samedi 14 juillet 2012

Une armée haïtienne?


En lisant cet article de Gary Victor sur le tourisme je me suis dit que j’y allais ajouter mon modeste grain de sel; mais comme j’ai déjà abordé le thème à quelques reprises, j'ai assumé que vous ne seriez pas fâché si je remettais la chose à une date ultérieure. Car en poursuivant ma lecture, je suis tombé sur les suites du voyage de Martelly en Équateur et le thème de l’armée a retenu mon attention.

D’abord, il est permis de se poser la question : pourquoi un armée en Haïti? Le président Martelly en a fait une promesse électorale, c’est vrai, mais bien des promesses de ce genre restent lettres mortes ou s’évaporent dans l’air du temps. Et pourtant, malgré les sommes astronomiques que le projet implique, Martelly persiste et signe : son récent voyage en Équateur en est une belle illustration. Il faut donc croire qu’il y a sous roche plus que le simple désir de respecter une promesse, au reste très ambitieuse. Et l’une des raisons que l’on peut supputer, c’est sans doute l’omni présence des forces des Nations Unies, présence dont tout le monde a un peu, beaucoup, passionnément ras le bol, c’est selon. Car le fait est que ces militaires ne sont pas bien vus et que leur retrait du pays, en revanche, le sera. Cependant et comme je l’ai déjà dit, mettre la MINUSTAH dehors sans solution de rechange, c’est exposer le pays au désordre et à l’anarchie. Car en cas de coup dur, ces soldats parent à l’essentiel et maintiennent la paix, d’où le nom de leur mission d’ailleurs : MIssion des Nations Unies pour la STAbilisation d’Haïti. Donc, une armée haïtienne entraînée adéquatement permettrait de faire ce que ces soldats étrangers font. C’est d’ailleurs la justification de Martelly qui dit : «Nous regardons des étrangers qui viennent nous donner de la sécurité alors que nous pouvons le faire nous-mêmes.» Difficile de ne pas lui donner raison.

Il y a plus : dans ce pays où l’emploi est rare, une solde de soldat (oui, je sais, ça fait drôle, mais c’est pour mettre en évidence la parenté lexicale) même modeste, est toujours mieux que rien, surtout si on lui ajoute le prestige lié à l’uniforme auquel les Haïtiens sont particulièrement sensibles. Si bien que la raison d’être d’une armée haïtienne se défend et même, s’apprécie. Bien entendu, on parle d’une véritable armée, pas d’une vulgaire soldatesque (même champ lexical) comme celle qui s'est autoproclamée et qui s’amusait encore récemment à faire peur à un peu tout le monde…

Mais si le pourquoi se justifie, le comment reste entier, même si Martelly affirme avec son aplomb habituel que le gouvernement équatorien va lui donner un bon coup de main en ce sens. Mais même dans ce cas, disons simplement que la barre est haute… Ou bien je ne connais rien aux Haïtiens, ou bien les faire marcher au pas, leur ôter la liberté d’agir comme bon leur semble et les forcer à obéir aveuglément à des ordres souvent discutables sera LE défi, et pas rien qu’un peu… Il y a d’ailleurs un délicieux proverbe qui exprime fort bien cette réalité et que je vous passe sans me faire prier : "Mennen koulèv al lekòl pa anyen; se fè-l chita ki rèd". Qui peut se traduire par : Amener une couleuvre à l’école, ce n’est rien : c’est la faire asseoir qui est compliqué. Pas mal, hein?

Mais on aurait tort de vouloir lancer au président une pierre qu’il ne mérite pas encore. Son intention est louable et fondée alors attendons de voir ce qu’il en sortira…

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