mercredi 13 juin 2012

Des goûts et des couleurs...


Je n’en ai pas encore fini avec ma (modeste) montée de lait de dimanche dernier. Les commentaires reçus — et j’ajouterai : ceux non reçus encore plus — me disent à quel point je touche ici un sujet délicat. Car on parle ici d’idées et tout le monde veut bien avoir la sienne. Notons d’emblée que l’affaire des couleurs amène le débat encore plus près d’un match de boxe ou de tennis. D’un côté, les rouges, de l’autre, les verts : entre les deux, aucune nuance. Aucune demi-teinte qui, comme dans un arc-en-ciel, fondrait ces couleurs éclatantes en un pastel reposant. Non. Les rouges tirent à boulets… rouges (!) sur tout ce qui s’appelle autorité tandis que les verts… se mettent au vert, tiens… en attendant que les rouges s’essoufflent. Notons encore que si les verts sont, dans un autre contexte, associés à l’écologie et aux ressources renouvelables, les rouges rappellent les communistes, ces incarnations du diable...! Enfin et sans vouloir aller trop loin dans cette exploration de la symbolique des couleurs, le rouge, c’est la colère, la violence, le danger, le sang, tandis que le vert, c’est l’harmonie et la quiétude. Or, si je ne m'abuse, c'est le rouge qui a été initialement choisi : le vert n'en a été que la réponse. Dès lors, vider ce rouge de sa connotation violente et radicale me paraît illogique et un peu hypocrite. Par ailleurs, on comprendra que cette opposition des couleurs n’aide en aucune façon à établir un climat propre à la conciliation : les rouges ne peuvent reverdir et les verts sont loin de rougir de leur état, même s’ils en ont leur claque des crises écarlates. En d’autres termes, la rougeole n’est pas contagieuse ici… Enfin, pas vraiment…

Mais ce match use. La perspective se bouche et on se demande où cette petite guerre des nerfs aboutira. La chute du gouvernement? Peut-être. Peut-être pas non plus. Et dans ce dernier cas, que feront les rouges? Une crise d’apoplexie? Par ailleurs, en admettant que le gouvernement actuel chute, est-ce à dire qu’il sera remplacé par un gouvernement qui abolira toutes les iniquités sociales, qui distribuera l’argent comme des cartes à jouer et qui donnera à tous et à toutes du pain et des jeux? Est-ce vraiment ce que l’on croit? Est-ce l'idée qui meut et émeut les rouges? Est-ce vraiment une option plausible? Je vous laisse en décider.

Et l’idéologie là-dedans? Eh bien quoi qu’en disent certains ardents défenseurs de la position rouge, elle me semble bien cabotine, l’idéologie. Car le thème simple qui revient continuellement, c'est le désordre. On tape sur des casseroles, on chahute, on défie la police «pleine de pisse», on fait son petit anarchiste, son petit révolté, tout ça dans une ambiance qu'on veut légère et expressive, voire festive (ne me dites pas que ces seins nus ou le tintamarre des casseroles ne vous font pas sourire...) Cela m'a d'ailleurs rappelé les paroles de cette délicieuse chanson de Charlebois, le Révolté, qui date de 1973 et dont le texte est signé Réjean Ducharme. Je vous donne ici le dernier quatrain en raison de son actualité:
On me demande qui je suis,
Pourquoi je suis si révolté
En résumé, eh bien, voici
Je veux refaire la société
Peace and love
L.S.D.
Hurray, Hurray
Hippie, hippie, pourra
Certes les hippies ont disparu, mais pour le reste, qui n'a pas rêvé, à un moment ou à un autre de sa jeunesse, de refaire la société, d'en bannir les iniquités et de la rendre plus humaine? C'est pour cela qu'on ne peut condamner les jeunes et tous ceux, toutes celles qui les soutiennent : leur idéal est sain. Mais il y a une limite. Je ne dis pas que je sais où elle se trouve, mais il y a une limite, temporelle, spatiale, économique et philosophique et je pense qu'il serait bien que ceux qui voient la vie en rouge le sachent. Mourir pour des idées, c'est noble, vu comme ça, mais comme le chante si bien Brassens, y'a pas d'urgence en la demeure...
Mourir pour des idées, l'idée est excellente
Moi j'ai failli mourir de ne l'avoir pas eue
Car tous ceux qui l'avaient, multitude accablante
En hurlant à la mort me sont tombés dessus
Ils ont su me convaincre et ma muse insolente
Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi
Avec un soupçon de réserve toutefois
Mourons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente.
Voilà pour mon grain de sel. Je n'y reviendrai plus, c'est promis. Je me contenterai désormais d'attendre que le temps fasse son œuvre et que la poussière retombe. En passant, voyez sur la photo comme le rouge et le vert se marient bien...

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