mercredi 17 mars 2010
La bonne conscience
Bonne nouvelle reçue hier et que je partage avec vous aujourd'hui : nos aimables patrons ont accepté de considérer une proposition visant à offrir des services d'orthopédie à même notre institution. Vous allez me dire qu'il n'y a pas de quoi en faire tout un plat, et sans doute aurez-vous raison, mais au départ, leur réticence était telle que l'idée même d'accroître notre offre de service pour l'ajuster aux nouveaux besoins post-séisme ne passait pas. À leur défense, je dois dire qu'il est difficile, pour des gens de l'extérieur, de comprendre la nouvelle dynamique qui est en train de voir le jour dans le pays. Les besoins, déjà importants, vont certainement s'accentuer et tout spécialement en orthopédie. Mais à force de parler à des gens plus importants que votre humble scribe, ils ont compris qu'il était peut-être avantageux pour eux (lire bon pour leur réputation) d'ouvrir une porte, quitte à la refermer si l'odeur devient trop nauséabonde...
Il faut comprendre qu'en cette période particulière, il est très facile de se donner bonne conscience en Haïti : il suffit simplement de se dire qu'on «aide» le peuple et ça y est, on peut dormir sur ses deux oreilles, sans souci de la forme que peut prendre cette «aide» ou de son efficacité véritable. Ainsi en est-il de l'aide internationale, celle qui, initialement devait compenser les lourdes pertes matérielles subies par le pays. Qu'en est-il après deux mois? C'est parti à la dérive. Témoin cet article, paru hier sur cyberpresse. Maintenant, ce sont les durs à cuire qui s'occupent de l'aide et tous les moyens sont bons pour en tirer profit. Et les victimes, dans tout ça? Eh bien elles sont déjà victimes, alors elles le deviennent simplement un peu plus... Surtout les filles, vous l'aurez compris sans avoir besoin de lire l'article de la presse sur le sujet... Je sais, je sais, vous allez dire que c'est dégueulasse, dégoûtant, répugnant et tout et tout, et vous aurez absolument raison. Mais si impensable que puisse être la chose, elle n'en est pas moins réelle : les dés sont truqués, je l'ai déjà dit, et les perdants restent toujours, par définition, les perdants. Ou plutôt, les perdantes, devrais-je dire...
Facile de se donner bonne conscience, mais lorsqu'on y regarde de près, on avale de travers...
Cela peut-il changer? Bien sûr! Mais pas vite. Déjà, à partir du moment où l'aide a commencé à arriver, les mauvais éléments ont commencé à se frotter les mains et à se pourlécher. Et ça continue. Et pendant ce temps, l'argent afflue, on le sait, on en entend mille témoignages, mais ne va nécessairement au bon endroit, je l'ai déjà écrit. Il faudra bien plus qu'une volonté politique, bien plus que quelques casques bleus, bien plus que quelques tentes disséminées ici et là pour redresser la barre de ce navire passoire et le mener à bon port. Il faudra des actions concrètes, menées manu militari, et tant pis si certains «passent au cash». Et surtout, il faudra du temps.
Mais, comme le dit un proverbe haïtien que tout le monde connaît: «Piti piti zwazo fè nich.»
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