mardi 29 juin 2010
La reconstruction
Lu aujourd'hui (et pas plus fin pour ça): «La reconstruction d'Haïti est trop lente, dit Ban Ki-moon». Un autre. Et pas un deux de pique, comme on dit couramment... Mais pas plus perspicace pour autant que notre ami Sean Penn ou n'importe quelle personne sensée. L'argent derrière la reconstruction n'est toujours pas là. On parle de 10 milliards de dollars. DIX MILLIARDS, les amis. C'est pas du p'tit change, ça! C'est même substantiel. Insuffisant, soit, mais substantiel. Ce pourrait être un bon commencement, en tout cas. Mais rien ne se passe. On parle, on ergote, on planifie, on calcule, on projette, mais rien ne se passe. Rien. Ou si peu. Encore une fois et comme je l'ai dit antérieurement, ce sont les efforts des petits qui portent fruit. Les grandes promesses internationales tombent à plat comme un soufflé trop longtemps hors du four... La montagne qui accouche... Et comme La Fontaine nous le dit: Qu'en sort-il? Une souris... Vous ne trouvez pas que ça commence à faire, vous autres?
Ce que j'ignore, c'est ce qu'il faudrait faire pour que soient débloqués ces fonds qu'on dit accessibles, mais non livrables par manque de solidité administrative (à l'interne, bien entendu). On dit bien n'importe quoi. Préval n'est sans doute pas un saint, je l'ai dit, mais cela en fait-il un voleur pour autant? Je ne crois pas. En tout cas, pas nécessairement. Et il y en a plusieurs qui, comme lui, sans être des parangons de vertu, sont suffisamment honnêtes pour gérer des fonds adéquatement. On n'a pas besoin du pape pour ça! D'ailleurs, je l'ai déjà dit, j'ai un peu en horreur l'odeur de sainteté que certains (certaines aussi, mais moins fréquemment) exsudent sans vergogne. À les entendre -- à les sentir, devrais-je dire -- on croirait que eux seuls connaissent la voie, la vérité et la vertu. Eux seuls savent quoi faire et comment le faire. Surtout s'il s'agit de gérer quelques milliards, n'est-ce pas? Les candidats à la gestion miraculeuse ne manquent pas, ici... Mais tout ça c'est de la frime, de la poudre aux yeux, comme s'il importait plus de faire bonne figure que d'attaquer le vrai problème. Et moi je vous dis, les amis : le vrai problème, c'est que les gens sont présentement dehors!
Je sais, vous allez me dire que c'est pas si simple à régler et je serai d'accord. Mais il me semble que la première chose à faire, c'est vraiment de savoir où on va mettre ces gens qui sont dans la rue depuis plus de 6 mois! Et puis je vous le dis encore, dégager les décombres qui encombrent! (Car oui : des décombres, c'est encombrant, au cas où vous en douteriez...) Mais mon impression est qu'on essaie trop de refaire du neuf avec du vieux. On idéalise la démarche. On veut que ce soit un exercice de style. Et pendant ce temps, les gens attendent, eux! Ailleurs, on peut lire un compte rendu sommaire d'une rencontre entre les gens du camp de Tabarre et les députés européens, venus «se montrer». « Il y a des choses qui marchent, mais vous ne pouvez pas tout attendre des ONG, vous devez me dire ce que nous allons faire ensemble pour améliorer la situation », dit Michèle Striffler, députée française. Comme je le disais plus haut, on pellete des nuages et on s'étonne que ça ne fasse pas un gros tas... Déprimant, dites-vous? Oui. C'est vrai. Et on ne voit pas de structure, même fragile, même branlante se dessiner dans l'horizon gris de ce pays bleu.
J'avoue qu'à la longue, ça nous rend mal à l'aise. Pour nous, évidemment, tout est différent : la maison spacieuse, l'eau courante, l'électricité 24/24 (ou presque), les films sur DVD, la connexion Internet, la nourriture variée et abondante, le vin, la bière... bref, nous ne manquons de rien. Mais on peut difficilement se fermer les yeux sur ce qui se passe dans le reste du pays, pas vrai? On peut difficilement dire : «Après moi le déluge!» On peut difficilement se laver les mains du sort de tous ces malheureux en se disant qu'on n'a rien à voir là-dedans... Je vous donne cette belle citation de John Donne, issue de la Méditation #17, tirée de "Devotions upon Emergent Occasions" (1624): "No man is an island, entire of itself; every man is a piece of the continent, a part of the main. If a clod be washed away by the sea, Europe is the less, as well as if a promontory were, as well as if a manor of thy friend's or of thine own were: any man's death diminishes me, because I am involved in mankind, and therefore never send to know for whom the bell tolls; it tolls for thee." (1) D'où le grand roman d'Hemingway (For Whom the Bell Tolls) sur le thème, d'ailleurs. Mais qui vivra, verra...
En tout cas, tant que les cyclones nous laissent tranquilles...
(1) Aucun homme n'est une île, entièrement elle-même; chaque homme est un morceau du continent, une partie du principal. Si une motte [de terre] est emportée par la mer, l'Europe en est amoindrie, tout autant que s'il s'agissait d'un promontoire, tout comme si le manoir de l'un de tes amis ou le tien l'étaient : la mort de n'importe quel homme me diminue, parce que je suis partie intégrante de la race humaine et par conséquent ne demande jamais pour qui sonne le glas : il sonne pour toi. (Traduction libre)
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