lundi 23 février 2009
L’homme qui construisait des maisons
L’un plantait des arbres—Frédéric Back nous en a fait un film plutôt réussi en son genre—mais celui dont je veux vous parler aujourd’hui accomplit, dans l’ombre ou presque, une tâche tout aussi valable, sinon plus : Raymond construit des maisons. Je vous entends déjà : «Ben voyons! construire une maison, y’a rien là!» Planter un arbre non plus. Mais tout comme dans l’histoire de Jean Giono, ce n’est pas tant le geste qui compte que ce qui se trouve derrière, ce qui le fonde en quelque sorte.
Donc Raymond construit. Systématiquement, sans se poser trop de questions existentielles, il fait à la mesure de ses moyens limités, des fonds disponibles et des besoins rencontrés; ce qui ne l’empêche pas de s’attaquer à chaque nouveau projet avec le même cœur, la même énergie et la même couleur si particulière, pour en arriver chaque fois au même résultat tangible : une maison qui en a l’air et la chanson, c’est-à-dire capable de combler à la fois le besoin physiologique de s’abriter et celui, non moins important, d’assurer une certaine sécurité.
Ainsi, malgré toutes les difficultés rencontrées, Raymond a déjà 34 constructions à son actif et ça continue. Voilà une manière directe d’aider le peuple.
Car la «clientèle» de Raymond, ce sont les pauvres. Attention : pas ceux ou celles que l’on voit en ville, mais les autres, les vrais démunis, les laissés pour compte, ceux ou celles que les dernières intempéries ont laissé «le cul entre deux chaises», si vous me passez celle-là. Il s’approche de ces pauvres, les regarde, les écoute, leur donne l’espoir, retrousse ses manches, enfourche sa mobylette, achète les matériaux, les livre au site du chantier projeté, brasse le ciment, taille les 2 x 4, fait la peinture, sue, s’écorche les jointures, placote, prie, rit, chiale, se fait doucher par les pluies diluviennes, sèche sous le soleil de plomb et en moins de cinq jours (!) met fin au projet en remettant la clé au nouveau, à la nouvelle propriétaire. Coût total : $1,500 US. Oui, oui, vous avez bien lu : mille cinq cents dollars américains. Et c’est là un autre miracle, ou pas loin. Car dans ce pays où tout est hors de prix, y compris, bien sûr, les matériaux de construction, il s’agit là d’un réel tour de force! Il va sans dire que la maison reste modeste à tous égards : ne cherchez pas ici la thermopompe ou le sous-sol fini; mais l’essentiel s’y trouve, et même plus : un plancher de béton, des murs en blocs de ciment, un toit de tôle, une porte solide, le tout recouvert d’une bonne couche de peinture, c’est déjà bien plus que bien des familles peuvent s’offrir. Voilà donc une maison qui pourra accommoder deux ou douze personnes et les garder à l’abri des intempéries.
Alors dites-moi : c’est pas beau, ça? Et en plus, Raymond y ajoute son petit côté bien à lui…
dimanche 22 février 2009
Anniversaire!
Aujourd’hui est un jour spécial, puisque c’est mon anniversaire. Eh oui, il en faut bien un puisqu’il a bien fallu naître un jour pour pouvoir en parler plus tard. La Palisse n’aurait pas dit mieux, tiens. Toujours est-il que l’anniversaire est important. Le terme vient du latin—même les ignares l’auront deviné—anniversarius, et signifie littéralement «revenir annuellement», tout simplement. Or si l’on ne naît qu’une fois, on peut en commémorer le moment autant de fois que l’on veut et si la tradition veut qu’on le fasse sur une base annuelle, pourquoi pas? En tout cas, la commémoration annuelle, pour ma part, me suffit largement et permet de planter un nouveau jalon correspondant à la distance temporelle parcourue.
Faut-il faire du jour un événement grandiose? Évidemment non. Le jour devient spécial du seul fait que l’on sait à quoi la date correspond et la commémoration peut être aussi simple qu’un bon repas ou une bouteille de champagne rosé (ou les deux). C’est donc dire que ce jour spécial pour moi n’en reste pas moins un jour tout à fait ordinaire pour le reste du monde et c’est bien ainsi.
Pas de cadeau d’anniversaire, alors? Si si. Le meilleur et le plus appréciable : le départ du gros chef. Non pas parce que ce départ équivaut au départ du chat dont la présence empêche les souris de danser, mais plutôt parce que son départ conclut une période difficile, incertaine et inconfortable pour tout le monde, incluant votre serviteur. Je vois donc, dans la résolution partielle de la crise, un cadeau tout a fait digne de mention et d’appréciation.
La crise : parlons-en. Je fais suite ici à la grève que nous avons subie et dont je vous ai parlé précédemment et qui avait pour cause le mécontentement des employés face au comportement de l’un de nos médecins. Le médecin a quitté les lieux pour un temps et tout le monde était un peu anxieux de voir comment le gros chef allait approcher le problème de son retour éventuel. Or, il s’en est fallu de peu que les choses prennent une dangereuse tangente lorsque le patron a voulu imposer ce retour. Mais le message a fini par passer, clair et non équivoque : pour que ce personnage revienne, il faut que certaines conditions soient remplies. Conditions difficiles, s’il en est, et pas évidentes pour celui qui doit s’y soumettre… Ce qui ne veut pas dire que la chose soit impossible, mais dans un cas comme dans l’autre, les employés sont satisfaits de cette conclusion et l’hôpital pourra donc continuer à fonctionner sans plus de heurts ni de tremblements. Les quelque 200 personnes qui passent quotidiennement pourront ainsi continuer de recevoir les soins de santé auxquels elles aspirent et que l’on s’efforce de leur procurer. N’est-ce pas là un cadeau d’anniversaire digne de mention?
Donc, merci de me souhaiter une belle journée d’anniversaire, elle l’est déjà : pleine de soleil sous un beau ciel bleu. Et dans quelques minutes, départ pour la plage, alors qui dit mieux?
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