samedi 19 novembre 2011

Refait!


Je remonte. Doucement, je refais surface. Prise dans les brumes fébriles, ma pensée errait, sans fil conducteur, sans énergie, sans tonus. Mais aujourd'hui, ça va mieux. La tête me tourne toujours un peu, mais pas trop et l'horizon ressemble à ce à quoi un horizon doit ressembler : une ligne horizontale relativement fixe. La descente au purgatoire s'achève, les muqueuses se replacent, la fièvre se dissipe, la pensée se réorganise. Bref et comme on dit en créole «m'refè», me voilà refait... ou presque.

Si vous n'avez pas deviné, je vous parle ici de ma dernière chute rhinovirale, mieux connue sous le nom de grippe. Malade, votre auteur préféré! Oh pas au point d'en faire tout un plat – vous connaissez mon stoïcisme, maintenant –, mais suffisamment pour altérer mes journées habituelles, suffisamment pour que je me retire même dans mes quartiers privés pour faire un petit somme en pleine journée, c'est vous dire...

«Une vraie grippe d'homme?», m'a demandé avec une malicieuse compassion (!) l'une de mes proches. Une grippe d'homme? Hmmm... Je ne sais pas pour vous, mais j'ai cru déceler dans la formulation une certaine ironie, comme si une «grippe d'homme» n'était en bout de ligne qu'un motif à raillerie, comme si nous, les hommes, faisions exprès pour être malades afin d'attirer la commisération féminine. Ce que ma chère compagne a, de son côté, confirmé sans hésiter : une «grippe d'homme», ce ne peut être qu'une grippe de «moumoune». Pour les non-Québécois, je précise que «moumoune» est un péjoratif pas trop méchant, mais sur le modèle de la suffixation en -oune, rien pour être fier. «Ti-coune, ti-zoune, toutoune, bouboune (non, ça c'est créole), poupoune, nounoune...» ont tous la même connotation moqueuse et quelque peu condescendante. Donc, une grippe de «moumoune», ce n'est pas une grippe qui mérite qu'on s'y attarde. Et vlan!

Or, il me semble qu'en ces pénibles occurrences où la santé s'étiole, un peu de compassion – authentique, je veux dire – serait de mise. Même pour nous, mâles imperturbables dans l'adversité. Un sourire bienveillant, un baiser tendre sur la joue (attention au virus, quand même), un regard attendri... un rien suffirait! Mais hélas!... On nous nourrit d'ironie...

Heureusement, mes compagnons haïtiens, eux, comprennent la nécessité de compatir. Un peu trop sans doute, mais bon, rien n'est parfait, vous le savez trop bien. Mais ils sont là, me retiennent la main qu'ils viennent de serrer (!) en me demandant comment je vais et en m'enjoignant de me soigner, de prendre du repos et de boire du thé amer. Oui, oui. Du thé amer. C'est, paraît-il, la panacée bien connue contre ce mal inévitable. Le remède qui vous remet sur pied en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Je n'ai pas osé demander ce qu'un thé sucré pouvait faire comme différence, car ici, on ne rit pas avec les médications : on les suit rigoureusement. Peut-être l'amertume suffit-elle à purger le mal?... Car enfin, qui voudrait d'un thé ou d'un café sans sucre? (Nous mis à part, bien entendu...) Donc, le thé amer... Que je n'ai pas pris, je le confesse ici, préférant m'en remettre au vin rouge qui lui, a fait ses preuves dans le passé et ne se dément pas. Mais bon, on ne peut tout de même pas débuter la journée au vin rouge, hein? Alors j'ai souffert, stoïquement je le redis, en attendant que les muqueuses se replacent et que l'homéostasie retrouve ses paramètres habituels. Et ça s'en vient, là. Pas encore tout à fait terminé, mais sur la bonne voie.

Alors oui, quoi qu'en pensent quelques femelles à l'esprit retors, l'homme a eu sa grippe et a su y faire face en homme, sans courber l'échine, sans fléchir, sans gémir ni pleurer. Tout comme Lancelot ce «bon chevalier courtoi [qui] met sont habilité au combat en tout les sens.» (sic et heureusement anonyme), il en sort aujourd'hui vainqueur. Et toujours modeste avec ça.

Et pour faire bonne mesure, le ragoût de patte de cochon...

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