Bon, eh bien ils sont venus une fois de plus et n’ont rien trouvé
à redire sur le fonctionnement de notre petit hôpital. Ce qui, en
soi, vaut le meilleur compliment, vous serez d’accord… Vous avez
compris que je vous parle de nos chers patrons dont la visite trisannuelle est aussi réglée qu’une horloge suisse. Une visite
sans histoire donc et c’est comme ça qu’on les aime.
Mais ce n’est pas
de la visite des patrons dont je veux vous entretenir aujourd’hui,
mais bien de la fête que nous avons eue pour les employés de
l’hôpital. Quelques employées —
pharmacienne, secrétaire et infirmières chefs ont décidé qu’il
serait bien de faire une fête pour les employés. Elles sont venues
me voir avec cette idée fraîchement pondue, pour obtenir mon
approbation et surtout, le financement qui devait aller de pair avec.
Faut-il que je le précise : elles n’ont pas eu besoin de me
supplier pour que je les encourage dans ce projet. Qu’elles ont
réussi à organiser de main de maître, malgré l’inexpérience et
le temps court qui leur était imparti. Si bien que, ce dernier
samedi, juste après la visite des patrons, près de la moitié des
employés se sont retrouvés à la plage à s’amuser, dans une
ambiance très bon enfant, très insouciante, très rieuse. Les
filles entre autres, ont eu un plaisir fou rien qu’à danser en
rond en se tapant dans les mains; tandis que d’autres jouaient au
ballon, aux dominos ou simplement, buvaient une petite bière en
jasant avec le voisin. Boire une petite bière pour des gens qui
n’ont pas les moyens de s’en procurer n’est pas banal, je le
précise… Et pourtant, personne n’a abusé de l’alcool… Puis
la nourriture, comme toujours très abondante et copieuse, et leur
mets préféré, la chèvre —
gras et os inclus —
et l’incontournable riz collé. Vous dire qu’ils ont aimé serait
peu dire : tout le monde s’est dit enchanté et désireux de
remettre ça l’an prochain!
Le commentaire que
je veux faire sur cette belle fête, c’est la joie de voir la joie
des autres. Un phénomène contagieux, tous les humoristes vous le
diront : le rire entraîne le rire, tout comme la tristesse
déteint sur nous plus qu’on ne le voudrait, parfois. Mais ce
n’était pas le cas en ce samedi ordinaire : ces gens-là
étaient tellement contents, c’en était vraiment contagieux! Et
tout ça dans une ambiance de belle camaraderie, sans souci de la
position professionnelle ou sociale. Tout le monde en maillots de bain
(certaines plus seyantes que d’autres, est-il besoin de le dire?), sans tambours ni complexes,
tous égaux, tous libres, il y a de quoi revoir la nécessité de la Charte des droits
et libertés, tiens… Et ce plaisir que rien ne crée autre que la
compagnie de gens qui jouent ensemble sans soucis, sans compétition,
sans arrogance, sans vanité, ce plaisir, les amis, vous émeut dans
l’âme. On se prend d’optimisme, tout à coup. On se dit que les
problèmes habituels n’en sont pas de vrais : seulement
quelques petites poussières qu’une perception pessimiste
transforme en montagnes infranchissables… La joie fait cela aussi,
faut croire… En tout cas, une belle illustration, une fois de plus,
que des adultes peuvent s’amuser comme des enfants —
avec rien — et
en tirer ce même contentement naïf dont les enfants ont la
spécialité. Mais pas l’exclusivité. Car je vous l’ai dit :
les Haïtiens sont très forts là-dedans…
Somme toute une
expérience concluante pour tout le monde, y compris pour les absents
qui s’en mordent un peu les pouces et qui se promettent bien de ne
pas passer à côté la prochaine fois!
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