dimanche 15 décembre 2013
Si le chapeau vous fait...
La journée avance à grands pas et l’intention fort louable que j’avais de produire mon texte dominical s’en trouve menacée, alors aussi bien m’y mettre sans plus attendre si je veux avoir le temps avant l'heure de la bière...
Le sujet du jour, non ce n’est pas la différence de température entre le nord et le sud, laquelle en a fait rager plus d’un, plus d’une, sur facebook… Mais aujourd’hui, un peu dans la ligne directrice de la semaine dernière, je vous parle encore de littérature, plus précisément du cas Dany Laferrière dont l’accession au panthéon de la littérature française, la fameuse autant que vétuste Académie française, rejaillit sur ses compatriotes, tant québécois qu’haïtiens. Bien que je sois sincèrement content pour M. Laferrière, je comprends mal pourquoi et comment nous, le peuple, pourrions partager la fierté de cet écrivain qu’on honore justement parce qu’il est écrivain — pas parce qu’il est de telle ou telle nationalité!… Et pourtant, la presse haïtienne tout autant que celle du Québec s'en flatte le nombril et en profite pour rappeler à ses lecteurs et à ses lectrices que le monsieur est Haïtien ou Québécois, voire Canadien, c'est selon, comme si l’honneur qu’on lui fait — et qu’il mérite tout à fait, je le redis — avait à voir avec la nation qui l’a vu naître ou qui l’a accueilli sous son froid manteau. C’est là une mécanique qui m’échappe.
Je n’ai pas tout lu ce qu’on écrit depuis cette fabuleuse nomination — quelques échantillons ici et là m’ont suffi — mais une phrase, dont je n’arrive plus à retrouver la source, le citait, répondant à la question de savoir s’il se considérait Québécois, Canadien ou Haïtien. «Je suis écrivain.» J’espère qu'il a vraiment dit cela, car il me semble que cette simple affirmation correspond à ce qu’un écrivain — un artiste dans l’âme — doit ressentir. Laferrière a su, mieux que plusieurs, écrire ce qu’il avait envie d’écrire et bien que, personnellement, je ne sois pas particulièrement porté sur l’auteur, il faut bien dire qu’il a du corps et qu’il a su «cent fois sur le métier, remettre son ouvrage.» Alors oui, indéniable consécration pour un écrivain de langue française, l’Académie française, et pourquoi pas? Voilà un petit velours des plus confortables. Mais s’enorgueillir collectivement que Laferrière soit Québécois ou Haïtien? Là, je ne comprends plus. Les personnes exceptionnelles le sont-elles par droit de naissance, par la société qui les a nourries ou simplement par leur entêtement à persister même en dépit des difficultés? Ne dit-on pas que c’est à l’œuvre qu’on reconnaît l’artisan? Voilà ce que je pense et ce que j’aime penser que les bonzes de l’Académie ont vu chez Dany Laferrière : un écrivain francophone digne de ce nom. Il n’est pas le seul, mais il est bon et cela seul devrait suffire à l’encenser.
À la rigueur, je peux comprendre qu’on veuille se servir du succès du monsieur pour démontrer aux jeunes Haïtiens qu’avec courage et détermination, on peut s’en sortir, tout Haïtien que l’on puisse être. «[…] Dany Laferrière à l’Académie française, dans le fauteuil de Montesquieu et de Dumas fils, c’est un exemple pour prouver à nos jeunes, ici, en Haïti, que le travail, l’intelligence, la volonté payent », écrit Gary Victor, un vieil ami du nouvel académicien. Mais son chemin, M. Laferrière l’a fait lui-même et je pense que là est tout son mérite — pas dans son appartenance sociale ou ancestrale.
Et tu parles d’un joli clin d’œil aux prétentieux!
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