dimanche 29 avril 2012

La valeur de l'aide


Aujourd'hui, je passe sur les événements du Québec. Aujourd’hui, je veux plutôt commenter la nouvelle du passage d’un prof de sciences économiques à l’UQAM à Port-au-Prince et des propos qu’il y a tenus. Car ce sont des propos osés mais qui sonnent justes à mon oreille de non-spécialiste. En deux mots comme en mille : l’aide internationale n’aide pas vraiment. Pas parce que l’argent n’arrive pas à destination, comme je le croyais avant de lire l’article et comme vous le croyez sûrement : simplement parce que l’aide crée une forme de dépendance qui, en bout de ligne, nuit au développement durable. Je vous invite à lire l’article, car je n’ai pas l’intention de vous redire ce qui s’y trouve fort bien dit, à savoir : les exagérations pour obtenir l’aide, la corruption qui s’en suit, la dépendance qu’elle crée, et j’ajoute, l’apathie et le fatalisme qui en font partie sans oublier bien sûr l’ingratitude. En fait, ce que l’aide internationale accomplit, c’est une infantilisation de la population haïtienne. Ça, ce n’est pas dans l’article, mais c’est mon avis tout de même. Et je vous cite la conclusion qu’on attribue au professeur en question : «Il ne faut pas compter sur l'aide. Le développement ne peut venir que de l'intérieur d'un pays qui se mobilise.» Or, c’est précisément ce que l’aide empêche, la mobilisation du pays. Et la chose se comprend aisément si l’on prend un exemple concret.

Vous vous cassez le pied. On vous met dans le plâtre et on vous prête des béquilles pour que puissiez néanmoins vous déplacer. La cheville guérit, mais vous avez peur de recommencer à vous porter sur le pied estropié, alors vous prolongez la période béquilles parce qu’elle constitue un moindre mal. Or, il faut oser remarcher pour se rendre compte que les béquilles ont fait leur travail et qu’elles ne sont plus nécessaires. Mais le problème c’est qu’on s’y fait, aux béquilles… Et depuis le temps que le pays avance à l’aide de béquilles internationales, on comprend qu’il devienne presque impensable de faire autrement… Et pourtant…

Pourtant, les béquilles fournies depuis le tremblement de terre ont fait leur travail : les gens étaient sans abri, on leur en a fourni; l’eau potable brillait par son absence, on en a distribué; les sanitaires n’existaient pas, on en a construit. Bref, on a aidé le peuple de la façon la plus simple qui soit : en leur donnant ce dont ils avaient un besoin immédiat. C’est d’ailleurs l’une des recommandations du prof de l’UQAM : «Une aide efficace est une aide qui est la plus directe possible, limitée dans le temps, coordonnée et qui mobilise les populations.» Mais alors, me direz-vous, que penser des organisations qui construisent écoles, hôpitaux ou orphelinats et qui s’implantent dans le pays à qui mieux mieux? Je dis qu’il y a là un danger de tomber dans le piège d’une immixtion dans des structures qui ne nous appartiennent pas, qu’il ne nous appartient pas de juger et encore moins de réformer. C’est là le rôle de l’État. Cela dit, rien n’empêche de lui donner un coup de main, en autant que l’État le demande et en reconnaisse la nécessité. C’était le cas après le tremblement de terre, ce l’est moins maintenant…

Si bien que vous voyez le paradoxe : l’aide se révèle souvent un remède pire que le mal qu’elle entend traiter et pourtant, sans aide, le pays vacille. Une situation pas facile pour laquelle le remède miracle, justement, n’existe pas.

Quant au Québec, c'est à se demander si ce n'est pas lui qui aurait besoin de l'aide internationale à l'heure actuelle pour se sortir d'un bourbier qui commence à sentir drôle...


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