samedi 21 janvier 2012

Orphelinats


Pour on ne sait quelle raison, il est question d’orphelinats, ces temps-ci. L’article du Nouvelliste ici et cet autre là font état des préoccupations locales, tandis que celui de Cyberpresse met en relief un autre aspect du problème.

Il faut dire que les orphelinats pullulent en Haïti, spécialement depuis le tremblement de terre, il va sans dire. Comme il arrive souvent, les enfants n’étaient pas nécessairement en compagnie de leurs parents, à l’heure du séisme, et certains ont survécu là où les parents sont disparus sous les décombres. D’où l’explosion du nombre d’enfants dans ces endroits qu’on désigne sous le nom d’orphelinats. Or, ces structures sociales ne sont pas d’égale qualité et plusieurs sont même douteuses, tant dans leur fonctionnement administratif que dans le soutien apporté aux enfants. Vous me direz que ce n’est certes pas l’apanage d’orphelinats d’opérer dans des paramètres administratifs flous et vous aurez raison : des écoles, des hôpitaux et de nombreux projets humanitaires fonctionnent parfois aussi avec plus ou moins de rigueur pour des résultats douteux. C’est le propre d’un pays en reconstruction, je pense. On ne peut pas toujours s’arrêter à des principes éthiques ou techniques quand on veut sauver le monde, n’est-ce pas… Il n’en reste pas moins que les orphelinats poussent ici comme des champignons et certains, j’ose le dire, sont probablement aussi vénéneux. Que l’État réagisse en fermant quelques établissements semble dès lors tout à fait logique et sensé et on ne peut qu’approuver cet effort d’épuration des mauvais champignons. Sauf que, bien malheureusement, ce sont les enfants qui en font les frais...

Le cas de Jacqueline Lessard est une autre affaire. Désolée de voir son orphelinat détruit, elle a eu le malheur (le bonheur en fait) de plaider sa cause auprès du public québécois, lequel est très généreux pour des causes comme ça (et non, ce n’est pas moi qui le dis). Conséquence, pas mal d'argent, une fondation, des principes administratifs plus rigides et des comptes à rendre, rien de ce que voulait Mme Lessard (sauf l'argent, bien sûr)! Est-ce à dire que son orphelinat détournait les fonds institutionnels à des fins personnelles? Pas nécessairement et pour ma part, je ne le crois pas. Mais une fondation doit opérer dans la transparence et ouvrir ses livres à qui veut les consulter. Or, quand on n’a pas de livres, disons que ça augure mal…

Par ailleurs, il est vrai qu’en Haïti, plusieurs transactions financières se font en argent sonnant, sans papier, sans facture, sans fiche, bref, sans traces. Ce qui ne veut pas dire que ce soit malhonnête : l’on marchande pour une douzaine de chaises, disons, et l’on paie le prix convenu en se serrant la main. Rien de tordu là-dedans. Sauf que dans nos pays, nous sommes tellement habitués à ces preuves tangibles des transactions que sont les coupons de caisse, les chèques, les reçus, les relevés de cartes de crédit et j’en passe, qu’il nous est difficile de ne pas associer les transactions en argent comptant à un commerce illicite ou croche, une pratique inacceptable pour une fondation qui se veut limpide et digne de foi. C’est bien dommage. Car en vérité, même pour une organisation, il est parfois difficile de fournir toutes les pièces justificatives qui, en principe, doivent étayer les rapports comptables. Notre petit hôpital ne fait pas exception et souvent, il nous faut composer avec la réalité de transactions faites de main à main, en argent sonnant. Mais si l'on s'astreint à entrer la dépense sur une feuille de route, la comptabilité peut alors s'effectuer à peu près normalement et c'est le système que nous utilisons, avec succès, je le dis sans fausse modestie.

Mais j'en reviens aux orphelinats : autant il s'agit là d'une institution essentielle composée de nombreux établissements étalés dans le pays, autant c'est une institution qui me paraît d'une gestion délicate et aisément discutable. Car toutes les manières de faire s'y retrouvent. De là à s'en sentir concerné, il n'y a qu'un pas, surtout lorsqu'on est donateur...

Et pourtant, les enfants, ces enfants sans famille, qu'est-ce qu'ils en ont à cirer des contraintes administratives?


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