mercredi 18 avril 2012

Les jeunes et les autres


Non, rassurez-vous, je ne remets pas ça. Enfin pas vraiment. Car j’ai beaucoup lu depuis mon texte sur les préoccupations québécoises et il est clair que le sujet est chaud et soulève les passions populaires des uns autant que des autres. J’aime assez. Certes il y a toujours le danger du dérapage majeur, mais le brassage d’idées fait du bien, surtout pour les jeunes.

J’aime les jeunes. Ceux et celles qui me connaissent le savent : j’aime les côtoyer, les provoquer, connaître leurs points de vue et les regarder aller. J’aime la jeunesse parce que c’est une belle période de vie dont je me souviens avec bonheur. Car oui, je me souviens d’avoir été jeune. Je me souviens d’avoir participé à des «manifestations» qui, si elles n’avaient rien de l’ampleur de celles qui ont récemment marqué l’Histoire du Québec, nous faisaient néanmoins sentir importants. Jeune, j’ai lu Mao Tsé-toung et Hô Chi Minh parce que je cherchais à comprendre. Mais je n’ai pas vraiment compris…

Dire que les jeunes d’aujourd’hui sont moins bien que nous étions est une totale aberration. Ils ne sont ni meilleurs ni pires. En fait et s’il est une chose, ils sont certainement mieux informés, ce qui ne les rend pas plus intelligents, mais certainement moins naïfs. Et les jeunes, ne l’oublions pas, sont des humains en devenir, car on ne reste pas jeunes, malgré tout ce que notre société hédoniste peut promouvoir dans ses images de jeunesse éternelle. Et ce sont les jeunes d’aujourd’hui qui composeront la société adulte de demain. Ils et elles seront ministres, journalistes, juges ou artistes, peu importe mais leur place au sein de la société en fera des rouages importants, voire essentiels à l’organisation sociale. Mais avant d’en arriver là, il faut que jeunesse se passe. Vouloir en faire des citoyens à part entière à ce stade me paraît prématuré, tout comme lorsqu’on pousse des enfants à l’école trop tôt. L’enfance est sacrée; l’adolescence et le jeune âge adulte le sont tout autant. Les jeunes ont des droits, mais ils ont aussi des devoirs, dont celui d'accepter les règles d'un jeu qu'ils ne sont pas en mesure de comprendre bien à fond. Avoir lu Marx ou Engels ne veut rien dire. Et je parle d’expérience personnelle. Pour apprendre la vie, il faut vivre, c’est aussi simple que cela.

Ici en Haïti, les jeunes sont majoritaires : l’âge médian de la population est de 20 ans tout juste. Quand éclate une manifestation, ce sont ces jeunes qu’on voit dans les rues; ce sont eux qui osent, qui tirent des roches ou des cartouches et qui «jouent au cowboy». Et dites-moi : quelle différence existe-t-il entre les jeunes Chinois, Haïtiens ou Québécois? «Quand on aime on a toujours 20 ans», chante Ferland. À 20 ans, on a la vie devant soi; on est prêt à tout; rien ne nous fait peur. J’aime ça et je me souviens de mes 20 ans. Et c’est dans cette foulée que je ne condamne nullement les jeunes du Québec de contester une décision qui ne fait pas leur affaire : j’aurais fait la même chose. Mais aujourd’hui, je suis vieux, enfin plus vieux (ce qui ne me rend pas pluvieux pour autant) et je vois les choses d’une certaine distance — en fait, d’une distance certaine — et si certains veulent faire sauter le gouvernement pour afficher leur supériorité intellectuelle, je ne suis pas preneur. Le plus mauvais gouvernement vaut mieux que pas de gouvernement du tout et le gouvernement parfait n’existe pas, sauf bien sûr en Utopie…

Alors oui, laissons les jeunes être jeunes, laissons-les se prendre pour Le Che ou pour des disciples de Mao ou de qui l’on veut, mais sans casse. Car c’est là qu’il faut mettre une limite. Pour ma part, je le reconnais, je crains les débordements, je crains les dérapages, je crains les inutiles affrontements, je crains les excès… Parce que je ne suis plus jeune, sans doute, mais aussi parce que je sais où les excès mènent et ce n’est jamais là où l’on croit…

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