faut dire que l'expression s'applique trop souvent hélas à des personnes qui n'ont rien à voir avec la sainteté, mais qui s'en réclament parfois ouvertement. Style : voyez comme je suis saint! À se demander s'ils sont simplement sains d'esprit, tiens... Mais il y a cette arrogance, cette supériorité de ceux – et j'insiste ici sur le genre masculin – qui se pensent en odeur de sainteté, alors qu'ils puent la médiocrité et l'hypocrisie...

Cela dit, ce qui m'intéresse dans cette fête, c'est qu'elle n'est pas que dédiée aux saints répertoriés, catalogués et décédés depuis des années, voire des centaines d'années, mais aussi aux autres, aux bonnes personnes qui mènent une bonne vie et qui ne sont pas encore mortes... Car il ne faudrait quand même pas confondre la fête des Saints avec celle des Morts, demain... Celle-là, je vous en reparle un de ces quatre, mais pas demain, tout de même...

Et pour terminer, cette explication, toujours tirée de l'article sur Wikipédia, qui vaut ce qu'elle vaut de la raison du congé :  
«Lors de la période de Toussaint, toute la famille paysanne, y compris les enfants, était rassemblée pour récolter manuellement la pomme de terre. Durant cette récolte qui ne s’applique que pour l’hémisphère nord, de nombreux enfants manquaient à l’école, d’où l’instauration progressive de vacances de Toussaint jadis appelés "vacances patates"» .
En ce qui concerne ma tendre compagne, elle voterait plutôt pour des «vacances patates pilées», si ça se faisait...

lundi 10 octobre 2011

L'Action de grâce


Le jour de l’Action de grâce. Je n’ai pas besoin de vous dire ce qu’il représente, n’est-ce pas? Ni ce qu’il signifie en termes de congé stratégique… Stratégique en ce sens qu’il représente le dernier congé avant les Fêtes, un dernier clin d’œil à l’été qui n’est déjà plus. Mais pas pour nous. Car ce congé n’existe pas en ce pays. Et d'ailleurs, pourquoi existerait-il, je vous le demande? J’ai tout de même tenté d’en expliquer la raison d’être à mes gars, ce matin, me disant que l’idée de rendre grâce à Dieu pour de bonnes récoltes allait sûrement leur plaire et leur montrer que, tout consommateurs matérialistes que nous soyons au Canada, nous savons quand même dire merci. Mais voyant leurs visages polis, j’ai vite compris que quelque chose clochait dans mon exposé… Rendre grâce, oui, ça va, ça se comprend bien; mais rendre grâce pourquoi? Ici, l’on récolte toute l’année durant! Pourquoi devrait-on le faire à un moment plutôt qu’à un autre? Ici, il suffit de planter pour récolter. Pas besoin d’en faire tout un plat! Quand j’ai compris que c’était là mon problème, j’ai tenté de me lancer, une fois de plus, sur la rigueur de nos hivers qui mettent la nature en dormance pour un bon ti-temps, quand même, empêchant toute possibilité de cultiver la terre et d’en tirer une quelconque pitance. D'où l'importance de remercier quand les récoltes sont finies! Mais ce fut en vain. Comme toujours, j’ai l’impression de passer à côté. Ça semble inimaginable. Comment un pays qu’on sait riche peut-il être paralysé à ce point pendant une si longue période? On parle de novembre à avril, là. Minimum! Comment font les gens pour manger? Pour se déplacer? Pour vivre? Et il me semble que plus je tente d’expliquer, plus je m’enfonce dans des explications qui ne tiennent pas la route. D’où les visages polis, vous l’avez deviné… En tout cas, voyant que rien n’y ferait, j’ai préféré parler de l’importance du congé, le dernier avant Noël et là, tout le monde a compris, non sans s’étonner que la Toussaint ne soit pas un congé férié en ce pays nordique qui est le nôtre… Car ici, si l’on passe outre à l’Action de Grâce, on n’y perd pas au change : le 17 octobre marque l’anniversaire de la mort de Dessalines, un héros de la révolution. Un congé important, donc, férié et chômé. Puis il y a la Toussaint et la Fête des Morts, les 1er et 2 novembre, si vous vous souvenez… Et pour finir, le 18 novembre, on célèbre l’anniversaire de la Bataille de Vertières, événement déterminant dans l’histoire de ce pays. Donc, vous le voyez, nous ne sommes pas en reste et nous aurions tort de nous plaindre de ne pouvoir profiter du congé de l’Action de grâce… Mais la dinde traditionnelle est une tout autre affaire.

Personnellement, j’aime bien les traditions culinaires. Et il faut voir ici le menu traditionnel de l’Action de grâce, version américaine pour se mettre immédiatement à saliver, un peu comme le chien de Pavlov quand son maître lui brûlait la patte… Car si la dinde y trône en reine, elle est drôlement bien accompagnée : soupe de potiron, œufs mimosa (que je connais davantage sous le nom d’«œufs farcis» et qui sont tout à fait délectables), pommes de terre en purée (non mais dites-moi : y’a-t-il rien de meilleur que des bonnes patates pilées?), sans compter les desserts que je vous passe. Bref, un festin, et pour les festins, eh bien là, nous sommes d’accord!

En tout cas, le congé, votre congé, mérite qu’on le célèbre. Qu’on en profite. Qu’on le passe au dehors tandis que cuit cette dinde aux effluves presque indécents… Puis qu’on partage, autour d’un verre de vin, la douceur de cette journée d’automne, l’une des dernières avant que l’hiver frappe à vos portes…

Lisez-vous de l’envie? Eh bien je ne le cache pas, je passerais bien cette fête en agréable compagnie dans l’air vivifiant de ce début d’automne… Mais hélas! À l’impossible, nul n’est tenu, n’est-ce pas? Alors je fais avec la pluie qui nous tombe dessus et qui assombrit la journée et l’humeur… Un peu comme Verlaine lorsqu’il disait : « il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville »…

Mais pour nous, les jours ensoleillés seront vite de retour, tandis que pour vous, ben faudra prendre patience…

vendredi 22 avril 2011

Good Friday


Je vous ai déjà parlé du Vendredi Saint, qu'on appelle incidemment «Bon Vendredi» en anglais (Good Friday) pour une raison que j'ignore. Pour moi, tous les vendredis sont bons. Il est vrai que celui qui est férié l'est encore plus, pour une raison évidente. Le travail, qui ici n'arrête jamais, vous le savez bien maintenant, ralentit à en devenir une activité relaxante. Ainsi, les gars repeignent la cuisine de la résidence (qui en avait bien besoin) et les infirmières veillent sur un hôpital vide... Ma co-directrice fait ses comptes et moi, ben moi, je ne fais rien, comme il sied à un directeur en congé. Ce qui, incidemment, me donne l'occasion de vous divertir un peu par la lecture de ces propos sans sens, mais non insensés.

Vendredi Saint donc, belle occasion pour les religieux de tout acabit de profiter de la crédulité populaire pour renflouer leurs coffres souvent vides et surtout, surtout de sermonner. Car ici, on aime ça les sermons : ceux qui les font autant que ceux qui les écoutent. Et je dis bien écouter, pas seulement entendre. Car les gens, même lorsqu'ils écoutent la radio, écoutent si attentivement que c'en est surprenant. Ils écoutent n'importe quoi, surtout à la radio, et gobent tout, l'appât, l'hameçon, la ligne, tellement ils aiment écouter quelqu'un parler. Je ne sais pas pour vous, mais personnellement, rares sont les discours qui m'accrochent au point que j'en oublie le temps qui passe. C'est arrivé, je l'admets, mais pas souvent. Mais ici, tout discours mérite l'attention révérencieuse d'un auditoire varié, ce qui bien évidemment amène souvent de bien piètres locuteurs à en abuser. Mais bon. Le discours de l'un, c'est le passe-temps de l'autre...

Mais pour l'instant, tous ces beaux discours vides se sont enfin tus, laissant la place à un silence qui nous sied tout à fait. Ils vont sûrement reprendre de plus belle en fin de journée. Les discours à saveur apocalyptique (je n'ose ici parler de sermons) et aussi, ne l'oublions pas, les chants. Aboyés à tue-tête dans des micros amplifiés au-delà du raisonnable, ils sont d'un faux qui fait mal mais qui, pourtant, ne semble incommoder personne dans l'assistance : après tout, ces chants ne partent-ils pas de l'âme? Pourquoi faudrait-il que l'âme sonne juste à l'oreille? Seule compte la puissance sonore et de ce côté, vraiment, rien à craindre.

Mais tout cela n'entrave en rien le congé du Vendredi Saint qui, toutes considérations religieuses mises à part, fait bien l'affaire de tout le monde. Un congé est toujours bienvenu, mais le vendredi est d'autant plus agréable qu'il prolonge en la débutant la fin de semaine. Remarquez que le même phénomène se passe lorsqu'un congé tombe le lundi, mais pour je ne sais quelle raison, le sentiment du long week-end n'est pas le même. Ou me trompé-je?

En tout cas, bon congé de Pâques! Good Good Friday!

mercredi 12 janvier 2011

Je me souviens


Que faisiez-vous le 12 janvier 2010 vers les 17h? Vous ne vous en souvenez pas, n'est-ce pas? Ce n'est pas surprenant. Ce n'est pas dans votre cour que la terre s'est mise à valser. Le 12 janvier n'a rien d'un jour spécial, il n'y a pas de fête, les saints du jour sont d'illustres inconnus (Arcade, Benoît, Césarie... selon Wiki) et avant ce fameux séisme, il n'y avait pas d'événement qui retenait vraiment l'attention.

Tout comme Chantal Guy, je n'ai pas envie de vous parler de ce 12 janvier, des drames dont nous avons été témoins et de la misère qui s'en est suivie. Les médias sont tellement meilleurs pour vous montrer l'atroce, le terrible et le catastrophique, alors gorgez-vous de télé et je suis sûr que vous allez être replongés dans cet enfer mieux que si vous y étiez. Plus confortables, en tout cas. Mais pour se souvenir, ça oui, il faut. Et c'est ce que tout le monde fait aujourd'hui dans le pays, nous donnant ainsi un autre répit politique que nous apprécions. (On dit que les résultats définitifs sortiront au cours du prochain week-end. Notre sursis tire à sa fin, semble-t-il...) Aujourd'hui, dans une ville déserte où tout est fermé (et nous de même, cela va de soi), on se sent en paix. Drôle. La paix assis sur un baril de poudre... Mais tant que personne ne s'allume, où est le problème? Donc on se remémore. À la radio, des témoignages, certains assez émouvants. Des gens qui, en quelques secondes, ont vu leur univers basculer dans un trou sans fond. Et tac! Plus de maison, plus de voisins, plus de voiture, plus de rue... Pas une guerre ne peut faire autant de dommages en aussi peu de temps. Humains et matériels. Non, ce ne fut pas un record de tous les temps, mais une performance tellurique tout à fait respectable, reconnaissons-le. La terre éternue, les humains en sont les postillons...

L'occasion aujourd'hui n'est pas uniquement de se souvenir de ce jour funeste, mais aussi, peut-être même surtout de prendre conscience de notre fragilité, de notre précarité dans un monde que l'on veut pourtant stable et prévisible. La terre, là où reposent nos pieds, est fragile. Instable. Et vulnérable. Et il ne faut pas qu'elle frissonne ou qu'elle tousse trop fort pour que nous en fassions les frais. Et j'ai comme l'impression que notre planète n'est pas tellement en santé, qu'elle couve quelque chose et que nous risquons fort d'y goûter sérieusement le jour où elle nous piquera une crise...

Nous n'avions jamais vécu de tremblement de terre. Et au risque d'en décevoir plusieurs, ce ne fut pas du tout pour nous une expérience traumatisante. Inquiétante, inconfortable, déstabilisante, oui. Mais pas traumatisante. Autour de nous, rien ne s'est écroulé, personne n'est mort écrasé sous des décombres, on n'a pas vu de sang ou de bouts de jambes dépasser d'un toit affaissé, bref, pas de trauma psychologique ou physique. Mais l'expérience a laissé une impression inaltérable, une angoisse qui a persisté bien après que la terre se soit calmée et ait repris son souffle.

Alors se souvenir? Ça oui, on s'en souvient.

jeudi 6 janvier 2011

Un pas à la fois


Épiphanie. On ne sait plus vraiment ce que le mot veut dire, hein? Eh bien laissez-moi vous éclairer : une épiphanie, c'est simplement une apparition, en l'occurrence celle de Jésus aux rois mages. Il n'était pas disparu, le petit Jésus, mais pour les rois mages qui sont arrivés en retard, ce fut comme une apparition, j'imagine. Ou bien il y a une autre explication que je ne connais pas. Alors voilà pour la leçon de religion. Les nostalgiques se souviendront du gâteau des Rois, dans lequel on dissimulait une fève et un pois, le premier pour la reine, le second pour le roi. Et la couronne suivait. Pas une grosse fête, mais une fête quand même : tout était bon pour un congé, hein?

Eh bien justement, parlant de congé, nous en sommes aujourd'hui. Et non, pas en raison de l’Épiphanie, mais plutôt en guise de protestation solidaire avec tous les établissements publics de la ville contre l'inertie de la police face aux bandits armés qui sont en train de faire ce qu'ils veulent en ville. Je vous ai parlé dans mon dernier texte de ce commerçant qu'on a froidement assassiné samedi dernier. Eh bien l'événement a choqué. A suscité une colère tout à fait justifiée chez le peuple en général et les marchands en particulier. "Hier c'était lui, demain ce sera qui?" Question judicieuse, s'il en est une...

Mais ce n'est pas de cela dont je veux vous parler, ni même du résultat de ces fameuses élections qu'on attend toujours d'un jour à l'autre avec toujours la même inquiétude. Je vous en reparlerai quand ça éclatera. Aujourd'hui, je veux partager avec vous un article qui, dans le noir univers de tout ce qui va mal au pays, jette un rayon de lumière : celle de l'espoir. L'article s'intitule en effet "Why There Is Hope For Haiti"

En substance, l'article nous dit d'abord que les pertes humaines dues au tremblement de terre ont été terribles, tout le monde le sait. On peut croire à priori que les pertes économiques seront à l'image des pertes humaines, vrai? Faux. S'appuyant sur des données historiques, l'auteur nous apprend que les pays ayant souffert les pires catastrophes naturelles se retrouvent, 10 ans plus tard, au même point de développement économique que s'il n'y avait pas eu de catastrophe. Pourquoi? Parce que, dit-il, la valeur du développement à long terme est davantage liée au développement institutionnel qu'aux infrastructures. Donc, et bien que ce ne soit pas dit explicitement, Haïti dans 10 ans sera la même que si le tremblement de terre n'avait jamais eu lieu. N'est-ce pas beau, ça?

Deuxième point : entre 1950 et 2002, le revenu annuel moyen du pays est passé de $1,051 à $752 (!), conséquence de la corruption massive, entre autres facteurs. Voyant cela, si Haïti, dit l'auteur, réussit à seulement demeurer à son niveau de pauvreté actuel, on pourra considérer qu'il s'agit d'une amélioration. Optimiste, moi j'aime ça comme ça!

Enfin, malgré la modeste injection d'argent de la part de l'État dans les services publics -- on parle de dépenses de l'ordre de $530 millions pour une population de 9 millions (avant le séisme), soit moins de $60 par personne --, la mortalité infantile a décliné radicalement passant de 22% à 8% chez les enfants de moins d'un an; de plus, l'espérance de vie est passée de 42 à 61 ans entre 1960 et 2008. Quand même significatif, n'est-ce pas?

En conclusion, l'auteur nous rappelle qu'avant le tremblement de terre, il y avait progrès dans le pays -- j'en témoigne personnellement --, même si c'était un progrès modeste. "Au regard de l'économie chancelante du pays et de sa constante instabilité politique, [ce progrès] n'est rien d'autre qu'un miracle et la preuve qu'après tout, il y a de l'espoir pour ce pays si malchanceux." (traduction libre)  Bref, un excellent article que je ne saurais trop vous recommander. Et c'est bien dommage pour ceux ou celles qui ne lisent pas l'anglais. En fait, je vous parle tellement d'espoir dans ces textes et je me sens tellement seul dans ce discours que ça m'a fait du bien de lire ce qu'un monsieur bien renseigné avait à dire sur la question. Ce n'est certes pas demain que Haïti se sortira du trou profond dans lequel il se débat. Mais Haïti n'abandonnera jamais. Tout comme Sisyphe et son rocher, le pays continue d'avancer à petits pas, de se reconstruire ti-pay, ti-pay (lire ti-paille), c'est-à-dire un petit brin d'herbe à la fois, mais sans jamais désespérer. Et Haïti, ben c'est le peuple, hein, ne l'oublions pas!

Allez! Une bonne Prestige à la santé du pays, tiens!

jeudi 3 juin 2010

Fête-Dieu


Aujourd'hui, c'est congé. Un congé à saveur religieuse, soit, mais un congé reste un congé, pas vrai? Et puis dans la culture à forte teneur catholique de ce pays, il s'agit d'un congé important puisqu'on parle aujourd'hui de la Fête-Dieu. Son nom officiel (déniché sur Wiki) est «Solennité du corps et du sang du Christ». Un peu long comme nom, vous en conviendrez, alors on va continuer à parler de la Fête-Dieu, si vous n'y voyez pas d'inconvénients. Comme Pâques, auquel elle se rattache, la Fête-Dieu est variable d'une année à l'autre, mais tombe 60 jours après la grande fête de la résurrection, toujours un jeudi et  presque toujours en juin, ce qui est bien, car il y a peu de jours de congés au cours de ce mois qui pourtant, devrait au moins célébrer le solstice d'été, tout comme Noël permet de fêter celui d'hiver. Alors ce congé est le bienvenu. Mais je vous cite l'extrait de Wikipédia concernant la création de cette fête, parce que c'est tellement cute : «C'est en grande partie à Julienne de Cornillon que l'on doit la Fête-Dieu: à partir de 1209, elle eut de fréquentes visions mystiques. Une vision revint à plusieurs reprises, dans laquelle elle vit une lune échancrée, c'est-à-dire rayonnante de lumière, mais incomplète, une bande noire la divisant en deux parties égales. Elle y vit la révélation qu'il manquait une fête dans l'Église.» Non, mais c'est-y pas beau ça? Des fois, on se demande comment l'Église catholique aurait évolué sans ces visionnaires et ces mystiques...

Mais je reviens au jour de congé. Pour la plupart, c'est un jour de repos, mais pour nous, c'est une journée de travail léger. On peut prendre le temps de rattraper ce qu'on avait perdu en cours de route -- et je ne parle pas du temps car celui-là, on le sait, ne revient plus. Mais des petites tâches, quand même. La comptabilité du mois de mai, par exemple... Tout ça bien mollo, bien entendu...

Et pour le reste, comment va-t-on? Je dirais assez bien merci. Le fait est que nos petites vacances de mai nous ont requinqués, nous ont permis de recharger nos batteries et de retrouver la résistance que nous avions épuisée depuis le fameux tremblement de terre. Et nous voilà déjà en juin. Juin s'accompagne habituellement d'un accroissement de la chaleur et de l'humidité et correspond aussi au début de la saison des ouragans, laquelle, comme je vous l'ai déjà dit, s'annonce intense cette année, surtout, lit-on, si la Nina se développe. El Nino, La Nina, tout ça c'est bien joli, mais ça ne nous avance pas à grand-chose quand un cyclone se dirige vers nous... En tout cas, nous aviserons en temps et lieu.

Les activités de notre petit hôpital ont repris leur cours normal, si je puis dire, et les Brésiliens continuent de nous gratifier de leur visite une fois par mois. Enfin, Port-au-Prince est relativement calme, malgré les manifestations qui ont eu lieu la semaine dernière et qui ont perturbé passablement les activités de la capitale. Mais au point où elles en sont, ce n'est pas une petite manifestation qui changera les choses... Ce qui ne veut pas dire que nous pouvons en rester là. Les gens sont vraiment dans la misère noire, et croyez-moi, le qualificatif n'a rien d'un calembour facile...

Donc, on suit le cours du temps, tirant parti de ce que le pays nous offre, dont ce petit congé qui, depuis belle lurette, n'est plus célébré dans le pays qui nous a vus naître.


Et pour en finir avec la Fête-Dieu, je n'ai pas de photo personnelle d'un ostensoir à vous transmettre, mais comme je me souviens que c'était bien le plus bel objet liturgique qu'on mettait de temps à autre sous nos yeux pour qu'on l'adore, je vous passe celle de Broederhugo at nl.wikipedia. N'est-ce pas que c'est de toute beauté! Et sans vouloir amorcer une polémique autour de la religion, vous ne trouvez pas qu'adorer un objet en or, fût-il le réceptacle du corps du Christ, ça ressemble à de l'idolâtrie, vous autres? Car l'objet était certainement beaucoup plus attirant que l'hostie qu'il contenait, et j'imagine que c'était voulu, non? Un peu comme les jeunes filles aux formes opulentes en tenues légères qui posent pour les pneus Firestone ou autre, bref vous voyez le genre? Disons que les filles accrochent le regard certainement plus que les pneus... Quoiqu'un bon pneu, aux sculptures bien dessinées, c'est tout à fait artistique, vous en conviendrez, j'en suis sûr...

Ok, ok, j'arrête. Vous allez dire que je déraille, que le soleil me porte à la tête ou quelque chose du genre, alors que la vérité est pourtant toute simple : c'est la Fête-Dieu et c'est jour de congé! Vous ne le saviez pas?

samedi 3 avril 2010

Vendredi Saint (hier)


Vendredi Saint. Oui, je sais, c'était hier. Mais c'est aujourd'hui que je vous en parle. Et pourquoi pas? Je voulais que ce vendredi traditionnellement spécial le soit pour nous aussi. Le congé, c'était déjà ça. Alors j'ai décidé d'ajouter le congé d'écriture. Pour le reste, petite journée tranquille. Rien pour s'exciter. Non, nous n'avons pas jeûné, n'avons même pas fait maigre, puisque le vendredi est, au contraire et dans notre courte tradition à nous, jour de malbouffe. Volontaire, oui. Et pourquoi pas? Un peu de radicaux libres ne font certes pas menu-santé, mais avec de la moutarde de Dijon, ça passe très bien là où ça passe... Quant à la poutine, je n'ai pas besoin de vous dire le succès qu'elle remporte, et même, à ce qu'on dit, au-delà des frontières du Québec, maintenant... Tout ça pour vous dire qu'on n'a pas fait grand-chose, à part écouter des films...

Et justement, l'occasion le voulant, nous avons écouté pour la première fois la Passion du Christ, ce film tant controversé de Mel Gibson. Oui, je sais, vous allez me dire qu'on est en retard dans nos nouveautés cinématographiques--le film est sorti le Mercredi des cendres 2004, soit six ans plus tôt--mais on n'avait pas eu l'occasion de le visionner. On aurait pu, mais bon, va-t-on voir un film sur la passion du Christ en d'autres circonstances que celles que le film veut nous rappeler? Que non! Donc, on a écouté le film. Évidemment, écouter est une image, parce que étant tourné en araméen, hébreu et latin, disons qu'on ne comprend pas grand-chose à ce que disent les protagonistes. Mais les images valent mille mots, tout le monde le sait, et à 24 images à la seconde, fois 126 minutes, ça donne le joli total de 181,440 images, ce qui ferait un très long discours, arrangez cela comme vous le voulez! De toute façon, ce ne sont pas les mots qui importent dans ce film, vous l'aurez deviné ou constaté, selon que vous l'avez vu ou non, mais les images. Dures, les images. Comme film violent, difficile de faire plus... Je ne veux pas dire mieux, car je ne sais pas si plus serait pire ou meilleur. Oui, Jésus s'est fait taloché joliment avant qu'on le plante sur la croix, nous le savons tous et toutes, mais je ne suis pas convaincu que le spectacle haut en couleurs (beaucoup de rouge, de mauve et violet) de cet épisode vaut le détour. Moi, si j'étais Jésus, je dirais: "Franchement, les copains, ce n'est pas ça le message que je voulais vous transmettre." Je vois mal Jésus faire un show de sa passion... Surtout que le film a coûté $30 millions, sortis de la poche de Gibson lui-même, mais a rapporté la coquette somme de $611,899,420, ce qui représente tout de même un profit respectable pour le sieur Gibson. On me dira que ce n'était pas l'objectif du film, mais pour ma part, je n'en suis pas si sûr. Le cinéma est une industrie, ne l'oublions pas... En tout cas, c'est certainement un film bien ficelé, mais nous, on va pas le réécouter, c'est clair.

Et ici? Ben ici, ce fut Vendredi Saint, avec ses cérémonies traditionnelles (la célébration de la Passion dure un bon trois heures et les églises sont bondées, on s'en doute) et la tranquillité de circonstance. Rien pour s'énerver ni pour nous énerver.

Aujourd'hui samedi, c'est journée normale, les activités normales reprennent et tout rentre dans l'ordre. Bonne nouvelle pour nous et nos patients, cependant: une équipe de Brésiliens vient tout juste d'arriver pour la semaine. Je vous en reparle...