samedi 5 avril 2008

Ça brasse!...




Encore hier, ma tendre et douce moitié me demandait ce qui m’avait incité à parler de sécurité la veille alors que tout était parfaitement serein sous un ciel d’un bleu limpide. Rien ne laissait présumer des événements qui ont frappé Les Cayes ce jeudi dernier, 3 avril, ni de la violence qui, aujourd’hui encore, paralyse la ville. Ce qui m’avait incité? Rien. Je ne faisais que décrire une situation que je sais véridique, à savoir que la sécurité dans ce pays est toujours relative, «sujette à changement sans préavis», comme le disent les commerçants qui veulent monter leur prix sans avoir à les justifier. Eh bien ici, c’est un peu comme ça : la violence flambe sans qu’on sache trop pourquoi.

Ainsi, la cause avouée des manifestants (plusieurs milliers, s’il faut en croire les médias), c’est le coût de la vie. Cause juste, s’il en est une, et capable de rallier les plus désintéressés, car tout le monde sait que depuis quelques mois, on assiste à une véritable flambée des prix, surtout des produits de base. Le sac de riz (ici, on achète par sac ou par marmite), qui se vendait encore, le mois dernier 350 G (9 $ US environ), est maintenant rendu à 1150 G, soit 30 $ US! Inflation, dites-vous? Escroquerie, plutôt! C’est en tout cas ce que pensent les gens, car le riz, denrée essentielle s’il en est une, sert également d’étalon de mesure. Si le riz monte, c’est que tout monte. Le même argent n’achète plus rien. Or, la patience haïtienne, dont j’ai vanté les mérites, a aussi ses limites, et cet excès conduit le peuple à manifester sa colère et son ras-le-bol. Y a-t-il quelqu’un dans la salle qui ne comprend pas? Dans un pays où les ressources sont si rares qu’elles sont presque en voie d’extinction, on peut aisément admettre que la grogne haïtienne, issue de la frustration de voir le pouvoir d’achat rétrécir comme une peau de chagrin, ait sa raison d’être.

Mais l’organisation méthodique des manifestations, la présence des armes et la colère contre la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haïti), laisse penser qu’il y a peut-être anguille sous roche. Pourquoi cibler une organisation internationale et la rendre responsable de la flambée des prix? Cela m’a paru curieux et lorsque j’ai soulevé le point, j’ai vu une autre image : celle de la drogue.

Lors d’un point de presse hier vendredi, le premier ministre haïtien, Jacques Édouard Alexis a «mis l’accent sur la possibilité que certains manifestants aient été manipulés par des gens impliqués dans le trafic de la drogue et la contrebande. “Il y a des gens qui essaient de détourner l’attention de la population sur la lutte engagée contre la corruption, la drogue, la contrebande et le respect de la Constitution, a déclaré le chef du gouvernement haïtien ”». Vous ne trouvez pas que cette version sonne plus vrai, vous? Moi si. Surtout lorsque l’on sait que la MINUSTAH a joué un rôle important dans cette lutte contre la drogue et la contrebande. Dès lors, la vengeance contre la force onusienne s’explique, n’est-ce pas?

Quoi qu’il en soit, nous, on se tient tranquille. J’ai mis le nez dehors de l’enceinte de l’hôpital hier bien peureusement et non sans raison, je vous le dis. Les barricades enflammées, l’absence de vie dans les rues, la peur qui se lit sur les visages des rares passants… le drame qui se joue ici n’est pas du cinéma, hélas! Mais comme le dit le proverbe, lespwa fè viv. Tout le monde a espoir que les choses vont bientôt rentrer dans l’ordre…

1 commentaire:

  1. Tout le monde aura compris que la photo représente "le calme avant la tempête".

    Mon chum a bien essayé d'aller dans la rue pour prendre une photo du coeur de l'action mais plusieurs personnes lui ont fait comprendre que ce n'était pas une très bonne idée...

    Hier c'était encore chaud; aujourd'hui mardi, on ne sait pas encore... à suivre.

    Chantal

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