samedi 20 novembre 2010

Minustah et choléra


J'étais parti pour vous parler de choléra, mais voyant cet article de la presse, je bifurque. On s'élève haut et fort contre la MINUSTAH, qu'on rend responsable de tous les maux du pays dont, évidemment, le choléra. Un peu comme l'âne de la fable, d'ailleurs; si vous vous souvenez, j'ai abordé le sujet en 2008, alors qu'on voulait évincer la MINUSTAH qu'on disait alors responsable de la vie chère. Or, je l'ai dit, c'est un fait observable que la force onusienne ne fait pas grand-chose dans le pays, à part se pavaner dans leurs véhicules clairement identifiés. MAIS, ils représentent l'ORDRE dans un pays instable. Leur mission, vue sous cet angle, me semble plus facilement justifiable : MINUSTAH = Mission des Nations-Unies pour la stabilisation d'Haïti. Or, ces gens armés maintiennent l'ordre et plusieurs savent bien que sans eux, le pays risquerait de sombrer dans la violence chronique. Mais l'ordre, en Haïti, n'est pas aimé. Or, comme les élections sont dans 8 jours, la présence onusienne dérange, on l'aura compris...

Cela dit, il faut admettre qu'en temps normal, il est permis de s'interroger sur la valeur de leur présence. On les voit, de temps à autre, faire un peu de shopping, se prélasser dans leur camion 6 x 6 ou pire, sur les plages qu'ils envahissent sans vergogne, poussant même l'arrogance jusqu'à y installer leur propre génératrice de façon à couvrir le bruit des vagues, sans doute... Car n'y a-t-il rien de plus irritant que le bruit des vagues, je vous le demande? Alors que le moteur d'une génératrice de 10 kW, c'est tellement plus familier et rassurant... On dit aussi qu'ils contribuent à faire monter les prix des denrées. Je ne le crois pas, mais il est bien clair que les commerçants en profitent pour ajuster leurs prix à la hausse quand débarquent les uniformes... Et dites-moi que vous ne feriez pas pareil! Surtout que ces militaires sont visiblement financièrement à l'aise...

Des mal-aimés donc, et pas sans raisons. Pourtant en seconde analyse, leur présence n'est peut-être pas aussi futile que cela. Le pays est souvent sens dessus dessous, et ils peuvent contribuer à rétablir un semblant d'ordre, je le répète. Ou plutôt, à éviter le trop grand désordre, nuance. Et puis, il faut bien le dire, ils constituent un paratonnerre de choix, attirant la foudre populaire, laquelle éclate souvent dans un ciel sans nuages, par ici... Pendant qu'on tire à boulets rouges (presque littéralement) sur ces braves soldats pacifiques (belle antithèse, avouez!), le reste de la population est épargné ou en tout cas, moins affecté. Si bien que, faisant la part des choses, je pense que leur présence est somme toute utile.

Quant au choléra dont on les rend responsables, je le redis : la chose est certainement possible, mais pas prouvée. Et les photos d'un camion vidangeant sa merde ne veulent rien dire : la pratique est courante et n'a rien à voir avec le choléra.

Pourquoi donc manifester contre la MINUSTAH? Pourquoi bloquer les routes et empêcher les convois d'aide médicale d'arriver à destination? Je n'en sais rien! Et je défie n'importe quel "expert" de me donner une explication qui tienne la route... Car pour moi, une telle inconscience ne s'explique pas. Je sais ce que certains diront : "Les Haïtiens sont comme ça." Mais même si c'était vrai, ce n'est pas une réponse. Les Haïtiens ne sont pas différents de n'importe quel autre humain et la pyramide de Maslow s'applique tout aussi bien à eux qu'à n'importe quel peuple. Or, que trouve-t-on tout au bas de la pyramide? Les besoins physiologiques. Quand on est malade, ces besoins ne sont pas comblés et tous les autres besoins deviennent secondaires du seul fait qu'on n'a pas la santé. C'est là un fait observable et je suis sûr que vous l'avez tous et toutes observé à un moment ou à un autre. Déjà, qu'on poursuive la campagne électorale alors même que le danger d'une explosion de choléra est de plus en plus menaçant est une aberration difficile à comprendre. Certes, on peut avancer que la situation ne sera guère mieux dans les mois à venir, alors inutile d'attendre. J'accepte ce raisonnement. Mais il n'en fragilise pas moins la raison d'être des élections qui, rappelons-le, se veulent un exercice démocratique. Dans le présent contexte, des élections démocratiques me paraissent bien utopiques... Qui que ce soit qu'on élise, et qu'importe le nombre d'observateurs certifiés ONU, il sera permis de douter de la valeur du processus; de là à douter de la valeur du nouveau président (ou de la nouvelle présidente, possiblement), il n'y a qu'un pas, que les mécontents vont allégrement franchir, on s'en doute bien...

Tout ça pour vous dire que ça ne va pas tellement bien au pays des "mango fransik". Ce qui n'empêchera pas les mangues de pousser tout à leur aise, bien entendu...

Comme quoi tout est relatif. Évidemment, la préoccupation cholérique reste entière et fondée, tout comme l'est la préoccupation colérique, qui n'est pas vraiment apparentée à la première mais qui reste tout aussi chiante, si vous voyez ce que je veux dire...

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