lundi 1 février 2010

Bonjour février!


Vous ne pensiez tout de même pas que j'allais vous laisser commencer février comme ça! Surtout que c'est un mois important, février. Le mois où les jours rallongent. Le mois de la Saint-Valentin... Le mois de mon anniversaire, aussi. Ça, c'est important! Pourtant, c'est un mois qui commence comme l'autre a fini : en plein drame. Car il s'étire, notre drame; il n'en finit plus de durer, à tel point que c'en devient rasant. Comme un bon film qui ne finirait pas: tout à coup on en a marre, on se lève et on passe à autre chose et tant pis pour la fin. C'est dans cet esprit que je vous ai livré le texte d'hier: il me semble que ça serait bien si l'on pouvait passer à autre chose. Mais hélas!...

Les médias commencent à se désintéresser de la chose, et c'est bien. Ils ont fait leur travail, ils ont véhiculé l'information, ils ont fait monter les cotes d'écoute ou similaire et maintenant, c'est "passons à autre chose". Encore une fois, c'est correct comme ça. Il faut que la page se tourne et que l'histoire ait une fin. Mais voilà: ici, elle n'en a pas encore. On ne sait pas ce qui s'en vient. On sent que nous sommes à la deuxième vague: après la catastrophe, il y a l'après-catastrophe qui, dans le cas qui nous touche ici, peut être aussi mauvaise (quoique moins spectaculaire) que la catastrophe elle-même. Car maintenant, les gens, pris par surprise par l'événement, ont eu le temps de remonter leurs culottes et voudraient bien que les choses rentrent dans un semblant d'ordre: le cosmos, par rapport à son contraire: le chaos. Malheureusement et quoi qu'on en dise, c'est toujours cahoteux et chaotique. Certains reçoivent à manger, d'autres pas, certains reçoivent des soins inadéquats, d'autres pas, comme en témoigne d'ailleurs cet extrait d'un article d'Ariane Lacoursière:
"Samedi midi, le Dr Pitchner opère un jeune homme de 18 ans dans son bloc opératoire. Le patient présente une immense plaie sanguinolente au coude droit. «Il s'est fait amputer dans un autre hôpital. Mais la plaie s'est infectée, explique le Dr Pitchner. Les grosses taches noires dans la plaie sont causées par l'infection.» Dans un ultime effort pour freiner l'apparition de tétanos, le Dr Pitchner vaccine son jeune patient. «Je le fais à tout le monde. Par prévention», dit-il."
Or cette situation, nous l'avons vécue ici, à notre petit hôpital, et disons que ce n'est pas tellement encourageant. Surtout que les amputations ne sont pas pratiquées par des charlatans, mais par des médecins étrangers, qu'on croit compétents et professionnels. Mais on est où là? Le Dr Ricardo, le chef de notre équipe de Brésiliens ici, m'a dit qu'il a vu des confrères d'un autre pays (que je ne nommerai pas) faire des choses très risquées pour l'infection. C'est vrai que ce ne sont que des Haïtiens ou des Haïtiennes, alors... Alors quoi? À quoi sert de soigner si l'on soigne mal? Du travail bâclé reste toujours du travail bâclé, qu'il faut reprendre à un moment ou à un autre et dont les conséquences sont parfois très lourdes. Alors pourquoi ne pas prendre le temps de faire les choses proprement du premier coup? Surtout qu'il ne s'agit pas de mesures compliquées ou onéreuses sur le plan financier, mais de simple gros bon sens. Ah! Je vous dis...

Et juste cela vous dit, mieux que n'importe quelle explication élaborée, à quel point les choses ne vont pas bien. Les médias voudraient bien pouvoir tirer un trait sur toute cette histoire, comme j'en ai tiré un hier sur janvier, mais on est encore loin du compte, je le répète...

Ne vous en faites pas: quand les choses auront baissé suffisamment pour qu'on puisse recommencer à respirer, je vais vous le faire savoir!

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