jeudi 1 mai 2008

Premier mai



Aujourd’hui, c’est congé. La fête du Travail, la vraie, l’internationale, on peut difficilement passer à côté, pas vrai? Alors l’hôpital ferme boutique en l’honneur de cette journée et, pour nous, bien que nous ayons passablement à faire—fin d’avril oblige—il nous sied tout à fait de célébrer le travail justement en s’abstenant d’en faire.

Il faut dire que nous sommes, depuis peu, de retour à la vie normale, ou à ce qui en tient lieu ici. Bien sûr, il y a encore de l’agitation dans l’air et lundi dernier encore, on nous a fait un peu peur avec des tentatives—maîtrisées avant qu’elles réussissent—de remettre ça; mais dans l’ensemble le calme se maintient. La chaleur augmente de jour en jour, semble-t-il, et avec elle viendra la pluie—bientôt, tout le monde l’espère. Car la pluie, non seulement fait pousser les fruits et les légumes, mais également, par sa violence parfois, change le mal de place, si je puis dire. En outre, si les manifestations se sont éteintes, les kidnappings eux, reprennent… Comme quoi il n’y a rien de parfait sous le chaud soleil haïtien… Avant-hier encore, on parlait d’un chargé de mission français, enlevé brutalement à Pétionville en plein jour. On a su qu’il était noir et peut-être cela a-t-il joué en sa défaveur, mais noir ou non, c’est un Français et ça, c’est une nouveauté, puisque habituellement, les ravisseurs ne s’en prennent pas aux étrangers. Est-ce la nouvelle tendance? Comment le savoir? Les modes ici passent vite…

Mais pour nous, aux Cayes, la vie est redevenue tranquille. Même la visite est partie… Mais bon, toutes les bonnes choses ont une fin—les mauvaises aussi, incidemment—et la vie continue.

Donc, si l’épisode violent que nous avons connu au début du mois dernier est vraiment derrière (ce que personne n’ose affirmer) nous allons avoir un mois de mai bien différent. Le travail, puisqu’on le célèbre aujourd’hui, y sera bien représenté, surtout avec la visite prévue du grand patron et le départ prévu de notre chère Sœur Évelyne, ce qui veut dire pour nous les bouchées doubles. Mais il semble que j’aie une réputation (surfaite bien sûr) de grande gueule, alors les bouchées doubles, tu parles…

Il n’empêche que l’efficacité au travail réduit d’autant le temps de travail, donc augmente proportionnellement le temps de non-travail (et je ne veux pas dire «loisir», une création issue de notre société moderne). En d’autres termes, la paresse conduit à l’efficacité, laquelle débouche sur le temps libre, lequel permet la paresse. Joli, non? À propos, L’Éloge de la Paresse, de Jacques Leclerq, vous connaissez? Un court ouvrage (titre oblige), mais fort intéressant et que je ne saurais trop recommander à tous ceux, toutes celles qui oublient que le travail, c’est bien et c’est bien nécessaire, mais bon, faut quand même pas exagérer…

Je vous laisse réfléchir sur cette belle phrase de Marx :

«Le travail lui-même est nuisible et funeste non seulement dans les conditions présentes, mais en général, dans la mesure où son but est le simple accroissement de la richesse.» (Manuscrits de 1844, Karl Marx, éd. Flammarion, 1996, 1844, p. 62)

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